Hermann Djetta au sujet de la subvention des engrais : « Nous n’avons plus de raison de ne pas produire… »
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Par
Arnaud DOUMANHOUN, le 05 mai 2022
à
06h29
Pour prévenir l’effondrement de la production agricole et par ricochet l’insécurité alimentaire, le gouvernement a pris des mesures pour stabiliser les prix de cession des engrais à un niveau soutenable, en vue de favoriser une campagne agricole performante. Le président de la Chambre nationale d’agriculture du Bénin, Hermann Djetta, s’en réjouit et lance un appel aux acteurs agricoles.
LA NATION : Le gouvernement a pris des mesures pour soutenir la campagne agricole 2022-2023 notamment en décidant de la cession des engrais à des prix accessibles. Comment les acteurs ont-ils perçu la décision?
Hermann Djetta : On ne s’y attendait pas. Nous suivons et nous connaissons les prix des intrants. Nous avons été agréablement surpris par cette décision du gouvernement. Lorsque les intrants coûtent moins cher, cela entraîne un gain plus important pour le producteur. Puisque quand on produit avec des intrants à moindre coût, cela permet de vendre et de gagner plus. Les consommateurs s’en sortent aussi gagnants. Si le sac d’engrais coûte 14 000 F, vous pouvez vendre le sac de maïs à 15 000 F et gagner mieux que si vous vendez le sac de maïs à 20 000, pendant que vous achetez le sac d’engrais à 17 000 F. Cette décision du gouvernement ne profite pas qu’aux producteurs. Tout le monde y gagne. Les engrais sont l’un des facteurs de production les plus importants. Lorsque vous les achetez plus cher, le produit qui est issu de l’activité va également coûter cher. Mais il faut reconnaître que grâce aux efforts consentis par le gouvernement, les intrants ont toujours coûté moins cher chez nous que dans les pays voisins. Cette année, le gouvernement a encore fait davantage que tous les autres pays.
Des producteurs s’adonnent à la vente des intrants subventionnés par le gouvernement. Que faites-vous pour enrayer la pratique ?
C’est un phénomène qui a une influence négative sur les résultats que nous attendons à chaque fin de campagne. Lorsque nous obtenons des intrants moins chers, des gens viennent des pays voisins où ces intrants coûtent plus cher, parviennent à convaincre certains de nos producteurs et les achètent à bas prix afin de les revendre dans leurs pays. Lorsque vous recevez 10 sacs d’engrais pour une superficie donnée, et que vous en vendez 5 et n’utilisez que 5, cela pose un problème. Le rendement baisse, la production également. Et quand un produit devient rare sur le marché, il coûte plus cher. C’est l’une des raisons pour lesquelles certains produits sont chers.
Aujourd’hui, si nous ne menons pas une lutte sérieuse, la plupart de ces intrants vont se retrouver dans les pays voisins. La Police républicaine est à nos côtés et nous allons également déployer des efforts pour que ces intrants chèrement acquis par notre pays et mis à la disposition de nos producteurs à des prix accessibles ne sortent pas du territoire national. Quand nous surprenons un producteur ou un commerçant, dans la revente de ces intrants, il sera arrêté et mis en prison. Toutes les dispositions sont prises dans ce sens. Que ceux qui en ont l’habitude changent de pratique.
Quel espoir pour cette campagne qui s’annonce ?
Le prix auquel nous prenons les intrants nous permet de produire. Nous n’avons pas d’inquiétudes en ce qui concerne la production. Mais, même lorsque toutes les conditions sont réunies pour produire, il y a la prise en compte du paramètre dame nature dont le verdict importe beaucoup. Nous allons prier pour qu’en plus de ces intrants, la nature nous accompagne aussi. Si nous avons une bonne pluviométrie bien répartie, il n’y a pas de raison que le Bénin ne puisse pas produire convenablement cette année sinon mieux que les campagnes précédentes.
Quelles actions menez-vous en direction des producteurs au sujet des prévisions météorologiques ?
Il faut dire qu’avec les changements climatiques, même le calendrier cultural que les techniciens nous conseillent subit des modifications. Aujourd’hui par exemple, il pleut comme si nous sommes déjà en bonne période pour les semis. En réalité, si nous continuons à croire aux indications habituelles, on pourrait se tromper. Nous conseillons à nos producteurs de profiter des présentes pluies pour préparer le terrain, ceci, jusqu’à la fin de la première semaine du mois de mai.
Quel message avez-vous à l’endroit des producteurs ?
Je vais dire aux producteurs de considérer tout ce que nous avons reçu comme appui du gouvernement. Nous n’avons plus de raison de ne pas produire. Il faut encourager ce gouvernement qui a consenti tant d’efforts pour les facteurs de production. Nous demandons également au gouvernement de poursuivre ses actions au niveau des autres facteurs de production, notamment en ce qui concerne le marché d’écoulement. Lorsque nous produisons, il faut écouler les produits. Et pour ce faire, les voies d’accès sont aussi importantes pour le développement de notre agriculture.