La Nation Bénin...
Toute intrusion dans un système informatique ou toute
attaque contre un système informatique et les données qui y sont contenues
constitue une atteinte aux réseaux et aux systèmes d'information, selon la loi
portant Code du numérique en République du Bénin. Dans cette interview, Florent
Sèlomè Kpalika, juriste spécialiste du numérique, lève un coin de voile sur ces
infractions et les peines encourues et invite les parents à plus de
responsabilité dans l’éducation de leurs enfants.
La Nation : Les atteintes aux réseaux et aux systèmes
d'information sont de plus en plus fréquentes dans les pratiques des
cybercriminels. De quoi s’agit-il ?
Florent Sèlomè Kpalika : Il faut dire que la loi n°2017-20
du 20 avril 2018 portant Code du numérique en République du Bénin désigne sous
le vocable de cybercriminalité toutes les nouvelles formes de délinquance que
l'émergence de l’internet et du numérique a favorisées. Parmi ces nouvelles
formes de délinquance, l’on retrouve les atteintes aux réseaux et aux systèmes
d'information qui sont sévèrement punies par la loi. Ainsi, selon le code du
numérique, l’accès et le maintien illégal dans l’ensemble ou une partie d’un
système informatique (article 507) ; l’atteinte aux données informatiques
(article 508) ; l’atteinte à l’intégrité du système informatique (article 509)
; l’atteinte à l’intégrité des données informatiques (article 510) ; l’abus de
dispositifs informatiques (article 511) ; la falsification informatique
(article 512) et la fraude informatique (article 513) sont constitutives
d’atteintes aux réseaux et aux systèmes
d'information.
Quelles sont les attaques qui s’assimilent à ces genres
d’infractions ?
Renvoie à cette catégorie d’infractions, toute intrusion
dans un système informatique ou toute attaque contre un système informatique et
les données qui y sont contenues. A ceci s’ajoutent la fabrication, la détention
ou la vente de matériaux ou de programmes informatiques qui permettraient ou
faciliteraient la commission de telles infractions. Ces atteintes sont très
souvent l’œuvre de pirates informatiques communément appelés hackers qui, par
le biais de programmes malveillants ou de virus informatiques, accèdent ou se
maintiennent de façon frauduleuse dans un système informatique avec, pour
conséquences, l’altération du fonctionnement du système, la suppression, la
modification, le vol ou la publication de données confidentielles ou secrètes.
Ce faisant, et dans la plupart du temps, ils causent des préjudices
patrimoniaux à autrui avec l’intention de se procurer un avantage économique
illégal.
Quelles sont les peines encourues par les auteurs de ces
infractions de droit commun en ligne ?
Le Code du numérique énumère les infractions de droit
commun commises en ligne dans l’ordre qui suit : - vol de données informatiques
(article 561) - usurpation d'identité (article 562) - recel (article 563) -
recel portant sur des données informatiques (article 565) - escroquerie
(article 566) - abus de confiance (article 568) - abus de confiance sur des
données informatiques (article 569) - extorsion (article 570) - chantage
(article 571) - Jeux de hasard illicites en ligne (article 572) - blanchiment
de capitaux (article 573) - atteinte à la vie privée commise sur internet
(article 574) - atteinte au secret des correspondances sur internet (article
575) - atteinte à la représentation de la personne (article 576). Les infractions
de droit commun commises en ligne sont punies de peine d’emprisonnement pouvant
aller d’un (01) an à vingt (20) ans et d’amendes allant de cinq cent mille (500
000) F Cfa à deux cents millions (200 000 000) F Cfa.
De façon concrète, quelles fautes sont passibles de ces
peines ?
Les infractions de droit commun commises en ligne
constituent en quelque sorte une transposition dans le cyberespace, des
infractions qui existaient déjà dans le monde matériel. Il s’agit par exemple
de la copie frauduleuse de données informatiques appartenant à autrui; de
l’usurpation de l'identité d'un tiers ou de l’usage d'une ou de plusieurs
données pouvant permettre de l'identifier (nom, photo, adresse, numéro de
téléphone...) ; de l’escroquerie, de l’abus de confiance, de l’extorsion et du
chantage sur internet. Aussi, lorsque par exemple, vous prenez quelqu’un en
photo ou en vidéo, ou que vous captez ou enregistrez sans son consentement des
paroles confidentielles ou prononcées à titre privé ou que vous transmettez ou
publiez lesdites photos, vidéos ou paroles, vous portez atteinte à son intimité
et à sa vie privée. Ces comportements sont donc interdits par le code du
numérique et les interdictions s’étendent à l’image des biens meubles ou
immeubles également. À titre d’exemple, nul ne peut prendre une photo à côté
d’une voiture ou d’un immeuble sans le consentement du propriétaire. Il est
également interdit d’ouvrir, de lire, de modifier, de supprimer ou de détourner
des correspondances qui ne vous sont pas destinées. Constitue également une
infraction au code du numérique, le fait de publier sur internet des montages
réalisés avec les paroles ou l'image d'une personne sans son consentement et si
vous ne faites pas clairement ressortir qu'il s'agit d'un montage.
Et pourquoi ce phénomène persiste-t-il en dépit de la lutte
?
S’il est vrai que la lutte contre la cybercriminalité a
commencé, il y a quelques années, il faut reconnaître que cette fois-ci, elle
est menée avec la détermination d’en finir définitivement. Les organes et
institutions chargés de cette lutte sont aujourd’hui mieux outillés et font
face à ce phénomène de façon plus âpre. Ceux qui s’adonnent à cette pratique
doivent donc prendre conscience et arrêter afin de ne pas subir la rigueur de
la loi.
L’année scolaire vient de commencer. Quels conseils
avez-vous à l'endroit des parents ?
Aux parents, je lancerai une invite à plus de
responsabilité dans l’éducation des enfants et des jeunes surtout. Ils doivent
davantage suivre les enfants à la maison et veiller sur leurs fréquentations.
Un bien mal acquis ne profite jamais.
Ils ne doivent donc pas se réjouir des réalisations de leurs enfants qui
s’y adonnent pour ceux qui sont déjà dans le cas, mais plutôt les décourager.
Ils doivent leur parler des peines encourues, des conséquences et répercussions
que cela pourrait engendrer.