La Nation Bénin...
Les deux experts conviés à la barre, ce mercredi 12 mars, deuxième jour du procès Dangnivo, ont confirmé, après des tests, que le patrimoine génétique du corps exhumé à Womey au domicile de Codjo Cossi Alofa est à « 99,99 % » conforme à ceux des parents ou alliés du défunt.
Dangnivo est-il vraiment mort ? Le premier expert à répondre à la question est le Français Guillaume Monique, médecin légiste intervenu par visioconférence. Il avait été commis par la famille Dangnivo pour une contre-expertise. Après des tests osseux en 2024, le spécialiste a établi un lien de parentalité de 99,99 % entre le corps exhumé au domicile de Codjo Cossi Alofa à Womey et les prélèvements effectués chez les parents et alliés du défunt Pierre Urbain Dangnivo.
Ses
travaux corroborent ceux du professeur Anatole Laleye, membre de l'équipe
d'experts dépêchée au domicile de Alofa à l'époque des faits. Le biologiste
confirme à la barre qu’il avait conclu, en 2018, que le corps exhumé est celui
de Dangnivo, après comparaison des tests biologiques du défunt avec ceux de
cinq de ses proches. Le spécialiste béninois affirme avoir mené des travaux sur
des parties molles des restes du défunt. La tension monte entre Anatole Laleye
et Me Olga Anassidé quand cette dernière cherche à comprendre pourquoi il a
travaillé sur des parties molles alors que d’autres parties des restes étaient
encore chez lui et que le crâne du défunt se trouve aussi dans son laboratoire.
Sa réponse à la question ne satisfait pas les avocats de la partie civile qui
insistent et reviennent à la charge avec d’autres questions. Au final, le
biologiste répond qu’il ne sait pas si le crâne fait partie des pièces à conviction,
vu qu’il n’a pas le droit de toucher aux scellés pour découvrir ce qui est à
l’intérieur.
Le troisième expert de la journée, Dr Clément Kpadonou, médecin légiste, est celui qui a constaté les faits à l’époque. Il a rappelé le processus allant de sa saisine par le procureur pour exhumer le corps au dépôt de son rapport, passant par l’autopsie proprement dite. Son travail avait décelé, entre autres, des lésions faciales contondantes (écrasement facial) chez la victime et le niveau de décomposition du cadavre qui ne permet pas d'identifier le sexe de la victime. Les débats entre l’expert et la partie civile ont achoppé, entre autres, sur la taille réelle du cadavre retrouvé chez Alofa et la date réelle du scellé suite aux premiers constats. Me Olga Anassidé conteste, en effet, que Pierre Urbain Dangnivo ne mesurait pas 1,67 mètres comme l’a mentionné le rapport du légiste. L’expert répond qu’il s’agit d’une mesure approximative étant donné que le cadavre était déjà en état de putréfaction avancée. Aussi, affirme-t-il, qu’il ne lui avait pas été demandé de faire une autopsie anatomopathologique du corps. Sur la question des scellés, il dit ne pas être la personne responsable des scellés. A cet égard, le ministère public a promis de faire tout ce qui est de son pouvoir afin que le tribunal puisse écouter la personne responsable des scellés.
Contradictions
Enormément
cité dans le dossier, le contrôleur général de police Enock Laourou a été
auditionné lors du deuxième jour du procès Dangnivo, en qualité de témoin. En
2010, il était à la tête des services de renseignement au niveau du Port de
Cotonou, mais en 2015, au moment où Alofa s’était évadé de prison, il était le
directeur général du renseignement béninois.
«
Comment avez-vous appris l'affaire Dangnivo », lui demande le juge. « Comme
tout le monde, j’ai appris par voie de presse qu'il y a eu disparition »,
répond le contrôleur général dans sa narration des faits, qui soutient que
Alofa s’est évadé. Mais l’intéressé infirme: « Comment je vais m'évader alors
que j'étais menotté ». A la demande du tribunal de savoir si Enock Laourou
faisait partie de ces personnes qui lui auraient rendu visite et entretenu
quand il était en prison, Alofa répond « non ».
Dans
la suite du procès, le juge demande à savoir comment le fugitif Alofa avait été
retrouvé en son temps, suite à l’évasion. Enock Laourou dit avoir tracé le
numéro de téléphone qu’il utilisait en prison. « C’est faux ! Personne
n’utilise de téléphone portable en prison », réplique Alofa. Toutefois, ce
dernier reconnait avoir appelé des contacts béninois depuis le Togo. Il dit
avoir acheté une carte Sim à Hilacondji à 12 000 F Cfa quand il y avait été
déposé par des hommes encagoulés. Selon les explications du contrôleur général,
Alofa a été localisé le lendemain de son évasion. « J’ai informé mon homologue
du Togo… Il s’est déplacé après et il a par la suite changé de numéro»,
explique Enock Laourou, ajoutant que Alofa a été extradé deux jours après son
arrestation au Togo. « C’est faux ! Le 15 mars 2015, je me suis moi-même rendu
à la police togolaise et je leur ai demandé de me remettre à la justice
béninoise et non à la police béninoise », répond le principal accusé. « Après
mon extradition vers le Bénin, on m'a affecté 58 gardes du corps en prison. Je
ne pouvais rien faire sans que l'un d'entre eux ne soit présent», confie le
principal accusé. Son conseil, Me Théodore Zinflou, ajoute que deux sergents
lui avaient été également assignés quand il a été commis d’office. Mais qu’il
s’en était plaint avant que les deux ne soient rappelés.
En ce qui le concerne, le co-accusé dit reconnaître Enock Laourou. A en croire Donatien Amoussou, des gendarmes du Gign l’avaient sorti de sa cellule à Missérété pour le conduire chez Enock Laourou. « Il m'a dit d'accepter que je suis le complice d'Alofa et que je sais comment Dangnivo est mort », charge Donatien Amoussou. La promesse était qu'il sortirait de prison le plus vite possible, une fois le crime avoué. Le prévenu dit avoir fait 62 jours d’isolement en guise de punition suite à son refus. « Tout ce qu’il dit est faux ! », rétorque Enock Laourou.
L’audience s’est poursuivie avec l’audition de Bernard Lani Davo cité dans le dossier. La suite du procès est à découvrir dans nos prochaines publications.