La Nation Bénin...

Le président du Parti du renouveau démocratique (Prd), Me Adrien Houngbédji, multiplie des rencontres pour tenter de faire arrêter la vague de démissions en cascade qu’enregistre sa formation politique ces derniers jours, suite à la suspension du parti du processus de création du Bloc républicain. Mais jusqu’à quand maintiendra-t-il encore au Prd les autres ténors qui ont des griefs contre l’option du parti d’aller seul aux législatives de 2019 ?
Le navire Prd tangue. Il n’est pas exagéré de dire que le parti de Me Adrien Houngbédji est au creux de la vague depuis sa décision de suspendre sa participation aux travaux de création du Bloc républicain, le second grand regroupement politique soutenant les actions du chef de l’Etat, après le parti Union progressiste porté sur les fonts baptismaux samedi 1er décembre dernier, à Cotonou. Le président Adrien Houngbédji est bien conscient de la situation inédite que traverse son parti avec la démission de certains de ses hommes de main au profit du Bloc républicain. C’est le cas du ministre de l’Energie, Jean-Claude Houssou et vice-président du bureau politique du Prd, du député Edmond Zinsou et de l’homme d’affaires Mathurin de Chacus, par ailleurs président de la Fédération béninoise de football (Fbf) et principal bras financier du parti. C’est vrai, en dehors du parlementaire qui a annoncé publiquement sa démission, les deux autres barons ne se sont pas prononcés jusqu’ici. Mais ils n’ont plus infirmé la rumeur selon laquelle ils ont rompu les amarres avec les Tchoco-Tchoco pour faire dorénavant route avec le Bloc républicain, conformément à la décision prise par le congrès extraordinaire du Prd tenu, samedi 27 octobre dernier, à Avrankou.
Tout comme désormais ces ex-ténors du Prd, plusieurs autres grosses cylindrées du parti se prépareraient aussi à leur emboîter le pas, à en croire des indiscrétions. On avait annoncé le ministre de l’Industrie et du Commerce, Serge Ahissou et des maires Prd également claquer la porte. Le maire d’Adjarra, Michel Honga, lui était même parti avec le député Edmond Zinsou avant de revenir au bercail. Un tel tsunami à ébranler le parti du président de l’Assemblée nationale n’a pas laissé indifférent celui-ci. Me Adrien Houngbédji, se démenant tel un beau diable, a pris son bâton de pèlerin pour tenter d’arrêter la saignée. En homme politique pétri d’expériences, il a rapidement sollicité et obtenu une audience avec le président de la République, Patrice Talon et chef de file de la mouvance présidentielle. La rencontre a eu lieu jeudi 30 novembre dernier au palais de la présidence de la République.
10%, le gros défi
Occasion pour la délégation Prd de réitérer de vive voix au président Patrice Talon le soutien du parti aux actions du gouvernement et son retrait du processus de création du Bloc républicain et d’aller aux législatives 2019 sous la bannière du logo Arc-en-ciel. Vingt-quatre heures après cette audience avec le chef de l’Etat, le président Adrien Houngbédji reçoit à son domicile, à Porto-Novo, la section communale Prd d’Adjarra élargie aux élus communaux et locaux ainsi que d’autres militants à la base. Le maire démissionnaire, Michel Honga, était de la partie. Le président du Prd a expliqué de long en large, à ses hôtes, la position du parti face à certains tumultes notés ces derniers jours relatifs aux démissions de certains de ses cadres dont le député Edmond Zinsou, natif d’Adjarra. Me Adrien Houngbédji a fait le même exercice d’échanges, ce samedi 1er décembre, avec la section communale Prd d’Ifangni conduite par le maire André Zannou. Cette séance d’explication pourrait être poursuivie avec les autres sections communales Prd, notamment de Sèmè-Podji, d’Avrankou, de Porto-Novo, des Aguégués, d’Akpro-Missérété et autres.
Toutes ces rencontres du leader charismatique ne devraient viser qu’un seul objectif : arrêter la vague des démissions et recoller les morceaux pour permettre au parti de ratisser large aux élections législatives de 2019. En effet, cette vague de démissions n’est pas du tout de nature à rassurer la troupe et consolider la cohésion au sein du Prd. Il faut parer au plus pressé pour éviter que la barque ne chavire complètement et remettre les militants en ordre de bataille et en rang serré. L’enjeu des élections législatives de 2019 en vaut vraiment la chandelle. D’autant que ce scrutin est inédit depuis 1990. Il sera organisé à l’aune de la nouvelle loi n°2018-31 du 9 octobre 2018 portant Code électoral en République du Bénin.
Ce texte exige désormais aux listes en lice d’avoir d’abord un taux de 10% des suffrages valablement exprimés au plan national avant d’être éligibles pour la répartition des sièges au niveau de la circonscription électorale. Si l’on doit considérer les chiffres de la Lépi actualisée en 2017, en attendant ceux de janvier 2019 en cours d’actualisation, le Bénin compte 4 832 975 électeurs dont 590 828 dans l’Ouémé, le fief du Prd, 277 347 dans le Plateau et 401 886 dans le Littoral où le parti reste un peu présent. En partant de l’hypothèse que tous les électeurs participent au scrutin et ont valablement voté, les 10% au plan national font plus que 483 000 voix. Ce qui n’est pas du tout facile à avoir surtout pour un parti comme le Prd qui n’a pion sur rue surtout que dans l’Ouémé et un peu dans le Plateau, le Littoral et l’Atlantique. Face à cette réalité, Houngbédji et les siens doivent travailler dur pour renforcer les bases de leur parti dans le reste des départements du pays s’ils tiennent vraiment à enlever de sièges de député au soir des élections législatives de 2019 sous la bannière Prd. C’est vrai, ce taux de 10% n’est pas applicable dans tous les cas. Il l’est lorsqu’on est en face d’au moins quatre listes de candidature en compétition. Ce qui est plausible si l’on doit considérer tous les partis dont les deux Blocs de la Mouvance présidentielle, les Fcbe de l’ex-président de la République, Boni Yayi et l’Udbn de Claudine Prudencio qui annoncent leur intention de prendre part aux législatives de 2019 au même titre que le Prd. C’est dire que le scrutin sera âprement discuté sur le terrain. Toute déperdition de voix doit être évitée à tout prix surtout avec le nouveau mode de répartition des sièges sur la base des 10%. Toute démission de militant doit être perçue comme une grosse perte et un véritable manque à gagner pour le parti. Toutes choses qu’a certainement bien comprises le président du Prd qui rivalise, depuis quelques jours, de stratégies pour éviter d’autres départs et préserver son parti du pire. Me Adrien Houngbédji en homme avisé et politiquement hyper expérimenté doit veiller au grain pour ne pas regretter plus tard l’option prise par le parti de se retirer du Bloc républicain pour faire cavalier seul aux élections législatives de 2019.