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Entretien avec Chrysoula Zacharopoulou: « La relation entre la France et l’Afrique est passionnante, car forte »

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Par   Paul AMOUSSOU, le 30 mars 2023 à 07h54

La Secrétaire d’État française chargée du Développement, de la Francophonie et des Partenariats internationaux, Chrysoula Zacharopoulou, en visite ce jeudi 30 mars à Cotonou, s’est confié à nous sur les enjeux de ses attributions ministérielles en rapport avec l’Afrique. L’agenda de son séjour au Bénin n’est pas occulté au cours de la présente interview.La Nation : Madame la Secrétaire d‘Etat, le département chargé du Développement, de la Francophonie et des Partenariats internationaux est un nouveau portefeuille, et donc peu connu notamment en Afrique. Quels sont les enjeux majeurs auxquels sa création répond ?

Chrysoula Zacharopoulou: Vous le savez, la France est un pays très engagé à l’international, et particulièrement avec le continent africain. Que ce soit par nos partenariats de développement, nos investissements économiques, nos échanges culturels, ou tout simplement par nos liens humains, nous sommes pleinement investis aux côtés des pays partenaires. Ma mission, comme Secrétaire d’Etat, c’est de mettre en œuvre et de renforcer ces partenariats qui sont essentiels. Notamment sur le continent africain, un continent d’avenir, qui est notre voisin et avec qui nous avons des liens humains uniques. En termes de méthode, cela signifie que je me déplace beaucoup, que je dialogue énormément avec les dirigeants mais aussi toutes les forces vives des pays comme le Bénin, où je rencontrerai de nombreux jeunes, artistes, et acteurs de l’économie béninoise. Lors de ces échanges, je chercherai à percevoir les attentes en termes de partenariat avec la France, et ma mission sera ensuite de contribuer à y apporter des réponses concrètes, en mobilisant nos opérateurs, nos entreprises et notre société civile.

Selon toute évidence, vous avez la lourde charge de porter et de faire entendre la voix de la France sur les enjeux globaux. N’est-ce pas une tâche éprouvante aujourd‘hui, en Afrique où cette voix est plutôt chahutée ?

La relation entre la France et les pays africains est forte–c’est ce qui la rend passionnante. La France est très engagée sur les enjeux globaux – le climat bien sûr avec l’Accord de Paris, la biodiversité mais aussi la santé mondiale. L’Afrique est en première ligne sur ces enjeux majeurs pour notre planète et l’humanité. Et nous travaillons très étroitement avec tous les pays africains pour construire des réponses. Je pense notamment au partenariat pour une transition énergétique juste que nous avons élaboré avec l’Afrique du Sud, au partenariat que nous avons engagé sur la préservation des forêts tropicales à l’occasion du Sommet One Forest au Gabon, ou encore au partenariat Covax qui a permis de livrer des millions de doses de vaccins aux pays africains, mais aussi de financer des laboratoires de productions de vaccins, au Sénégal, au Rwanda et en Afrique du Sud, pour renforcer la souveraineté sanitaire des pays africains.

Les relations entre la France et l’Afrique appellent à un changement de posture, de perception et de discours. Êtes-vous d‘avis ? Et qu‘entendez-vous faire à cette fin ?

Les pays africains, notamment leur jeunesse, veulent des relations équilibrées et respectueuses de leur souveraineté. Nous partageons pleinement cette volonté. Le président de la République l’a réaffirmé dans son discours du 27 février. Le continent africain est un continent d’avenir et c’est une priorité de notre politique étrangère. La France est présente en Afrique, sans arrogance, mais sans complexe sur ses valeurs et ses intérêts. Nous reconnaissons que nous n’avons pas de solutions à tout, mais que nous pouvons apporter beaucoup, notamment en termes d’investissements et d’expertise, à nos partenaires africains qui le souhaitent, pour soutenir leurs priorités nationales. Et notre volonté, c’est que, au-delà des appuis que l’Etat peut apporter, tous les acteurs de la société française – les entreprises, les acteurs culturels, les scientifiques, et nos jeunes – nouent des relations de long terme avec l’Afrique.

La promotion de la Franco-phonie qui intègre vos attributions ne doit-elle pas être redynamisée pour répondre aux défis d‘un monde en pleine mutation, au-delà du multilatéralisme prôné ?

Dans un monde où certains prônent la division et la confrontation, la Francophonie est un trait d’union formidable entre les peuples et les continents ! Nous avons une langue et des valeurs en partage, sur lesquelles nous pouvons bâtir ensemble des réponses sur les grands enjeux globaux. Et l’avenir de la Francophonie, c’est avant tout la vibrante jeunesse du continent africain qui le porte. Lors du sommet de la Francophonie en France l’année prochaine, où nous accueillerons 88 représentants d’Etats membres, nous porterons l’ambition de renforcer encore plus nos coopérations francophones dans des domaines aussi variés que le numérique, l’éducation ou encore l’environnement.

Dans quel cadre s’inscrit votre séjour à Cotonou ?

Ma visite vient souligner et prolonger les relations excellentes entre nos deux pays, qui sont marquées par une très forte confiance et des liens humains inestimables. Lors de la visite du président de la République Emmanuel Macron en juillet dernier, nous avions pris des engagements forts, pour approfondir notre partenariat dans de très nombreux domaines: le développement économique, la culture, mais aussi la sécurité. Ma visite marque notre volonté de suivre et d’accélérer la mise en œuvre de ces engagements, et j’aurai l’occasion d’en parler avec l’ensemble des parties prenantes impliquées.

Quels sont la nature et l’état de la coopération de la France avec le Bénin sur les questions de développement, et relativement à la Francophonie ? Et à quelle évolution devrait-on s’attendre suite à votre séjour, dans ces domaines ?

La France est un des premiers partenaires du Bénin. Ce partenariat se déploie dans deux domaines en particulier: la coopération culturelle et la formation professionnelle. Notre partenariat culturel a un acte historique et fondateur: la restitution de 26 objets culturels issus des trésors royaux d’Abomey (novembre 2021) par la France, œuvres que le Bénin a remarquablement accueillies et valorisées. Depuis, nous approfondissons ce partenariat, avec de beaux projets communs auxquels le Bénin nous fait l’honneur de nous associer comme la construction du Quartier culturel et créatif de Cotonou, la réhabilitation des palais d’Abomey ou encore la formation aux métiers du patrimoine au Bénin. Nous savons aussi que la plus grande richesse du Bénin, comme de tout le continent africain, c’est sa jeunesse. Pour favoriser son accès aux opportunités et aux emplois, la France et le Bénin travaillent ensemble au développement de l’enseignement technique et professionnel, notamment à travers la construction de lycées techniques agricoles, la création d’écoles des métiers, ou encore en soutenant le pôle d’excellence de Sèmè City.