La Nation Bénin...
Le secteur de la microfinance au Bénin confirme sa vitalité au deuxième trimestre, avec une clientèle en progression et des dépôts en hausse. Mais, il est noté une dégradation spectaculaire du portefeuille de crédits (baisse de 75%) et quelques fragilités prudentielles qui appellent à la vigilance.
Le réseau des institutions de microfinance (Imf) a enregistré une croissance de 8,85 % de sa clientèle au deuxième trimestre 2025, soit 377 450 nouveaux clients, portant le total à 4 644 831 usagers, selon les dernières statistiques publiées par l’Agence nationale de surveillance des systèmes financiers décentralisés (Anssfd). Cette évolution illustre la vitalité du secteur, malgré un environnement économique encore marqué par les effets de la conjoncture régionale.
Toutefois, le trimestre sous revue révèle une baisse spectaculaire du montant des crédits octroyés, passé de 463,63 milliards F Cfa au premier trimestre 2025 à seulement 114,97 milliards au second trimestre, soit une contraction de près de 75 %. Cette chute pourrait s’expliquer par un resserrement des conditions de prêt ou par une prudence accrue des Imf face à la montée du risque de non-remboursement.
En revanche, l’encours brut des crédits affiche une hausse de 4,96%, atteignant 234,41 milliards de F Cfa à fin juin 2025. Autrement dit, les crédits en cours continuent de croître, signe d’une activité soutenue, même si les nouveaux financements marquent le pas.
Les dépôts collectés par les Imf ont également progressé, passant de 216,96 milliards à 223,02 milliards F Cfa, soit une hausse de 2,79 %. Cette évolution traduit une confiance relative de la clientèle dans les institutions de microfinance, qui continuent de jouer un rôle clé dans la mobilisation de l’épargne populaire.
Remboursement en hausse
L’un des points positifs du trimestre réside dans la hausse du taux de remboursement, qui atteint 64,06 %, contre 53,97 % au trimestre précédent. Cependant, cette amélioration ne suffit pas à contenir la progression du taux de créances en souffrance (Portefeuille à risque - Par à 90 jours), en hausse à 9,51 %, soit plus du triple de la norme réglementaire fixée à 3 %.
En valeur, les créances en souffrance s’élèvent à 23,55 milliards F Cfa, contre 23,07 milliards trois mois plus tôt. L’écart reste modéré, mais le niveau du Par appelle une vigilance accrue sur la gestion du risque de crédit.
Le paysage de la microfinance béninoise demeure largement dominé par les institutions mutualistes ou coopératives d’épargne et de crédit (Imcec), qui représentent 77,57 % des systèmes financiers décentralisés (Sfd) agréés (83 sur 107). Les associations comptent pour 12,15% (13 Sfd) et les sociétés pour 10,28 % (11 Sfd). Aucun retrait ni nouvelle autorisation d’exercice n’a été enregistré, signe d’une stabilité institutionnelle.
Les femmes représentent 48 % des bénéficiaires des Sfd, contre 36,99 % d’hommes et 15,01 % de personnes morales. Cette prédominance féminine confirme la place centrale des Imf dans le financement des activités génératrices de revenus portées par les femmes, notamment en milieu rural et périurbain.
Des ratios prudentiels contrastés
Sur le plan prudentiel, les performances du secteur demeurent contrastées. Le ratio de limitation des risques sur une seule signature s’établit à 3,71% pour une norme maximale de 10 %, un niveau satisfaisant. En revanche, la norme de liquidité reste en deçà du seuil réglementaire de 100 %, avec un niveau de 80,77 %, traduisant des tensions sur la trésorerie. La norme de capitalisation, fixée à 15%, atteint 10,16 %, révélant une fragilité relative du capital propre des Imf.
En revanche, la couverture des emplois à moyen et long termes par des ressources stables ressort à 217,70 %, soit plus du double de la norme ( ≥ 100 %), preuve d’une gestion prudente de la structure financière. Ces indicateurs traduisent une gestion globalement prudente, mais avec des points de vigilance sur la liquidité et la capitalisation, deux paramètres essentiels à la solidité du secteur.
Avec près de 4,6 millions de clients et 946 points de service à travers le pays, la microfinance reste un pilier de l’inclusion financière au Bénin. Toutefois, la montée du taux de créances en souffrance et la faiblesse relative de la liquidité appellent à un renforcement du contrôle interne et des dispositifs de gestion des risques.
Microfinance au Bénin