La Nation Bénin...

Les députés ont entamé, ce mardi 22 janvier, l’examen du projet de loi fixant le régime des armes, de leurs munitions et autres matériels connexes en République du Bénin. Ils ont adopté les deux premiers titres sur les six que compte le projet de loi en attendant de poursuivre demain les travaux qui pourraient déboucher sur le vote de l’ensemble du texte.
Introduit depuis 2007 au Parlement, le projet de loi fixant le régime des armes, de leurs munitions et autres matériels connexes en République du Bénin est enfin sorti des tiroirs. Il est en examen depuis ce mardi à l’hémicycle, mais après de profondes améliorations en lien avec le souci du gouvernement de conformer la législation nationale aux principes et valeurs réaffirmés dans plusieurs conventions et protocoles auxquels le Bénin est partie prenante dont le Traité sur le commerce des armes (Tca). Composé au départ de 85 articles, le projet de loi en examen comporte 119 articles répartis en six titres. Lesquels titres traitent notamment des principes, définitions et classification ; des armes perfectionnées et des armes non perfectionnées ; de la fabrication, du montage, de l’importation, de la détention, du port et du transport des armes et munitions. Le texte aborde également les dispositions communes relatives à l’importation, au transit, à la vente et à l’entreposage des armes et munitions sans oublier les pénalités.
Pour la commission parlementaire chargée de la Sécurité qui a présenté le dossier à la plénière, ce projet de loi est d’une importance capitale. L’utilité du texte n’est plus à démontrer dans un monde où le recours aux armes est le sport favori, tout autant que les droits à l’autodéfense et à la légitime défense qui sont en définitive établis dans le droit international. Un grand nombre d’acteurs accèdent de plus en plus facilement à des armes aux effets toujours plus meurtriers et dévastateurs, en raison notamment de l’ouverture des frontières, des excédents d’armes et du libre-échange avec comme corollaire une prolifération des armes légères et de petits calibres qui alimentent une certaine économie de la violence. Des violences aveuglées au cours desquelles des armes sont souvent pointées sur des civils, enfants, femmes et hommes vulnérables, ceux-là mêmes que le droit humanitaire est censé protéger. Ces violences sont enregistrées dans certains coins du monde. Aussi, ne fait-il l’ombre d’aucun doute que dans les sociétés d’aujourd’hui, le commerce illicite des armes existe et les armes y sont largement répandues. C’est ce qu’a compris le Bénin pour se mettre aux côtés de ses pairs du monde en général et de ceux de la région Cedeao en particulier, afin de mener une lutte sans merci contre ce fléau. Il importe alors que les gouvernants renforcent la réglementation en matière d’importation, d’exportation et de transit des armes et de mettre en place une coordination plus efficace des politiques nationales. C’est dans ce cadre que le Parlement béninois a ratifié le 15 mai 2009, la convention de la Cedeao sur les armes légères et de petit calibre, leurs munitions et autres matériels connexes.
Rosine Soglo, pessimiste
L’avènement du projet de loi en étude viendra renforcer le texte communautaire pour plus d’efficacité. Le projet de loi interdit sur toute l’étendue du territoire national, en son article 16, la détention, l’usage, le prêt, l’emprunt, la cession, l’échange à titre gratuit ou onéreux, le commerce des armes, des munitions et le matériel connexe par les civils. Toutefois, quelques cas de dérogations sont accordés. Le texte renseigne sur la procédure pour l’obtention du permis de port d’arme. Selon la loi, toute personne désireuse d’importer, d’acquérir, de détenir une arme perfectionnée pour son usage personnel ou de la céder, adresse au ministre en charge de la Sécurité publique, par l’intermédiaire de l’autorité administrative de son lieu de résidence, c’est-à-dire le maire, l’une des demandes d’autorisation telles que d’importation et de détention ; de rachat à une tierce personne ; de cession ; d’échange ; de détention à titre d’héritage ; de détention à titre de donation. L’autorité administrative fait faire une enquête de moralité sur le requérant et transmet au ministre en charge de la Sécurité publique, avec son avis motivé, le dossier complet accompagné du rapport d’enquête. Le ministre en charge de la Sécurité publique statue sur la demande d’autorisation dans un délai de six mois à partir de la date de réception de celle-ci.
A l’’article 21, il est prescrit que : « Nul ne peut ni importer ni détenir plus d’une arme perfectionnée de même famille ; être autorisé à détenir plus d’une arme de poing ni plus d’un fusil, être autorisé à détenir plus de deux armes à la fois de même famille. L’importation et la détention des armes perfectionnées, les munitions et autres matériels peuvent être autorisés à toute personne, à titre exceptionnel et individuel, par le ministre en charge de la Sécurité publique. La loi cible surtout les nationaux cadres de l’administration publique notamment magistrats, administrateurs civils et autres fonctionnaires méritants justifiant de dix années de service. Cette autorisation spéciale est élargie aux personnes appartenant au secteur privé particulièrement méritantes et réunissant un minimum de dix ans d’années de pratique professionnelle.
Les personnels des Forces armées, de sécurité et assimilés totalisant au moins dix années de service effectif peuvent être également autorisés à détenir une arme perfectionnée pour usage personnel. Le ministre en charge de la Sécurité publique fixe chaque année par arrêté le contingent d’armes perfectionnées dont l’importation peut être autorisée sur l’ensemble du territoire national, précise le texte. L’arrêté détermine également le quota par circonscription administrative.
Le permis de détention d’arme perfectionnée a une validité de cinq ans. A l’issue de ce délai, le permis est renouvelable. Le postulant présente l’arme et le permis à renouveler à la circonscription administrative du lieu de son domicile. Selon le texte, la détention d’une arme à feu est illégale si à l’issue du délai de validité du permis, son titulaire n’en sollicite pas le renouvellement dans les trente jours à compter de la date de péremption. Passé ce délai, le permis est caduc de plein droit et l’administration peut en ordonner le retrait ainsi que la saisie conservatoire de l’arme y afférente. Le permis frappé de caducité ne peut servir à approvisionner le propriétaire en munitions correspondant à son arme, martèle l’article 42 du projet de loi.
Le député Rosine Vieyra Soglo salue l’initiative de cette loi quand on sait que, selon elle, l’humanité croule sous les armes et les bombes de plus en plus sophistiquées. Elle trouve urgent que les pays conjuguent leurs efforts pour éradiquer le fléau lié à la prolifération des armes. Cependant, Rosine Vieyra Soglo se dit pessimiste par rapport à l’efficacité d’une telle action concertée face à un monde où les pays se livrent une concurrence acharnée en matière d’acquisition et/ou de fabrication d’armes.
Loin de tout pessimisme, le ministre délégué auprès du président de la République chargé de la Défense nationale, Fortunet Nouatin, félicite les députés d’avoir accéléré l’examen de ce projet de loi qui permettra au Bénin de disposer d’un dispositif légal pour contrôler l’usage et la circulation des armes sur toute l’étendue du territoire national.