La Nation Bénin...
Face aux inégalités d’accès aux services financiers, les
pays d’Afrique subsaharienne multiplient les réformes. Le Bénin se démarque par
sa dynamique numérique, notamment dans l’usage de l’argent mobile.
Les progrès remarquables enregistrés par l’Afrique
subsaharienne, ces dernières années, en matière d’inclusion financière,
occultent des disparités. Le rapport 2025 de la Banque mondiale sur
l’évaluation des politiques et des institutions en Afrique souligne que l’accès
au crédit reste une contrainte majeure pour les ménages et les petites
entreprises, notamment en milieu rural. Dans plusieurs pays comme le Nigeria ou
la Sierra Leone, les prêts au secteur privé restent largement en deçà des
besoins, freinant le développement du tissu économique. En Zambie, par exemple,
l’accès aux services financiers en milieu urbain est de 83,8 %, contre
seulement 56,9 % en zone rurale. De plus, les inégalités de genre perdurent. Au
Nigeria, l’écart entre les hommes et les femmes atteint 11 points de
pourcentage. Pourtant, certains pays parviennent à inverser la tendance,
notamment grâce aux technologies numériques.
Le rapport de la Banque mondiale met en lumière le Bénin avec un taux d’utilisation de l’argent mobile de 83 %. Le pays occupe la première place dans l’espace Uemoa, devant le Burkina Faso qui détient 89 % de taux d’adoption mais un peu moins de pénétration selon les indicateurs croisés. Cette position avait d’ailleurs été notifiée récemment par le rapport pays de la Banque africaine de développement. Ce développement s’explique par plusieurs facteurs dont l’expansion rapide des points d’accès à l’argent mobile, la simplification des services bancaires de base via le numérique, et l’appui actif des autorités à l’innovation financière. Des investissements publics et privés dans les infrastructures de paiement ont permis de rapprocher les services financiers des populations rurales et vulnérables. Le Bénin a engagé depuis 2020 plusieurs réformes clés. Parmi elles, la création d’un système public de garantie de crédit vise à réduire les risques pour les institutions de microfinance et faciliter l’octroi de crédits aux très petites entreprises (Tpe) et aux start-up. Le pays a également renforcé les infrastructures de crédit, notamment avec la mise en place de registres de garanties, une innovation qui permet de sécuriser davantage les transactions.
Sous tension
Ces mesures s’inscrivent dans une dynamique régionale. Plusieurs pays, comme le Mozambique, la Guinée ou encore l’Ouganda, ont mis à jour leurs stratégies nationales d’inclusion financière, en misant sur des réformes juridiques et une meilleure réglementation. Le Bénin fait partie de ceux qui traduisent leurs engagements en actes concrets. Si les banques béninoises affichent une solidité globale, les défis restent importants. Le rapport indique que dans toute la région, les banques conservent une part importante de leurs actifs sous forme de liquidités ou de titres d’État, limitant leur capacité à accorder des crédits à long terme. L’accès au financement de long terme pour les petites et moyennes entreprises (Pme) reste ainsi une priorité. Par ailleurs, les taux d’intérêt, bien qu’en baisse en 2024 dans plusieurs pays, demeurent élevés pour la majorité des emprunteurs. Les écarts de taux entre les dépôts et les crédits sont également un indicateur d’un marché encore peu concurrentiel, malgré les innovations du secteur numérique.
Le rapport note que l’utilisation de l’argent mobile
reste aujourd’hui concentrée sur des services de base : transferts de fonds,
achats de crédit téléphonique, ou paiements de factures. Pour que l’inclusion
financière devienne un véritable levier de développement, le rapport recommande
que le Bénin et ses partenaires favorisent la diversification des services
numériques: micro-assurance, épargne programmée, microcrédit digitalisé, etc.
Le renforcement de la culture financière, notamment chez les jeunes, les femmes
et les populations rurales, demeure un défi crucial. En 2024, la rentabilité du
secteur bancaire a continué de progresser dans plusieurs pays de la région, y
compris au Bénin, grâce à l’essor des revenus hors intérêts. Néanmoins, la
fragilité du tissu économique, les risques sécuritaires dans certaines zones,
et la dépendance des banques aux titres souverains restent des préoccupations.
Le Bénin s’illustre ainsi comme un exemple à suivre dans l’Uemoa. Sa stratégie
volontariste, appuyée par les innovations numériques et les réformes
structurelles, montre qu’un accès équitable aux services financiers est
possible, à condition de garder le cap.
Le crédit au secteur privé est en hausse par rapport à 2024 dans la majorité des pays