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Lutte contre la « déforestation importée » : Des produits africains ciblés par l’Europe

Environnement
Par   Fulbert Adjimehossou, le 09 mars 2022 à 16h57
Le vieux continent s’apprête à se doter de mécanismes visant à limiter la déforestation dans les régions d’où sont importées certaines matières. Une loi contre les produits soupçonnés d’être issus de la déforestation. C’est un mécanisme suggéré par la Commission européenne, qui pourrait être adopté par les députés européens, dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe. Le vieux continent cherche ainsi à freiner la déforestation, à travers les échanges commerciaux avec ses partenaires dont l’Afrique qui se retrouve dans le viseur quand on sait que certains produits concernés proviennent du continent. « L’idée, c’est de mettre en place un système où ne pourront entrer dans le marché européen que les produits ayant fait la preuve qu’ils ne sont pas issus d’une déforestation récente », a expliqué Pascal Canfin, député européen et Président de la Commission de l’environnement, en marge du Sommet Ue-Ua qui s’est tenu mi-février 2022 à Bruxelles. La déforestation et la dégradation des forêts sont des facteurs importants du réchauffement climatique et de la perte de biodiversité à l’échelle planétaire. La Commission a adopté en novembre 2021 trois nouvelles initiatives qui sont nécessaires pour faire du pacte vert pour l’Europe une réalité. De nouvelles règles sont envisagées contre ce qui est appelé « la déforestation importée » imputable à l’Ue, l’exportation de déchets illicites et les problèmes de gestion des déchets envoyés vers les pays tiers. Huile de palme, cacao… l’Afrique concernée Le règlement prévoit des normes obligatoires pour les opérateurs qui mettent sur le marché de l’Ue des produits de base spécifiques qui sont associés à la déforestation et à la dégradation des forêts. Il s’agit, entre autres, du soja, de la viande bovine, de l’huile de palme, du bois, du cacao et du café et certains produits dérivés, tels que le cuir, le chocolat et les meubles. Ils seront tenus de collecter les coordonnées géographiques des terres sur lesquelles les produits de base qu’ils mettent sur le marché ont été produits. « L’objectif est de faire en sorte que l’Europe contribue à arrêter la dégradation des forêts notamment tropicales. Si vous importez les produits chez nous, vous devez arrêter de dégrader les forêts. C’est un système de traçabilité basée sur les photos satellites, par exemple sur l’exploitation du cacao. Celui qui exporte vers l’Europe devra donner les coordonnées de l’exploitation pour qu’on s’assure qu’il n’y a pas une déforestation récente », a précisé Pascal Canfin. Cette traçabilité stricte vise à garantir que seuls les produits «zéro déforestation » entrent sur le marché européen. Un système d’évaluation comparative mis en œuvre par la Commission classera les pays comme présentant un risque faible, moyen ou élevé de fournir des produits de base ou des marchandises qui ne sont pas « zéro déforestation » ou conformes à la législation du pays producteur. Les obligations applicables aux opérateurs et aux autorités varieront en fonction du niveau de risque du pays ou de la région de production, avec des droits de diligence raisonnée simplifiés pour les produits provenant de zones à faible risque et un contrôle renforcé pour ceux qui proviennent de zones à haut risque. Les mesures envisagées suscitent déjà des réactions. Le monde est multipolaire aujourd’hui. Si les Européens ne veulent pas acheter notre cacao, il y en a d’autres qui vont l’acheter. Si les Américains ne veulent pas acheter notre cacao, il y en a d’autres qui pourront l’acheter. Nous devons travailler ensemble à ce que le cacao soit durable, a déjà fustigé le président ivoirien Alassane Ouattara. Selon les estimations de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (Fao), entre 1990 et 2020, le déboisement a dévoré 420 millions d’hectares de forêts. En termes de perte de surface nette (la différence entre la superficie déboisée et la nouvelle surface de forêts plantées ou régénérées), la Fao estime que le monde a perdu environ 178 millions d’hectares de couverture forestière au cours de la même période.