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Liberté de presse : le numérique, une opportunité ou un étau ?

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Par   Anselme Pascal AGUEHOUNDE, le 09 mai 2022 à 09h30
L’édition 2022 de la Journée mondiale de la liberté de la presse est placée sous le thème : « Le journalisme sous l’emprise du numérique ». C’est l’occasion d’évaluer l’impact de la révolution numérique sur la liberté d’expression, la sécurité des journalistes et l’exercice du métier. Partout au monde, le numérique a contraint les médias et les journalistes à s’adapter mais aussi à subir. Vu comme une menace, le numérique a contraint les médias traditionnels à s’adapter. Le numérique est même devenu un outil déterminant, un levier, une opportunité. Au Bénin, les médias classiques ont pour la plupart investi les plateformes digitales et les réseaux sociaux pour marquer leur présence et conquérir de nouveaux clients. Par conséquent, les offres et les contenus ont été adaptés pour mieux répondre aux exigences des nouveaux clients. Qui aurait envisagé à l’avènement du numérique, que la presse et plus spécifiquement les organes de presse écrite, engageraient des community managers pour booster leur vente et leur présence en ligne ! Et pourtant, la pratique se généralise. C’est une belle réponse de la presse à l’offensive du numérique qui s’est muée ainsi en opportunité. Mais au-delà de l’adaptation à l’outil, il y a aussi l’adaptation au cadre réglementaire et législatif d’une part et l’instrumentalisation du numérique par les gouvernants et organisations à des fins de surveillance et d’acharnement d’autre part. Pendant que la communauté internationale célèbre la Journée mondiale de la liberté de la presse, l’Unesco donne à réfléchir sur le thème : « Le journalisme sous l’emprise du numérique ». C’est l’occasion de mettre en lumière les versants de la révolution numérique sur la liberté d’expression, la sécurité des journalistes, l’accès à l’information, la vie privée. Les technologies de surveillance ont très vite été récupérées par les pouvoirs publics qui, à tort ou à raison, peuvent tracer des journalistes jusque dans leur vie privée, leur faire répondre de l’exercice de leur liberté d’expression, bien souvent pour des questions d’intérêt politique ou économique. Or la liberté de presse, selon Reporters sans frontières, est : « la possibilité effective pour les journalistes, en tant qu’individus et en tant que collectifs, de sélectionner, produire et diffuser des informations dans l’intérêt général, indépendamment des interférences politiques, économiques, légales et sociales, et sans menace pour leur sécurité physique et mentale». Dans la même veine, le cadre législatif portant sur le numérique est dans de nombreux pays un piège à journalistes et opposants. Présentant en mai 2019 les conclusions du rapport sur la surveillance et les droits de l’homme, la Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression de l’Unesco fait noter que « la surveillance des individus - souvent des journalistes, des militants, des figures de l’opposition, des critiques et d’autres personnes exerçant leur droit à la liberté d’expression- s’est avérée conduire à des détentions arbitraires, parfois à la torture et éventuellement à des exécutions extrajudiciaires». Une table ronde s’y consacre Des réflexions se font sur la question de l’emprise du numérique sur le journalisme. C’est à l’occasion de la conférence mondiale annuelle de la liberté de la presse qui s’est tenue du 2 au 5 mai dans un format hybride à Punta Del Este, en Uruguay. Organisée chaque année depuis 1993 sous la houlette de l’Unesco, la Conférence mondiale de la liberté de la presse offre aux journalistes, aux représentants de la société civile, aux autorités nationales, aux universitaires et au grand public l'occasion de discuter des nouveaux défis qui se posent à la liberté de la presse et à la sécurité des journalistes et de travailler ensemble à l'identification de solutions. Pour rappel, la Journée mondiale de la liberté de la presse permet de célébrer les principes fondamentaux de la liberté de la presse, d'évaluer la liberté de la presse à travers le monde, de défendre l'indépendance des médias et de rendre hommage aux journalistes qui ont perdu leur vie dans l'exercice de leur profession. La date du 3 mai a été proclamée Journée mondiale de la liberté de la presse par l'Assemblée générale des Nations Unies en 1993, suivant la recommandation adoptée lors de la vingt-sixième session de la Conférence de l’Unesco en 1991. Ce fut également une réponse à l'appel de journalistes africains qui, en 1991, ont proclamé la Déclaration de Windhoek sur le pluralisme et l'indépendance des médias.