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Industrialisation et intégration économique en Afrique: Appel à une transformation radicale

Economie
Claver Gatete, secrétaire général adjoint de l’Onu et Secrétaire exécutif de la Cea Claver Gatete, secrétaire général adjoint de l’Onu et Secrétaire exécutif de la Cea

Lors du huitième Forum des entreprises africaines, ouvert le 17 février dernier à Addis-Abeba en Ethiopie, Claver Gatete, secrétaire général adjoint de l’Onu et secrétaire exécutif de la Cea, a plaidé pour une Afrique autosuffisante, industrialisée et intégrée. 

Par   Babylas ATINKPAHOUN, le 24 févr. 2025 à 09h06 Durée 3 min.
#Forum des entreprises africaines

L’Afrique est-elle condamnée à exporter ses matières premières et importer des produits finis ? Doit-elle rester un simple réservoir de ressources naturelles alors que d’autres continents prospèrent en exploitant ses richesses ?

Claver Gatete, secrétaire général adjoint de l’Organisation des Nations unies et secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique (Cea), a répondu par un "non" catégorique lors du huitième Forum des entreprises africaines, tenu le 17 février dernier à Addis-Abeba. Dans son discours inaugural, il a insisté sur la nécessité pour le continent de passer du potentiel inexploité à la prospérité, en mettant en place des chaînes de valeur régionales solides dans des secteurs clés tels que l’agriculture, l’élevage et l’industrie pharmaceutique. Pour Claver Gatete, l’industrialisation de l’Afrique repose sur la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf). Avec un marché unique de 1,5 milliard de personnes et un Pib combiné de plus de 3 000 milliards de dollars, cette initiative constitue une opportunité inédite pour transformer la structure économique du continent. « L’histoire de l’Afrique a toujours été paradoxale : un continent doté d’immenses ressources naturelles et humaines, mais limité par la fragmentation économique et le sous-développement », s’offusque-t-il.

L’enjeu, selon lui, est de créer des chaînes de valeur compétitives à l’échelle régionale. Il cite l’exemple du secteur agricole, qui emploie 65 % de la population active, mais dont la production reste insuffisante pour assurer l’autosuffisance alimentaire.

De même, le secteur de l’élevage, évalué à plus de 65 milliards de dollars, demeure sous-exploité. Quant au marché pharmaceutique africain, estimé à 70 milliards de dollars d’ici 2030, il repose encore largement sur l’importation. « Le temps est venu de réécrire le récit de l’Afrique en la propulsant d’un continent au potentiel inexploité à une puissance mondiale de production, d’innovation et d’autosuffisance économique, car les moyens pour y parvenir existent », a-t-il lancé. Cependant, il prévient qu’un plan ne suffit pas à lui seul. Il faut concrétiser cette vision avec tous les moyens de bord dont la Zlecaf qui servira de moteur à des chaînes de valeur régionales compétitives.

L’avenir

Malgré ses potentialités, l'Afrique reste dépendante des marchés extérieurs pour ses produits transformés. Pour inverser cette tendance, Claver Gatete propose quatre axes majeurs.

Il invite à développer des centres régionaux d'agro-industrie et des zones économiques spéciales afin de transformer localement les matières premières.

Il recommande également d'harmoniser les cadres réglementaires pour faciliter le commerce intra-africain des produits pharmaceutiques et de la bioproduction.

Par ailleurs, le secrétaire général adjoint de l’Onu insiste sur la nécessité d'investir dans les infrastructures et les mécanismes de financement afin de réduire les coûts des échanges transfrontaliers.

Enfin, il appelle à renforcer les partenariats public-privé pour accélérer la numérisation et positionner l'Afrique comme un acteur majeur de la quatrième révolution industrielle.

Selon le responsable onusien, la pandémie de Covid-19 a révélé la vulnérabilité de l’Afrique face aux chaînes d’approvisionnement mondiales. « Le temps des changements à petits pas est révolu. L’Afrique doit s’industrialiser de toute urgence », a-t-il martelé. Avec une population composée à plus de 60 % de jeunes de moins de 25 ans, l’Afrique dispose d’un atout majeur pour son développement.

 Cependant, l’accès limité aux opportunités économiques maintient une grande partie de cette jeunesse dans le chômage ou le sous-emploi. « Nous devons créer des emplois durables en misant sur les chaînes de valeur régionales, en renforçant les entreprises dirigées par des jeunes et en exploitant l’innovation numérique », a exhorté Claver Gatete. Il a réaffirmé l’engagement de la Cea à accompagner les gouvernements africains, le secteur privé et les partenaires internationaux pour concrétiser cette ambition. À travers des politiques ciblées, des financements innovants et des stratégies adaptées, le continent peut, selon lui, libérer tout son potentiel économique et s’imposer comme une puissance mondiale. « Une Afrique prospère est une Afrique qui favorise l’industrialisation, qui se fait la championne de la valeur ajoutée et qui fait progresser l’intégration régionale », a-t-il conclu.