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Basilique et Temple des pythons à Ouidah: Un symbole de cohabitation interreligieuse

Culture
Basilique de Ouidah Basilique de Ouidah

Le temple des Pythons et la basilique de Ouidah se font face dans une harmonie saisissante. Malgré cette proximité, les pratiquants des deux cultes vivent dans une parfaite entente. Un exemple inspirant de tolérance depuis plus d’un siècle.

 

Par   Joël C. TOKPONOU, le 21 janv. 2025 à 02h14 Durée 3 min.
#tolérance #cohabitation interreligieuse

Les Vodun days révèlent Ouidah non seulement comme une ville ancrée dans la tradition mais aussi et surtout un symbole de dialogue interreligieux et de tolérance. Cette réalité est historique et traverse le temps malgré les divergences des doctrines religieuses.

Dans la cité des Kpassè, le Temple des pythons, haut lieu de spiritualité Vodun consacré comme tel depuis le XVIIe siècle, est séparé de la basilique de l’Immaculée Conception par une voie large de 10 mètres à peine. Ce qui rend nécessaire la cohabitation entre les pratiquants des deux religions. Modeste Zinsou, gestionnaire du Temple des pythons attribue d’emblée l’instauration de ce climat de paix au Vodun qui, selon lui, en est l’incarnation. « Le Vodun, c’est la tolérance. Nous l’avons montré aux gens des religions du livre. Pour preuve, nous leur avons non seulement offert notre terrain auquel nous sommes pourtant très attachés, mais nous les avons aussi aidés à construire leur église à travers la main-d’œuvre », illustre-t-il, avant de clarifier l’importance du python dont il vante les vertus. « Le Temple de python est un sanctuaire, une sorte d’église dans laquelle vous allez pour prier et vous recueillir pour obtenir le bien-être et la réalisation de soi. Le python, c’est la divinité mère. C’est l’animal qui a sauvé le royaume « xwéda » à plusieurs reprises contre d’autres royaumes et qui protégeait également l’agriculture », souligne Modeste Zinsou, gestionnaire du temple. En cela, il reste ferme sur le fait que les prières à l’endroit du python sont presque toujours exaucées. « Le seul interdit, c’est qu’il ne faut pas souhaiter du mal à son prochain », nuance-t-il avec fermeté, traduisant ainsi la positivité de sa religion.

Conciliant

Que ce soit par rapport aux religions endogènes ou aux Vodun days, l’Eglise catholique n’est pas dans une logique de bras de fer ou de conflit interreligieux. « Je ne suis ni admirateur, ni contemplatif. Je suis juste comme un scientifique observateur de ce qui se passe. C’est connu de tous que quand on vient à Ouidah, on est tenté de visiter la basilique et on se laisse interpeler par un temple vodun campé juste en face de la basilique », déclare le père Fulbert Amoussou, prêtre catholique et directeur du centre catholique des soins par les plantes. Il ne prend d’ailleurs pas négativement cette proximité. « La moralité, c’est le vivre-ensemble. C’est la cohabitation pacifique, la tolérance », soutient-il avant de souligner aussi la nécessité de la culture de la paix et de l’acceptation de l’autre. « J’entends souvent les adeptes de Vodun dire que ce sont eux qui ont donné la place aux missionnaires chrétiens. Ils ont absolument raison. Nous n’allons pas nous camper en adversité. Nous avons à nous accepter mutuellement et vivre ensemble ce qui nous rassemble », exhorte le prêtre, tout en reconnaissant qu’il n’y a qu’un seul Dieu, même s’il y a divers chemins que les hommes empruntent. « Pour moi prêtre catholique, c’est Jésus-Christ, le visage de Dieu », professe le père Fulbert Amoussou. « Il n’en demeure pas moins que la religion traditionnelle est notre culture », ajoute-t-il.

Tous pour la tolérance

Le Temple des pythons est l’un des sites touristiques les plus célèbres de Ouidah. Dans ce temple, des serpents sont vénérés et prennent une place centrale dans les rites et cérémonies. La tradition veut que les visiteurs soient reçus avec respect, dans le cadre de rituels qui honorent les ancêtres et les forces spirituelles. Le temple est également un lieu de pèlerinage pour les adeptes du Vodun, mais aussi pour les touristes en quête de découverte de la culture béninoise. Depuis le début des Vodun days, l’affluence y est très forte. La plupart des visiteurs font aussi un tour dans l’enceinte de la basilique construite en 1909.

« Nous sommes épatés par cette cohabitation qui constitue une richesse pour le Bénin. Nous ne regrettons pas d’avoir fait ce déplacement pour les Vodun days », se réjouit Jude Firmin, touriste français, qui n’a pu résister à l’envie de visiter, avec sa délégation d’une dizaine de membres, les deux temples. Bright, citoyen américain en déplacement à Ouidah, a le même sentiment. « C’est une valeur qu’il faut cultiver et répandre comme modèle à travers le monde entier. Ce qui se fait ici est vraiment admirable », laisse-t-il entendre, avec joie.

A Ouidah, la basilique et le Temple des pythons ne sont pas les seules infrastructures religieuses qui cohabitent. La mosquée centrale de la ville est mitoyenne à « Adomin », important lieu où se fait la consécration des principaux chefs et notables des religions endogènes. Aussi, le temple de l’Eglise protestante méthodiste est-il à quelques encablures du haut lieu spirituel des adeptes du culte « Hêbiosso ».