La Nation Bénin...
Plus
que quatre mois nous séparent de 2025, année pré-électorale, au cours de
laquelle, les présidentiables devront clairement se manifester, selon les
dispositions de la loi 2024-13 du 15 mars 2024 modifiant et complétant celle
2019-43 du 15 novembre 2019 portant code électoral. Mais la succession à
Patrice Talon demeure un défi majeur, notamment pour le camp présidentiel.
Le
mystère reste entier autour de la succession de Patrice Talon, y compris dans
son propre camp. Chose curieuse quand on sait que les jours s’égrènent et
rapprochent de la fin du second et dernier mandat de l’homme qui aura insufflé
un vent de réforme dans tous les secteurs vitaux du pays. Même s’il a fait
savoir au cours d’un entretien avec les médias qu’il ne restera pas indifférent
à la course à sa succession, il est un secret de polichinelle qu’en dépit de
leur volonté de placer un dauphin, à la fin du mandat présidentiel, tous les chefs
d’Etat n’y parviennent pas. Contrairement à son prédécesseur, Talon s’inscrira
peut-être sur cette liste très convoitée des présidents qui tiennent ce pari.
Mais faudra-t-il encore que, dans son propre camp, l’ambition de conserver le
pouvoir rime avec stratégie, car dans l’arène politique, dans les systèmes
démocratiques comme le nôtre, rien n’est définitivement acquis. « Je ne serai
pas inactif parce que je suis un citoyen béninois, et je veux que mon pays
progresse. Je serai actif pour que la suite soit dans l’idéal que nous sommes
en train de bâtir ensemble. Mon souhait est que le Bénin progresse, que demain
soit meilleur à aujourd’hui », avait déclaré Patrice Talon. Qui mieux que ses
soutiens, répartis dans des partis politiques, peut revendiquer cet héritage
des bâtisseurs ? Qu’ils soient membres du Bloc républicain (Br), de l’Union
progressiste le renouveau (Upr), du Mouvement des élites engagées pour
l’émancipation du Bénin (Moele-Bénin) ou du parti Rassemblement national (Rn),
les amis à Talon devront prendre la mesure de l’enjeu, et dans une démarche
méthodique, digne des maîtres de la pensée politique, peaufiner les stratégies
pour maintenir la flamme au-delà des échéances de 2026, à la suite de leur
leader. Car, en face, l’opposition politique est menée par un sachant, un
maître de l’arène, l’ancien président Boni Yayi.
« Il a souhaité l’unité de la mouvance en 2026. Quand je parle d’unité, ce n’est pas une fusion, parce que le chef de l’Etat dit qu’il est satisfait de ce que nous avons comme mosaïque de la majorité présidentielle qui l’accompagne. Il souhaite qu’il y ait parmi ces partis politiques un pacte de non-agression parce que c’est ensemble que nous allons réussir », avait déclaré Jacques Ayadji, président du parti Moele-Bénin, au détour d’une audience accordée par le chef de l’Etat, à une délégation de sa formation politique. Il a indiqué que pour favoriser cette union et le pacte de non-agression sur le terrain, Patrice Talon a suggéré la mise en place d’un cadre de concertation. Un creuset qui peine à être formalisé, même si l’on fait le constat d’une certaine proximité dans l’occupation du terrain, par des partis de la mouvance, en l’occurrence le Bloc républicain et l’Union progressiste le renouveau, détenant tous deux, des élus tant au niveau communal et local qu’à l’Assemblée nationale. C’est dire que des défis restent à relever, pour sceller cette union, dans la diversité.
De
toute évidence, la loi 2024-13 du 15 mars 2024 modifiant et complétant la loi
2019-43 du 15 novembre 2019 portant code électoral fait de cette cohabitation
pacifique entre partis politiques partageant les mêmes visions, une clé de
gouvernance, instituant des accords susceptibles de faire décrocher des mandats
électifs. «Seules sont éligibles à l’attribution des sièges, les listes, ayant
recueilli au moins vingt pour cent (20 %) des suffrages valablement exprimés
dans chacune des circonscriptions électorales. Toutefois, pour les partis
politiques ayant conclu et déposé à la Commission électorale nationale autonome
préalablement à la tenue du scrutin un accord de coalition parlementaire, il
sera procédé, pour le calcul du seuil, prévu à l’alinéa précédent, à la somme
des suffrages de ceux ayant recueilli au moins dix pour cent (10 %) des suffrages
exprimés au plan national ». Telles sont les dispositions de l’article 146 du
code électoral en vigueur.
Matérialiser cette approche en ce qui concerne la présidentielle 2026 sera bénéfique pour les acteurs notamment de la mouvance sur qui pèse le poids de l’héritage de Patrice Talon. Il n’est pas aisé de succéder à un homme d’une telle rigueur, en matière de gouvernance, qui a réussi à changer les habitudes et impacter le Béninois lambda dans son vécu quotidien. Ainsi, bien au-delà des réalisations qui s’inscrivent dans la mise en œuvre du Programme d’action du gouvernement, il faudra réinventer l’approche politique. Un défi à la portée des concernés, si chacun y met du sien, et que les querelles de clocher pèsent moins.
Selon
le Professeur Gilles Gohy, les acteurs devraient jouer la carte de la bonne
foi, éviter toutes formes d’exclusion, de frustration tout en aiguisant leur
stratégie de communication. Il est d’ailleurs favorable à une probable fusion
entre certains partis politiques de la mouvance notamment le Bloc républicain
et l’Union progressiste le Renouveau.
«
Seule l’addition comme mode opératoire de bon aloi doit être privilégiée.
Ensemble, l’on est toujours plus forts et plus efficients», a-t-il déclaré,
convaincu que la mouvance présidentielle survivra après 2026. «Je ne vois pas
ce qui pourrait l’empêcher. Je n’ai aucun doute à cet effet. Cette mouvance
adoptera la dynamique de la continuité », soutient le politologue Gilles Gohy