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Jour 4 du procès Dangnivo: Un témoin clé dépose, mais...

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Tribunal de Cotonou Tribunal de Cotonou

Poursuivie ce mercredi 19 mars, l’audience du procès de l’affaire Dangnivo a été marquée par l’audition du colonel Firmin Boko, capitaine de la Gendarmerie nationale au moment des faits et président de la Commission d’enquête ayant travaillé sur cette affaire en 2010. Ses déclarations, pour la plupart contestées par les accusés Alofa et Amoussou, ont plus ou moins apporté de nouveaux éléments sur les circonstances de la disparition de Pierre Urbain Dangnivo, notamment en ce qui concerne les rôles présumés de ces accusés.

Par   Isidore GOZO, le 20 mars 2025 à 08h45 Durée 3 min.
#Affaire Dangnivo

Quatrième jour du procès Dangnivo. Ce mercredi, l’audience a pris une nouvelle tournure avec l’audition d’un nouveau témoin clé. Il s’agit du colonel Firmin Boko, capitaine de la Gendarmerie nationale au moment des faits et président de la Commission d’enquête y relative. A 9 h 58 minutes, les accusés Donatien Amoussou et Codjo Alofa ont fait leur entrée dans la salle d’audience. Le président Guillaume Laly a ouvert la séance en résumant les audiences précédentes, avant de préciser que de nouvelles personnes (témoins) seraient convoquées pour comparution.

Appelé à la barre à 11 h 33 minutes, Firmin Boko a détaillé l’enquête qu’il avait dirigée en 2010. Il a expliqué les premières pistes qui avaient été explorées lors de l’enquête, ainsi que les auditions menées auprès des proches et collègues de la victime. Firmin Boko a révélé que l’analyse des échanges téléphoniques entre Pierre Urbain Dangnivo et l’accusé Codjo Alofa avait mis en lumière plusieurs appels, dont un dernier appel avec une personne dénommée Houndegla qui a formellement nié connaître la victime. « Lors de l’enquête, nous avons découvert que monsieur Alofa avait des contacts réguliers avec Dangnivo», a souligné le colonel. Ce détail a renforcé les soupçons concernant le rôle d’Alofa dans la disparition de la victime.

Le colonel Firmin Boko a ensuite fourni des éléments corroborant les accusations portées contre les deux principaux accusés. Il a expliqué que Alofa avait identifié Donatien Amoussou comme étant celui qui lui aurait fourni des comprimés de valium pour affaiblir la victime. Un autre aspect crucial du témoignage a été l’implication de Prizo Evouna, un Camerounais qui aurait vu, le 18 août 2010, Alofa, Polo et un certain Isidore à bord de la voiture de marque Audi 90 que Dangnivo utilisait au moment de sa disparition. « À ce jour, ce véhicule n’a toujours pas été retrouvé », a précisé le colonel, relevant un des mystères les plus persistants de cette affaire. Il a ajouté que Alofa avait été arrêté et placé en garde à vue suite à des déclarations relatives aux événements.

Rôle de Koumassegbo

Lors de son témoignage, Firmin Boko a également été interrogé sur le rôle du colonel Koumassegbo, un autre acteur clé de cette affaire. Il a indiqué que si Koumassegbo avait pris des mesures dans cette enquête, cela ne concernait pas la commission d’enquête qu’il avait supervisée. « Si Koumassegbo a pris des décisions ou agi dans cette affaire, cela n’engage pas la commission d’enquête », a-t-il affirmé.

Dans sa déclaration à la barre, Koumassegbo a affirmé que deux commissions d’enquête avaient été mises en place : une judiciaire et une administrative. En réponse aux questions concernant l’origine de la commission administrative, Boko a précisé qu’il n’était pas informé de l’existence d’une telle commission. « C’est la procureure Carina Dossou qui a, à travers deux notes de service, formé cette commission d’enquête judiciaire. Elle était composée de deux gendarmes et de deux policiers», a-t-il expliqué, précisant qu’il ignorait qui avait proposé les noms des membres de cette commission.

