La Nation Bénin...

Suite aux réactions suscitées par son décret du 5 octobre dernier interdisant les activités des organisations faîtières des étudiants sur les campus des universités du Bénin, le gouvernement a dépêché une délégation conduite par Joseph Djogbénou pour informer l’opinion nationale sur les tenants et aboutissants de cette décision. C’était mardi 11 octobre à Cotonou.
Le décret interdisant les activités des organisations faîtières des étudiants sur les campus universitaires du Bénin ne vise pas à supprimer la liberté d’association. Il a pour finalité de mettre fin aux violences. Ainsi pourraient se résumer les explications fournies par la délégation gouvernementale lors de la conférence de presse destinée à calmer les inquiétudes.
Dans son intervention, Joseph Djogbénou, ministre de la Justice, tente d’expliquer la décision. Procédant par la négative, il fait savoir que ce décret ne dissout pas les organisations estudiantines comme certains le font croire. Car, souligne-t-il, il n’appartiendra pas à ce gouvernement de porter atteinte aux règles fondamentales protégeant la liberté. Mieux, il perçoit l’espace universitaire comme l’ancrage essentiel de la lutte pour la liberté. Alors, démontre-t-il, ce n’est pas un décret portant dissolution ou suppression d’une quelconque liberté. « La liberté, c’est le vent. L’on ne peut pas l’attraper, même si on en a l’intention, par la main », tente-t-il d’expliquer. Mais ce décret, rectifie Me Djogbénou, « porte interdiction d’activités ». Parlant de ces activités, il dira qu’elles sont contre la loi et sont exercées soit par des structures proches des associations, soit par elles-mêmes. A ce titre, il évoque certaines pratiques ayant eu cours sur le campus d’Abomey-Calavi. Entre autres, il dénonce le fait que certains responsables d’étudiants disposent «d’aides de camp, de gardes du corps, l’existence d’états-majors». Sur le campus d’Abomey-Calavi, poursuit-il, existent aussi des groupements qui ont « l’esprit de pensée» et «le mode d’action des milices».
Les motivations du gouvernement
En termes de motivations, Marie-Odile Attanasso, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, dira que plusieurs raisons ont conduit le gouvernement à prendre cette décision. D’une part, il y a le climat d’insécurité permanent dû à l’existence d’au moins trois associations faîtières dont il n’est pas possible de concilier les positions. Marie-Odile Attanasso soutient que ces associations faîtières se disputent la priorité sur le campus de Calavi. Ce qui explique,en partie, la crise permanente qui sévit à la Faculté des Lettres, Arts et Sciences humaines depuis 2015. A l’en croire, à cause de la multitude d’associations, il devient difficile de négocier lors des crises. «Lorsque vous négociez et qu’une association est d’accord, les deux autres ne sont pas d’accord. Et nous sommes toujours dans ce perpétuel recommencement depuis 2015», déplore le ministre de l’Enseignement supérieur ajoutant qu’elles en viennent même à se faire la guerre. A cet effet, elles se partagent l’espace du campus en instaurant des zones interdites accessibles seulement aux membres. «Le recteur ne peut pas y aller, le vice-recteur non plus, les professeurs encore moins», révèle Marie-Odile Attanasso avant de mentionner qu’elle a des rapports du Centre des œuvres universitaires et sociales, voire des vidéos montrant qu’entre associations, ils se poignardent. Elles disposent de machettes, de couteau et même de drapeau.
Cette impossibilité de conciliation crée des problèmes aux universités béninoises sur le plan de la représentativité au niveau sous-régional. Elle en veut pour preuve une réunion ayant regroupé à l’Eneam les associations d’étudiants de la sous-région. Chaque pays était représenté par une association mais le Bénin en avait trois. Ce qui rend difficile leur participation. «A la fin de cette réunion, ils ont souhaité qu’on fasse tout pour que le Bénin ait désormais une seule association», fait savoir Marie-Odile Attanasso. «Il a été impossible au Bénin de prendre sa place au niveau sous-régional», se désole le ministre Attanasso.
A son tour, Oswald Homéky, ministre de la Jeunesse et des sports, intervient pour éclairer sur les perspectives. Il s’agit, selon lui, de la réorganisation de sorte qu’on ait une seule association faîtière. Cette option a des avantages certains pour les étudiants. Cette réorganisation sera opérée par les étudiants en concertation avec le gouvernement.