Dans la métropole de Cotonou, la majorité des véhicules en circulation a plus de dix ans. Les propriétaires justifient cette tendance par des considérations financières. Les nouvelles mesures fiscales sur l’importation de véhicule à l’état neuf devraient changer la tendance.Illustrations : Infographie et Flourish
Sur le tronçon Godomey-Sica Toyota, l'une des artères les plus fréquentées à Cotonou, les conducteurs roulent pour la plupart dans des carrosseries neuves. Certains en écoutant de la musique pour éviter de se tendre les nerfs dans les files incompressibles. Cependant, ces véhicules ne sont pas toujours aussi neufs qu'ils en ont l'air.
« Ce véhicule a été acheté l'année dernière à 3,1 millions francs Cfa. Il est sorti de l'usine en 2003 », confie Isidore Hounsougan, un conducteur. Un véhicule sorti de l'usine en 2003 a déjà deux décennies d'existence et n'est donc pas considéré comme étant neuf. Puisque les véhicules neufs sont ceux qui sont immatriculés depuis moins de douze mois et qui ont parcouru un maximum de 6 000 kilomètres.
Selon les statistiques publiées en octobre 2022 sur le portail de données du Bénin, entre 2013 et 2019, 192 216 véhicules ont été immatriculés. Cependant, les véhicules neufs, notamment ceux âgés de moins d'un an, ne représentent que 19 057 véhicules, soit 9,91 %. Le nombre de véhicules âgés d'un à dix ans est de 14 898, soit 7,75 %. Pendant cette période, ce sont les véhicules d'occasion de plus de dix ans qui ont été les plus nombreux, avec 158 261 unités, soit 82,33 %.
Les raisons
Direction Sékandji, à 15 km de Cotonou, pour comprendre les raisons. Dans cette zone réputée pour la vente de véhicules d’occasion, l’ambiance est relativement calme ces jours-ci. Sur l'un des parcs de la zone, plus de 600 véhicules d'âge illimité sont alignés les uns à côté des autres. « Les véhicules que vous voyez ici sont d’âge illimité. Il y a en a de moins de deux ans, de trois ans, tout comme il y en a de 15 ans, voire 20 ans. C’est une question de moyens et de goût. Les véhicules les moins âgés sont chers », dévoile Alain Gnimavo, administrateur et responsable financier de ce parc.
Dans ce parc, le coût des véhicules de moins de dix ans varie entre quatre et neuf millions en fonction de la marque. « C’est une question de moyens et de goût. Les véhicules les moins âgés sont chers, très chers. Il faut tenir compte du pouvoir d’achat. Nous vendons beaucoup plus les véhicules de plus de dix ans. Allez demander le prix d’un véhicule de 2012. Vous comprendrez que c’est cher», ajoute-t-il.
Gnimavo souligne également l'importance des coûts de dédouanement. « Vous pouvez acheter une voiture à 600 000 francs Cfa et la faire dédouaner à 900 000 francs Cfa. Dans le même temps, vous pouvez acheter une voiture à 2 millions de francs Cfa et la faire dédouaner pour le même montant. Il urge de revoir la taxation », indique-t-il.
Le neuf devrait gagner du terrain
Au Bénin, de nouveaux textes législatifs, une loi et un décret d'application, sont en cours d'élaboration pour prendre en compte l'âge des véhicules importés. « Dans ces deux textes, la question de l'âge d'importation des véhicules d'occasion a été abordée, ainsi que les limites d'âge en fonction de l'usage. J'espère qu'ils seront adoptés bientôt, afin de réglementer l'âge des véhicules sur le marché béninois », a déclaré Didier Yayi, directeur du transport terrestre.
Benjamin Tonouéwa, importateur de véhicules avec deux décennies d’expérience, évoque lui le faible pouvoir d’achat pour justifier le choix de véhicules âgés. Il pense même qu’il n’est pas pour le moment opportun de réduire davantage l’âge d’importation « Combien gagnent les Béninois comme salaire ? Si on limite, ce sera encore plus coûteux », martèle cet importateur.
Toutefois, les mesures fiscales mises en place ces dernières années encouragent les consommateurs à opter pour des véhicules neufs. Avec les réformes en cours, les véhicules d'occasion devraient céder leur place aux neufs. La loi de finances pour la gestion 2023 prévoit une réduction de 99 % sur la valeur en douane des voitures électriques neuves, de 95% pour les voitures hybrides neuves et de 90 % pour les autres voitures neuves, ainsi qu'une exonération de la Taxe sur la valeur ajoutée.
Ces avantages fiscaux et douaniers s'appliquent aux voitures de tourisme et autres véhicules automobiles conçus pour le transport des personnes, y compris les voitures de type « break » double cabine, importées, fabriquées ou vendues à l'état neuf au Bénin. Ainsi, en pratique, si une voiture neuve coûte 10 millions de francs Cfa, la douane sera calculée sur une base d'un million francs Cfa.
Les véhicules neufs à quatre roues importés, fabriqués ou vendus à l'état neuf au Bénin et destinés à la mise en place d'une flotte de taxis sont également exonérés de tous droits et taxes de douane et de la Tva. Les prochaines statistiques concernant l'âge des véhicules immatriculés au Bénin devraient refléter une tendance vers des véhicules presque neufs, surtout si les plus vieux sont retirés de la circulation ■