L’interrogatoire a pris une nouvelle tournure lorsqu’il a été demandé à Firmin Boko qui, selon lui, avait tué Pierre Urbain Dangnivo. Sans hésitation, le colonel a désigné Alofa comme étant le responsable du meurtre. Cette déclaration a jeté une nouvelle lumière sur l’accusation, bien que la défense ait contesté ces allégations. Le procureur de la République a également insisté sur le rôle de Donatien Amoussou dans cette affaire, cherchant à établir un lien direct entre lui et la victime. Firmin Boko a confirmé que c’était Alofa qui avait désigné Amoussou comme celui qui détenait les comprimés de valium et qui avait également mis à disposition le véhicule utilisé dans le cadre du crime. Cependant, Donatien Amoussou a fermement nié toute implication, allant jusqu’à contester la version des faits donnée par Firmin Boko. Il a précisé avoir été arrêté le 4 octobre 2010, et a mis en doute la véracité des déclarations de Firmin Boko, notamment en ce qui concerne la date de ses interrogatoires.

Confrontations

Les échanges ont été particulièrement tendus lorsque Me Olga Anassidé, avocate de la famille Dangnivo, a interrogé Firmin Boko sur la chronologie des événements et ses souvenirs concernant les dates clés. Le procureur a même remis en question la précision de la mémoire du témoin, en faisant référence à la « célèbre mémoire d’éléphant» de ce dernier. Firmin Boko a répondu avec calme, expliquant que, même s’il n’avait pas une mémoire exceptionnelle, il avait pris des notes détaillées sur ce dossier, car il savait que cette affaire marquerait sa carrière. Il a également insisté sur le fait que l’importance de l’enquête et les enjeux de l’affaire l’avaient poussé à garder une trace précise de chaque élément. De son côté, Codjo Cossi Alofa, de retour à la barre, a exprimé ses frustrations, se présentant comme une victime dans cette affaire. Il a insinué que ceux qui avaient lancé cette procédure étaient en réalité les seuls à connaître l’issue de l’affaire.

L’audience a été suspendue à 15 h 22 minutes et reportée au mardi 8 avril 2025 à 10 h. Le président Guillaume Laly a précisé que le ministère public aurait besoin de plus de temps pour examiner les informations recueillies et qu’il était possible que de nouveaux témoins soient entendus lors des prochaines audiences. 

Cauchemar de la famille Dangnivo 

Les membres de la famille de Pierre Urbain Dangnivo vivent un cauchemar depuis 15 ans du fait de ce dossier non encore élucidé par la justice. « Ce que la famille souhaite, c’est qu’enfin la vérité jaillisse pour qu’elle puisse entamer un autre processus : faire son deuil et avancer », souligne Me Olga Anassidé, avocate de la famille Dangnivo, interrogée ce mercredi 19 mars 2025.

Chaque audience est une épreuve des nerfs pour les représentants de la famille. Certains membres, malgré le poids de l’âge, continuent d’effectuer le déplacement du tribunal de première instance de Cotonou. Devant les membres de la famille, les médecins commis pour l’autopsie de la dépouille retrouvée à Womey et qui serait celle de leur parent, décrivent comment le corps a subi des écrasements faciaux, comment des organes ont été prélevés sur leur présumé parent, comment il a subi de graves lésions avant d’être déposé à 30 cm sous terre. De plus, des parties du squelette, comme le crâne, auraient disparu.

A l’écoute de tous ces détails dans la salle d’audience, certains parents de Pierre Urbain Dangnivo ne manquent pas de baisser la tête ou de sortir carrément. Les plus courageux y restent. Il n’est pas également rare de les voir couler des larmes ou chuchoter des mots à l’oreille d’un de leurs conseils à la fin de l’audience, pendant une suspension ou en pleine audience face à certaines déclarations des accusés ou encore des témoins. « Vous voulez savoir quel est l’état d’esprit de la famille pendant ce procès ? Depuis le 17 août 2010, la famille Dangnivo vit un cauchemar. C’est un traumatisme, c’est une vie de tristesse, c’est difficile tout simplement», lâche Me Olga Anassidé.

Ce procès n’a pas encore livré tous ses secrets. Les jours à venir seront peut-être décisifs avec l’entrée en scène de nouveaux témoins, la confrontation de témoins qui sont déjà passés à la barre, comme un face-à-face entre Sévérin Koumassegbo et Firmin Boko, l’analyse des éléments versés à la cour et les témoignages de la famille Dangnivo.