La Nation Bénin...
L’arsenal juridique en vigueur au Bénin sur les violences
basées sur le genre ne freine pas encore les ardeurs des auteurs de ces actes.
Le fléau prend de l’ampleur dans le département de l’Atacora malgré les efforts
des structures de protection sociale.
Les violences basées sur le genre (Vbg) font parler
d’elles, malgré l’arsenal juridique en vigueur au Bénin. Ce fléau fait rage
dans les foyers et est vécu de diverses manières et désole les structures de
protection sociale. Elles notent que les formes les plus préoccupantes dans le
département de l’Atacora sont les violences physiques à travers les coups et
blessures qui, de façon répétée, sont remontées aux autorités par des
structures de protection sociale, désormais actives sur le terrain. C’est l’une
des formes en vogue au nord-ouest du Bénin, et dont les causes résident dans la
consommation de stupéfiants et d’alcool.
Au cours de la période du 1er janvier au 30 juin 2025, il
a été enregistré environ trois cent quatre-vingt-neuf (389) cas de violences
physiques, avec pour cible, la jeunesse notamment les jeunes filles et femmes
dont la tranche d’âge varie entre 18 et 34 ans selon les registres consultés.
Les violences psychologiques ou morales, une autre forme
du fléau enregistre sur la même période (janvier au 30 juin 2025), au total
deux cent vingt-huit (228) cas et la tranche d’âge la plus touchée est toujours
comprise entre 18 et 34 ans, justifiant, selon les acteurs, que la jeunesse est
vraiment au cœur de ces types de violence. L’alcool et les produits
psychotropes sont des facteurs explicatifs du triste record enregistré, par
rapport à cette tranche d’âge, sans oublier des questions d’éducation qui
amènent certains à penser à la force pour régler leurs problèmes.
Une situation face à laquelle des actions sont engagées
d’une part pour prévenir, et d’autre part pour l’éradiquer. Kouagou Bertin
N’Dah, directeur départemental des Affaires sociales et de la Microfinance
(Ddasm) de l’Atacora, rappelle que des campagnes de sensibilisation dans les
lycées, collèges et milieux d’apprentissage se font à l’endroit des jeunes.
L’appui des partenaires pour faire reculer le phénomène et les séances de
sensibilisation de proximité pour atteindre une plus grande cible comptent
parmi les actions à la Ddasm Atacora.
Prévention pour contrer l'expansion
Il note l’alcoolisme et la consommation des stupéfiants
comme des facteurs majeurs favorisant l’expansion de la violence. « Les viols
sont catégorisés dans les violences sexuelles. C’est une autre forme que nous
enregistrons, mais ce n’est pas aussi prépondérant que les violences physiques.
Dans les formations sanitaires, on se rend compte que les violences physiques
s’accompagnent de viols ou d’agressions sexuelles sur les victimes »,
souligne-t-il.
« Le ministère des Affaires sociales et de la
Microfinance (Masm), à travers ses bras opérationnels, travaille avec des
partenaires qui nous accompagnent fortement avec des stratégies novatrices.
Elles permettent de sensibiliser et de faire les prises en charge », informe
Kouagou Bertin N’Dah. L’appui des partenaires dans la prise en charge,
l’Institut national de la femme, un organisme institutionnel qui fait beaucoup
en matière de procédure judiciaire jusqu’à prendre la place de la victime pour
conduire la procédure jusqu’au bout, l’arsenal juridique permettant de dénoncer
et les plateformes mises en place pour le faire et de pouvoir aller au bout
renforcent la prévention. Le Ddasm salue la contribution des forces de sécurité
vers qui des cas complexes sont référés, pour conduire la procédure judiciaire.
Faible culture de dénonciation
« On se rend compte que la dénonciation n’a pas pris comme nous le souhaitons. Quand vous allez dans les communautés, vous ressentez que les gens ont une certaine crainte à s’afficher dans le processus de dénonciation », fait observer Bertin N’Dah. Il encourage toute la communauté à pouvoir dénoncer, au regard des chocs que reçoivent les victimes. L’urgence, quand il y a un cas de violence, dit-il, c’est d’apprécier pour savoir à quel besoin répondre au niveau de la victime et ensuite suivront les procédures juridique et judiciaire. « L’idée n’est pas d’emprisonner, mais de situer les responsabilités. La sanction qui va jusqu’à l’emprisonnement, c’est pour alerter de potentiels auteurs de ces cas de Vbg dans le but de décourager d’autres. Un mari enfermé, c’est beaucoup d’autres qui vont éviter la prison, mais un mari non enfermé, c’est beaucoup de femmes qui seront victimes », affirme B. N’Dah. Il faut dénoncer pour que les organes de prise en charge accomplissent leur mission, a-t-il ajouté.
