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Trésor royal: Le Kataklè inscrit au patrimoine culturel national

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Le Kataklè vient rejoindre, trois années plus tard, les 26 trésors royaux déjà restitués par la France, marquant ainsi un autre tournant symbolique  pour la souveraineté culturelle du Bénin Le Kataklè vient rejoindre, trois années plus tard, les 26 trésors royaux déjà restitués par la France, marquant ainsi un autre tournant symbolique pour la souveraineté culturelle du Bénin

Restitué au Bénin par une délégation finlandaise, mardi dernier, lors d’une cérémonie symbolique au palais de la Marina, le Kataklè est désormais inscrit au patrimoine culturel national. Il vient donc renforcer le patrimoine matériel du pays déjà riche de plusieurs objets et sites.

Par   Joël C. TOKPONOU, le 16 mai 2025 à 02h44 Durée 3 min.
#Le Kataklè royal

Le Kataklè, 27e trésor royal qui est retourné au pays 133 ans après le pillage orchestré par le général français Dodds à la fin de la colonisation, est désormais inscrit au patrimoine culturel national.

Le patrimoine culturel national du Bénin désigne l’ensemble des biens matériels et immatériels ayant une valeur historique, artistique, scientifique ou symbolique pour le peuple béninois. Il comprend notamment les sites archéologiques, les palais royaux, les objets rituels, les musiques, danses, langues, traditions orales et savoir-faire artisanaux.

En fait, le patrimoine culturel joue un rôle fondamental dans la préservation de l’identité culturelle, la transmission des valeurs ancestrales et la cohésion sociale. Il constitue également un levier de développement touristique, économique et éducatif, en valorisant l’histoire et la créativité du Bénin.

Ce patrimoine reflète l’âme des communautés béninoises et évolue avec le temps tout en gardant un lien fort avec les ancêtres. Le Bénin s’investit dans sa sauvegarde à travers des inventaires, des festivals culturels, des programmes éducatifs et des collaborations avec l’Unesco.

En termes de classification, on distingue le patrimoine matériel et le patrimoine immatériel. Le patrimoine matériel du Bénin regroupe l’ensemble des biens culturels tangibles ayant une valeur historique, artistique ou scientifique. Il comprend notamment les palais royaux d’Abomey, classés au patrimoine mondial de l’Unesco, les sites archéologiques de la vallée de l’Ouémé, les anciens comptoirs coloniaux, ainsi que les objets cultuels et artisanaux tels que les statues, masques, armes, trônes, etc. Ce patrimoine témoigne de la richesse des civilisations passées, comme celle du royaume du Dahomey, et constitue un héritage précieux pour la mémoire collective. Il est conservé dans les musées, protégé par des lois nationales et valorisé pour son potentiel éducatif, culturel et touristique. Sa préservation contribue à renforcer l’identité nationale et à transmettre aux générations futures les fondements culturels du Bénin.

Le patrimoine immatériel, quant à lui, englobe les pratiques, expressions, savoir-faire et traditions transmis de génération en génération. Il comprend les langues locales, les chants, danses, récits oraux, rituels religieux comme le culte vodun, les fêtes traditionnelles, ainsi que les connaissances liées à la médecine et à l’artisanat.

Assurance

L’inscription du Kataklè au patrimoine culturel national n’est pas fortuite. Elle lui offre une sécurité juridique. En effet, la protection du patrimoine culturel est définitivement une réalité au Bénin. Du moins, le cadre légal et règlementaire est désormais au complet avec la prise des décrets d’application de la loi n° 2021-09 du 22 octobre 2021 portant protection du patrimoine culturel en République du Bénin. Il s’agit du décret portant modalités de réalisation de l’inventaire, de classement et de prise en charge des dépenses de conservation et d’entretien des biens culturels, du décret portant création, organisation, gestion et contrôle des musées et du décret portant création et gestion de la plateforme numérique des biens culturels et des éléments du patrimoine culturel immatériel inventorié. Il y a également le décret portant attributions, composition et fonctionnement de la Commission nationale de protection du patrimoine culturel, celui portant attributions, composition et fonctionnement de l’Unité spéciale de protection des biens culturels, celui portant conditions et modalités de délivrance de la licence d’exportation des biens culturels, puis celui fixant la procédure d’autorisation des fouilles archéologiques. Ces sept textes règlementaires viennent favoriser une application complète et effective de la loi surtout avec le regain d’intérêt du gouvernement pour la valorisation culturelle. Cet état d’esprit se manifeste à travers plusieurs actions notamment le retour des biens culturels, l’organisation de l’exposition diptyque au palais de la Marina, les investissements du gouvernement, la construction de l’arène de la Gaani et du palais royal de Nikki, etc. Ces actes témoignent de la structuration, construction et consolidation par l’Etat d’un secteur qui doit contribuer à la création de la richesse, d’emplois et faire révéler le Bénin.

