La Nation Bénin...
Du
10 au 12 octobre 2024, le Bénin a accueilli la 3e édition du Festival
international du Livre et des Arts assimilés (Filab) à Cotonou. Un rendez-vous
majeur pour la promotion de la littérature et le brassage des cultures
africaines.
L’objectif
principal du Festival international du Livre et des Arts assimilés (Filab) est
de promouvoir les cultures africaines et de renforcer le rôle de la littérature
dans l’identité collective du continent. C’est aussi une occasion unique pour
la jeunesse de découvrir les trésors culturels et littéraires du continent à
travers les œuvres et la prise de parole des autres pays participants.
L’une
des premières interventions a été menée par la sœur Nfono Menie Rose Marie,
écrivaine gabonaise qui a apprécié la présence d’un public scolaire, soulignant
que «ce sont les jeunes qui feront vivre la littérature africaine demain ».
Cette édition a vu la participation active d’élèves, notamment dans les
échanges sur l’importance du livre en milieu scolaire.
Marie
Berthy Mawem, coordonnatrice du Pôle des Arts littéraires du Cameroun et
promotrice du festival Festifou, a pour sa part, présenté une analyse de la
place du livre dans la société camerounaise et les efforts à fournir pour
améliorer l’accès aux ouvrages dans les écoles. « Nous devons pousser à la
création de bibliothèques dans chaque établissement scolaire», affirme-t-elle.
Selon elle, cela permettra de stimuler la curiosité des élèves et de les amener
à apprécier la richesse de la littérature africaine.
Marie
Berthy Mawem propose une solution concrète avec l’initiative. ''Un
établissement, une bibliothèque'', qu’elle porte au Cameroun à travers Festifou.
Elle plaide pour l’agrandissement du Filab et appelle à une plus grande
coopération avec des institutions internationales comme l’Institut Français et
l’Institut Goethe, pour favoriser des échanges littéraires et encourager la
modernisation du livre en Afrique.
L’écrivaine
gabonaise, sœur Nfono Menie Rose Marie, conférencière lors du festival, a mené
une réflexion sur la compatibilité entre la culture, la religion et la
tradition. « Parler de l’homme, c’est parler de son identité », déclare-t-elle.
Elle ajoute que si les religions importées ont parfois cherché à se démarquer
des traditions africaines, il est temps de repenser cette interaction.
« À l’époque de la négritude, la question de l’identité a été centrale. Aujourd’hui encore, nous devons poser la question : qui suis-je? », poursuit la religieuse. Sa présentation a également abordé l’importance de la littérature gabonaise dans la transmission de l’identité culturelle. Cependant, elle déplore le manque de traductions de qualité des œuvres en langues africaines, ce qui limite l’expression des réalités locales.
L’intervention de Idrissa Sow Gorkodjo, écrivain sénégalais et administrateur des éditions Amnestophales, a permis de souligner l’importance d’écrire dans les langues nationales. «Le livre est un vecteur puissant pour favoriser les industries créatives et la reconquête de notre identité culturelle », explique-t-il. Il cite l’exemple du projet Biblio Vélo, qu’il a mis en place au Sénégal pour favoriser l’accès des enfants aux livres. Des mallettes pédagogiques, contenant des ouvrages en langues locales, sont transportées dans les villages via des vélos. Ce projet a été soutenu par l’Institut français à Paris et a permis non seulement de rapprocher la lecture des jeunes, mais aussi de créer de l’emploi pour les artisans locaux. Idrissa Sow plaide pour une plus grande intégration des langues africaines dans les systèmes éducatifs, évoquant les efforts du Sénégal où six langues nationales seront introduites dans le cursus scolaire à partir d’octobre 2024. «Nous avons prouvé que l’enfant peut lire s’il a accès à des livres dans sa langue maternelle », souligne-t-il.
Lors de sa conférence, Marina Ondo, enseignante à l’École normale supérieure du Gabon, a abordé les défis linguistiques dans la littérature africaine. « Nos langues regorgent de concepts intraduisibles en français », note-t-elle. Cela rend parfois difficile l’expression authentique des réalités africaines à travers la langue héritée de la colonisation. Ondo propose comme solution de « tordre la syntaxe française» pour essayer d’adapter cette langue aux canons culturels africains. Elle estime cependant que le chemin reste long pour atteindre un équilibre entre l’usage du français et la préservation des langues nationales, appelant à davantage d’efforts pour favoriser l’écriture dans les langues locales.
Rosny
Lee Sage Souaga, écrivain et promoteur culturel gabonais, est le président du
Festival international du Livre gabonais et des Arts (Filiga), qui se tient
chaque année à Libreville. Il a annoncé que l’édition 2025 se déroulera du 29
au 30 mai, avec pour thème central «L’intelligence culturelle à l’ère des
transformations digitales ». Le Filiga réunit chaque année plus de 20 pays et
une trentaine d’invités internationaux, accueillant auteurs, éditeurs et
promoteurs culturels venus d’Afrique et d’ailleurs. Rosny Lee Sage Souaga a
également souligné l’importance des relations culturelles entre le Gabon et le
Bénin, invitant à renforcer ces liens à travers la littérature.
Michel
Mendi, auteur et éditeur sénégalais, a salué l’initiative du Festival
international du Livre et des Arts assimilés du Bénin (Filab), tout en
soulignant la nécessité d’améliorer certains aspects de l’organisation. Il a
notamment mentionné l’importance de fluidifier la logistique et d’accroître la
participation du public à travers une communication proactive. Il a également
mis en lumière les thématiques abordées, telles que la circulation du livre et
l’apprentissage des langues nationales, qui, selon lui, permettent aux acteurs
du livre de repartir avec des solutions concrètes pour améliorer leur travail.
Au-delà
des conférences, le Filab a aussi permis de renforcer les liens entre les pays
africains participants. Marie Berthy Mawim souligne la diversité culturelle du
festival, marquée par des échanges enrichissants autour de la cuisine locale,
des pratiques artistiques et des approches littéraires variées. «Chaque
écrivain a sa particularité, mais tous contribuent à un même objectif : faire
avancer la littérature africaine », conclut-elle.
Les
participants ont salué l’initiative du Bénin d’organiser cet événement et ont
exprimé leur souhait de voir le Filab se développer davantage pour devenir une
référence incontournable dans la sphère littéraire africaine. Komi Ezin
s’engage à poursuivre les efforts pour pérenniser cette plateforme d’expression
et de promotion des œuvres africaines. Ainsi, entre valorisation de l’identité,
encouragement à la lecture chez les jeunes, et exploration des intersections
entre culture et tradition, le Filab 2024 a été un véritable succès. Un
rendez-vous qui place le livre au centre du développement économique et social
en Afrique, en rappelant qu’il est non seulement un objet de connaissance, mais
aussi un moteur de changement■