Action en faveur des personnes vulnérables
Considérées comme les privilégiés de l’Etat, les
personnes vulnérables sont des cibles du Masm. Pour le Ddasm, des mesures
préférentielles ont été prises par l’Etat central et implémentées au profit des
personnes handicapées. Une des mesures phares, insiste-t-il, est la Carte
d’égalité de chance qu’il faut détenir, pour pouvoir bénéficier d’un certain
nombre d’avantages. Dans les avis de recrutement, il est réservé des quotas
pour les personnes handicapées. L’Etat est conscient du degré de vulnérabilité
de ces personnes-là et a décidé de leur accorder une place, suivant des
critères donnés, a rassuré Bertin N’Dah. Le gouvernement met en œuvre toute une
batterie d’actions en leur faveur, dit-il en citant le projet Assurance pour le
renforcement du capital humain (Arch) en implémentation au Bénin avec plusieurs
volets allant jusqu’à la formation des artisans.
Il comporte un volet assurance en faveur des pauvres
extrêmes identifiés dans le registre social unique. Il rappelle que ces
derniers bénéficient d’un package de soins au niveau des formations sanitaires.
Bertin N’Dah cite aussi le programme Gbéssoké qui est en cours
d’implémentation, pour le compte de l’Atacora, dans la commune de Tanguiéta. Il
offre une prise en charge intégrale pour tout citoyen qui se rend dans les
ex-Centres de promotion sociale, actuels Guichets uniques de protection sociale
(Gups). Les actes d’état civil, la microfinance, en plus des services sociaux
que délivrent, de façon traditionnelle, ces Gups se poursuivent au profit des
couches vulnérables.
L’Etat, à travers Gbéssoké, offre un certain nombre
d’appuis à des bénéficiaires pilotes. Des transferts monétaires pour
s’alimenter et au bout du cinquième au sixième mois, ils bénéficieront d’un
petit capital de 50 000 francs pour démarrer une activité. Il est aussi indiqué
que les bénéficiaires reçoivent de petits transferts monétaires de 10 000
francs pour renforcer leurs activités afin de ne pas dépenser le capital de
départ, jusqu’au dixième mois, puis suivra un appui complémentaire.
Microcrédit Alafia élargi aux hommes
Les femmes ne sont pas les seules bénéficiaires du microcrédit Alafia. Il est désormais élargi aux hommes. Aussi bien les femmes que les hommes sont soutenus par l’Etat à travers ce mécanisme mis en place, pour lutter contre la pauvreté. Il permet d’avoir, dans un premier temps, 30 000 ou 50 000 francs pour pouvoir mener une activité génératrice de revenus et quand le bénéficiaire dépasse ce cap, il peut bénéficier jusqu’à 100 000 francs.
« Il y a la phase 3 en cours d’implémentation qui va
jusqu’à 200 000 francs. C’est vrai que pour le département, les chiffres
n’étaient pas reluisants en termes de
nombre de bénéficiaires. Actuellement, il y a un travail qui se fait.
Les Gups sont dans tous les villages pour sensibiliser. Nous aussi à la
direction, nous avons entamé des tournées au niveau des neuf communes de
l’Atacora pour sensibiliser », rassure le Ddasm. Selon ses explications, l’Etat
déploie beaucoup de mesures en faveur de
ces personnes vulnérables.
Au 31 janvier 2025 pour l’Atacora, c’est environ huit cent douze millions cinq cent soixante mille (812 560 000) francs ont été placés, soit 13 668 crédits octroyés. La direction départementale des Affaires sociales et de la Microfinance de l’Atacora, selon son directeur, est consciente des défis qui sont les siens dans les secteurs qui relèvent de sa compétence. Mais, informe le directeur, les résultats dépendront de la collaboration des communautés. « On peut avoir l’ambition d’en finir en deux jours avec les Vbg, mais sans les dénonciations, sans la prise en charge efficace, rien ne se fera. Conjuguons nos efforts, le secteur des affaires sociales est le plus délicat. Nous avons le devoir d’accompagner les personnes les plus vulnérables, qui manquent parfois du minimum. Nous portons la politique et on a besoin du soutien des acteurs. Au-delà, la solidarité commence à titre individuel. C’est notre regard sensible face à une violence faite à une femme qui nous amène à dénoncer. C’est en voyant un enfant dans une situation difficile, qui a besoin de protection qu’on agit… on a vraiment besoin de tout le monde, pour relever ces défis-là », affirme Kouagou Bertin N’Dah.
Kouagou Bertin N’Dah, directeur départemental des Affaires sociales et de la Microfinance (Ddasm) de l’Atacora