La Nation Bénin...

Crise alimentaire en Afrique de l’Ouest et centrale: Catastrophe imminente

International
Au-delà de l’urgence, le Pam appelle à un changement structurel Au-delà de l’urgence, le Pam appelle à un changement structurel

Selon le Programme alimentaire mondial des Nations Unies (Pam), l’Afrique de l’Ouest et centrale seraient au bord d’une catastrophe humanitaire. La combinaison de conflits persistants, de déplacements massifs, d’une inflation incontrôlée et de phénomènes climatiques extrêmes pousse des millions de personnes vers la faim aiguë. Plus de 36 millions de personnes peinent actuellement à se nourrir dans la région. Ce chiffre pourrait grimper à plus de 52 millions durant la période de soudure de juin à août 2025. Pour venir en aide aux personnes les plus vulnérables, durant les trois prochains mois, le Pam a besoin de 700 millions de dollars.

Par   Catherine Fiankan-Bokonga, Correspondante accréditée auprès de l’Office des Nations Unies à Genève (Suisse), le 12 mai 2025 à 08h54 Durée 3 min.
#Programme alimentaire mondial des Nations Unies #Afrique

Intervenant depuis Dakar (Sénégal) durant le briefing hebdomadaire organisé par le Service de l’Information des Nations Unies à Genève (Suisse), Sib Ollo, conseiller régional principal pour la recherche, l’évaluation et le suivi au Pam, confirme la gravité de la situation au Sahel en déclarant:«La situation alimentaire au Sahel reste dramatique. Nous avons visité des communautés qui font face à des sécheresses sans précédent dans certaines zones, et à des inondations dans d’autres, provoquant des pertes massives de cultures et de bétail. »

Dans le bassin du lac Tchad, des millions d’agriculteurs redoutent de ne pas pouvoir couvrir leurs besoins alimentaires les plus élémentaires. Dans la région de Ménaka, au Mali, des conditions de famine sont déjà signalées. L’inflation aggrave la situation car en 2025, les prix des denrées alimentaires ont bondi de 50 % par rapport à la moyenne des cinq dernières années. A titre d’exemple, Sib Ollo  explique que « vendre une chèvre aujourd’hui ne suffit même plus à acheter un demi-sac de mil ». « Partout, nous entendons les mêmes récits déchirants. Le moment d’agir, c’est maintenant ! »

Plus de 10 millions de personnes ont été déplacées dans la région, dont 2,4 millions de réfugiés et demandeurs d’asile au Tchad, Cameroun, Mauritanie et Niger. Près de huit millions de déplacés internes, surtout au Nigeria et au Cameroun, ont été coupés de leurs moyens de subsistance. Dans le nord du Ghana, des agriculteurs ont dû replanter plusieurs fois leurs cultures, faute de précipitations adéquates. À l’inverse, au nord du Nigeria, des zones comme Jere, Mafa et Konduga ont subi des inondations destructrices. En 2024, plus de six millions de personnes ont été affectées par les inondations dans la région.

Réponse humanitaire à bout de souffle

Malgré l’ampleur de la crise, seulement 40 % du plan de réponse humanitaire est actuellement financé. Le Pam a besoin d’urgence de 700 millions de dollars américains pour venir en aide à cinq millions de personnes au cours des trois prochains mois. « Les activités vitales doivent passer en priorité. Il faut un investissement massif pour augmenter l’échelle des opérations », insiste Sib Ollo. Le Service aérien humanitaire des Nations Unies (Unhas), géré par le Pam, risque également de voir ses activités suspendues au Mali et au Nigeria faute de financements suffisants. Ce service est pourtant indispensable pour acheminer l’aide humanitaire dans les zones les plus isolées.

Un instrument de coordination humanitaire a été mis en place pour rassembler les différents acteurs face à cette crise. Mais sans engagements financiers solides, l’impact restera limité.

Au-delà de l’urgence, le Pam appelle à un changement structurel. Depuis 2018, son programme intégré de résilience a permis de réhabiliter plus de 300 000 hectares de terres et d’aider quatre millions de personnes dans 3 400 villages du Sahel. Mais ces efforts ne pourront suffire sans une mobilisation collective et durable.

Catherine Fiankan-Bokonga