Les acteurs sèment de bons grains en faveur d’une alimentation saine et suffisante pour les enfants d’Afrique de l’Ouest et du Centre. Le premier forum ouvert sur la
thématique, ce mardi à Cotonou, favorisera de bonnes récoltes en vue de conjurer la malnutrition. Si la moisson est abondante, plus aucun enfant dans la région ne souffrira encore de faim. C’est le challenge que se lancent les représentants des gouvernements, des agences des Nations Unies, des entrepreneurs, des chercheurs, des donateurs et des investisseurs réunis à Cotonou à l’invitation de l’Unicef. Il est question pour eux de réfléchir aux actions concrètes en matière de nutrition et d’alimentation pour chaque enfant d’Afrique. Le forum vise à contribuer à la création d'un environnement qui facilitera l'émergence, le déploiement et la mise à l'échelle de solutions innovantes pour la nutrition des jeunes enfants.
« Nous allons réfléchir à des solutions durables, des solutions innovantes mais aussi encourager les engagements et créer un nouvel espace de coopération », lance Gordon Jonathan Lewis, directeur régional adjoint de l’Unicef.
Selon lui, la bonne nutrition des enfants relève juste des droits humains. « La malnutrition est l’un des fardeaux les plus injustes pour un enfant, une violation du droit des enfants », souligne-t-il.
Le problème ne se situe pas seulement à ce niveau. Lassané Kaboré, directeur du département industrie à la Commission de la Cedeao, analyse la question sous le prisme de l’insécurité dans la région africaine ces dix dernières années. « Cette situation a surtout affecté les femmes et les enfants. Or, une alimentation régulière avec des aliments sains et nutritifs est une exigence minimale pour assurer la bonne croissance et le bon développement physique et mental des enfants », relève-t-il.
Il va falloir alors définir de nouveaux paradigmes pour améliorer la donne. Mais le contraste africain est un autre fardeau qui interpelle les acteurs. « Alors que la région Afrique de l'ouest et du Centre n’abrite que
14 % des enfants de moins de 5 ans, elle porte 21 % du fardeau mondial de retard de croissance. Selon les dernières estimations conjointes de la Banque mondiale, de l’Oms et de l’Unicef, près d’un enfant sur trois souffre d’un retard de croissance en Afrique de l’Ouest et du Centre et près de 80 % des enfants ont une diversité alimentaire quasi inexistante », fait remarquer Gordon Jonathan Lewis. Au-delà des enfants, ces données sont préjudiciables aux Etats.
Champ des actions
Abdoulaye Bio Tchané, ministre d’Etat chargé du Développement et de la Coordination de l’action gouvernementale, fait un focus sur les causes réelles de la situation. « Avec les changements climatiques, les faibles performances des campagnes agricoles, les pandémies et les conflits intérieurs, la situation nutritionnelle et alimentaire des enfants dans les pays africains est soumise à une dégradation continuelle en l’absence d’actions spécifiques. Couplée aux conflits géopolitiques internationaux, la confluence de facteurs est susceptible de provoquer une volatilité de l’offre et des prix mondiaux, et nous pouvons nous attendre à observer des impacts destructeurs », alerte-t-il.
De leur côté, les organisateurs du Forum public-privé pour les premiers aliments de l’enfant ne dorment pas sur leurs lauriers. Ils ont circonscrit le champ des actions à mener en trois paliers. D’abord, le forum permettra de renforcer l’engagement des gouvernements à mettre en œuvre des normes et des réglementations pour soutenir une alimentation saine pour les jeunes enfants. Ensuite, la rencontre encourage les participants à améliorer l’accès à des aliments complémentaires nutritifs. Enfin, il s’agit de mobiliser les donateurs et des investisseurs pour soutenir l’initiative ’’First Foods’’ et promouvoir les systèmes alimentaires durables.
De ces assises sortira une feuille de route opérationnelle pour une alimentation adéquate des enfants d’Afrique de l’Ouest et du Centre. « Il est important de comprendre les changements qui se produisent tout au long des systèmes agroalimentaires et d’y introduire un focus pour les jeunes enfants. Produire des céréales, des légumineuses ou autres n’est pas suffisant, il faut s’assurer que cela entre dans les repas journaliers des enfants qui ont une capacité gastrique très restreinte et donc des besoins très particuliers en termes de densité énergétique et de nutriments », recommande Salvator Niyonzima, coordonnateur résident du système des Nations Unies.
L’une des plus grandes satisfactions pour les organisateurs et participants à ce forum serait de voir la région Ouest-africaine et du Centre, au lendemain de ces assises, limiter sa dépendance alimentaire et nutritionnelle envers d’autres continents en vue de changer qualitativement la vie de ses enfants, longtemps exposés à la malnutrition.