Restitution

Attendue depuis quelques mois par le monde culturel et tous les citoyens béninois, la restitution du Kataklè a été officiellement effective, mardi 13 mai dernier au palais de la Marina, en présence d’une délégation finlandaise conduite par le ministre des Sciences et de la Culture. Il s’agit d’un tabouret sculpté dans un seul morceau de bois qui représente un attribut royal utilisé comme trône portatif par le roi Béhanzin.

Avant le Kataklè, le Bénin avait réceptionné en novembre 2021, 26 trésors royaux venus de la France. Les biens culturels restitués étaient constitués entre autres de trônes et de statues anthropomorphes qui appartenaient aux rois d’Abomey. La plupart ont été pillés par les troupes françaises à la chute du roi Béhanzin, dernier souverain ayant lutté contre la pénétration coloniale, en 1892. Le musée du Quai Branly les présente d’ailleurs comme issus de la collection privée du général Alfred Dodds, le chef de l’expédition militaire française qui fit tomber Abomey.

La réception du Kataklè a été un précieux moment. « C’est envahi par une forte émotion, que j’ai admiré en fin de matinée du mardi 13 mai 2025 au palais de la Marina, le Kataklè du roi Béhanzin qui vient d’être restitué au Bénin par la République de Finlande. Ce siège royal, un des symboles de notre riche histoire et de notre fierté était logé au sein du musée national de Finlande depuis 1939 à la faveur d’un échange international de collections opéré avec la France », a publié Patrice Talon, président de la République sur ses canaux digitaux officiels. Fin connaisseur de l’histoire du pays, le chef de l’Etat a précisé dans sa publication le rôle et l’importance de ce trésor royal qui a rejoint son pays après 133 ans. « Symbole marquant du royaume de Danxomè, le Kataklè était utilisé uniquement lors de l’intronisation du roi. Bien plus qu’un simple retour d’objet, cette restitution marque la réaffirmation du droit de notre peuple à se réapproprier son histoire et à réinscrire dans son quotidien les témoins matériels de sa mémoire », a poursuivi Patrice Talon avant d’exprimer sa gratitude à la République de Finlande qui a su, d’une part, conserver ce précieux trésor et, d’autre part, œuvré avec le gouvernement à son retour sur sa terre d’origine.

« Il vient ainsi y rejoindre, trois années plus tard, les 26 trésors royaux déjà restitués par la France, marquant ainsi un autre tournant symbolique pour la souveraineté culturelle du Bénin, fer de lance des processus de restitution d’œuvres sur le continent. Merci à tous les acteurs qui ont rendu ce nouveau pas possible. Un pas de fierté et de dignité, qui n’est qu’un nouvel épisode du feuilleton qui nous conduira, j’en suis persuadé, à la restitution progressive de nombreuses autres œuvres de notre patrimoine, dispersées ici et là dans le monde », a conclu le président de la République.

Même appréciation pour la délégation finlandaise qui s’est réjouie de l’aboutissement du processus. « Le retour de cette œuvre est une reconnaissance de la valeur historique que cela revêt pour le Bénin », avait déclaré Mari-Leena Talvitie, ministre finlandaise des Sciences et de la Culture, lors de la remise du trésor royal à la partie béninoise. Avec pédagogie, elle avait rappelé l’histoire du Kataklè et les conditions de son arrivée en Finlande. « Nous reconnaissons la valeur culturelle et historique de cet événement pour le Bénin. Nous sommes reconnaissants de l’excellente coopération avec les autorités du Bénin dans la préparation de ces représentations importantes. Le Kataklè est venu au Musée national de la Finlande pour un échange de collections avec la France en 1939.

L’histoire du Kataklè a été inconnue pendant des décennies, jusqu’à ce que le Kataklè soit confirmé comme l’un des trésors pris du palais royal de Perpignan... Cette œuvre porte les relations entre nos deux pays à un autre niveau», avait détaillé la ministre finlandaise.