La Nation Bénin...
Le
procès contre l'ancien ministre de l'Intérieur de la Gambie, Ousman Sonko,
s'est achevé le 15 mai. Le tribunal fédéral de Bellinzone (Suisse) lui a
infligé une peine de 20 ans de prison pour crimes contre l'humanité. Les
avocats des plaignants et des militants ont qualifié cette décision historique
de succès, tout en étant déçus que l’ancien responsable gambien ait échappé à
certains chefs d'accusation. Sonko est désormais le plus haut fonctionnaire
d'État à avoir été jugé et condamné sur la base du principe de la compétence
universelle.
Le
tribunal pénal fédéral (Tpf) a reconnu Ousman Sonko, coupable de multiples
crimes commis entre 2000 et 2016, sous le régime de l'ancien président gambien
Yahya Jammeh, et l'a condamné à 20 ans de prison. L’ancien ministre gambien est
le plus haut fonctionnaire jamais condamné en Europe pour des crimes
internationaux en vertu du principe de la compétence universelle. Il s'agit
également du deuxième procès pour crimes contre l'humanité dans l'histoire
judiciaire suisse.
Trial
International, une organisation non gouvernementale spécialisée dans la lutte
contre l'impunité des crimes internationaux, a joué un rôle crucial dans cette
affaire.
Ousmane
Sonko a été arrêté en Suisse après le dépôt d'une plainte pénale par Trial
International pour soupçon de commission de crimes contre l'humanité, notamment
d’actes de torture. Agé de 55 ans, le Gambien a été arrêté le 26 janvier 2017
après avoir fui la Gambie en 2016 et demandé l'asile en Suisse. La Cour des
affaires pénales a affirmé sa compétence pour juger les crimes commis en
Gambie, en application du principe de compétence universelle, même si certains
faits reprochés remontent à la période avant 2011.
Chefs d’accusation
Le ministère public suisse a accusé Ousmane Sonko d'avoir commis diverses infractions graves entre 2000 et 2016 en Gambie, en complicité avec l'ancien président Yahya Jammeh qui a dirigé le pays de 1994 à 2017 et de hauts responsables de la sécurité. Il a été reconnu coupable de plusieurs chefs d'accusation d'homicide volontaire, de séquestration et de torture en tant que crimes contre l'humanité.
Le
verdict rendu le 15 mai 2024 par la Cour des affaires pénales déclare Ousmane
Sonko coupable de meurtres, d'actes de torture et de privations de liberté
répétés constituant des crimes contre l'humanité. Le Gambien est en prison en Suisse
depuis janvier 2017. Le tribunal a déclaré que « le temps passé en détention
policière, provisoire et préventive avant la date du jugement, d'un total de 2
667 jours, sera pris en compte dans l'exécution de la peine ». L'avocat de
Sonko, Maître Philippe Currat, confirme qu'il est fort probable que son client
fasse appel du jugement.
Bien
que la Cour des affaires pénales n'ait pas retenu tous les chefs d'accusation,
notamment ceux concernant des viols en tant que crimes contre l'humanité, la
condamnation à 20 ans de prison est une mesure significative. En plus de cette
peine, l’homme a été condamné à être expulsé du pays pour une durée de 12 ans.
Le
Gambien a également été condamné à verser des indemnités aux plaignants et à la
Confédération Helvétique pour les frais encourus dans le cadre du procès. Cette
somme s'élèverait à 3,9 millions de dollars. Plus de 16 000 dollars, confisqués
à Ousmane Sonko, ont déjà été alloués aux plaignants pour couvrir les plaintes
au civil.
Selon
les experts, cette condamnation marque une avancée importante dans la lutte
contre l'impunité pour les crimes contre l'humanité commis en Gambie et dans le
monde. En effet, bien qu’il ne soit pas encore entré en force, ce verdict
envoie un message fort aux auteurs de crimes graves et à leurs victimes sur le
pouvoir de la justice.