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Décentralisation: La réforme structurelle évaluée

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maires des différentes communes du pays maires des différentes communes du pays

Formuler des suggestions pour améliorer le processus de décentralisation pour une bonne gouvernance à la base. Tel est l’objectif du séminaire qui s’est tenu, vendredi 13 juin au palais de la Marina et qui a permis au chef de l’Etat et aux maires des différentes communes du pays de faire le point de la réforme structurelle de la décentralisation. 

Par   Joël C. TOKPONOU, le 16 juin 2025 à 07h19 Durée 3 min.
#Décentralisation #Gouvernance locale

En planifiant et en mettant en oeuvre la réforme structurelle de la décentralisation, le gouvernement ambitionnait de mieux faire jouer aux collectivités territoriales leurs rôles dans le processus de développement global du pays. Trois années après le démarrage de cette nouvelle ère, il est question de faire un bilan et d’envisager les possibilités d’amélioration. C’est à cet exercice que se sont adonnés Patrice Talon, président de la République, et les maires des 77 communes du Bénin, lors d’un séminaire, vendredi 13 juin au palais de la Marina. Une occasion pour faire un diagnostic clair et précis de la situation et évoquer les perspectives.

Pendant toute la durée du séminaire, les participants ont échangé autour de la thématique centrale intitulée “Gouvernance locale : une nouvelle ère de la décentralisation”. Ce thème central sera débattu à travers les deux sous-thèmes que sont “Rappel des fondamentaux de la réforme structurelle de la décentralisation” et “Réforme structurelle de la décentralisation : acquis, difficultés et perspectives”.

En ouvrant les discussions, le chef de l’Etat a situé à nouveau le cadre de la rencontre et appelé les participants à un langage de vérité et d’objectivité. “La gouvernance décentralisée doit être le fer de lance de l’administration publique...”, a laissé entendre le président de la République qui a exprimé sa désolation face aux constats faits lors de la première phase de la décentralisation. Au cours de cette période ayant précédé la réforme structurelle de la décentralisation, bien de maux dénoncés dans la sphère plus haute sont relevés au niveau de la gestion des communes. C’est ce qui a motivé les nouvelles normes imposées dont la séparation des pouvoirs politique et administratif.

“Trois ans après la réforme, les pratiques commencent-elles à changer dans le bon sens ?”, s’est interrogé le chef de l’Etat. En demandant à chaque acteur de répondre à cette question, il appelle à une critique constructive sans considération de bords politiques. Il s’agira, selon lui, d’oeuvrer pour que “la décentralisation joue effectivement son rôle de moteur du développement”.

Reconnaissant les faiblesses et les insuffisances antérieures, le président Patrice Talon a rappelé que la réforme vise à rompre avec les pratiques d’antan, marquées par la confusion des rôles, la mauvaise gouvernance et l’impunité. « Fallait-il continuer ainsi, ou bien prendre les décisions courageuses pour changer la donne ? Nous avons fait le choix de la réforme, et nous devons maintenant nous assurer qu’elle produise les résultats escomptés », a-t-il souligné.

Le chef de l'État a insisté sur la nécessité pour les élus et les techniciens de mieux intégrer l’esprit de la réforme, qui repose sur une séparation claire des fonctions : les élus tracent les grandes orientations, les Secrétaires exécutifs mettent en œuvre et assurent la gestion dans le respect des règles de bonne gouvernance.

Au nom des communes, Luc Atrokpo, président de l’Association nationale des communes du Bénin (Ancb), a exprimé sa reconnaissance à l’endroit du chef de l’État pour l’attention constante portée aux collectivités territoriales. « Aucune commune n’est laissée pour compte. Vos actions sont visibles du nord au sud, de l’est à l’ouest en passant par le centre », a-t-il affirmé avec conviction, saluant également la réforme du système partisan qui, selon lui, « stabilise les conseils communaux et facilite la mise en œuvre des Plans de développement communaux ». Tout en saluant les avancées déjà enregistrées, les élus ont soumis quelques préoccupations majeures que sont la reprise de la délivrance des attestations de détention coutumière (Adc), en attendant la généralisation du titre foncier, afin de sécuriser les usages fonciers et soutenir les finances communales, la clarification du statut des maires fonctionnaires de l’État, confrontés à des situations administratives complexes et l’intégration des véhicules de fonction au patrimoine des communes, pour permettre leur réaffectation conformément aux textes.

Dans un esprit d’écoute et d’ouverture, le président de la République a exhorté les participants à parler « sans langue de bois », affirmant que « le gouvernement est disposé à analyser toutes les propositions issues de ce séminaire ». Il a également insisté sur la nécessité de dépasser les clivages politiques : « Le Bénin nous appartient à tous. Nous avons l’obligation de le construire ensemble, pour les générations futures ».

Ce séminaire, riche en échanges, marque une étape importante dans le dialogue entre l’État central et les collectivités locales, avec une volonté partagée : faire de la décentralisation un moteur réel du développement à la base.

Historique

La réforme de la décentralisation, même si elle n’est pas parfaite puisque étant une œuvre humaine, a le mérite d’être bien coordonnée avec des objections et actions précises. Au début, c’est un diagnostic presque complet des 20 ans environ de gouvernance locale qui a été fait. Les principaux maux qui minent les communes ont ainsi été identifiés. « Les contre-performances relevées sont dues à plusieurs facteurs structurels dont la forte politisation des nominations aux fonctions techniques et administratives des mairies. Ce qui entrave la promotion d’une culture administrative moderne et professionnelle. De même, les recrutements de personnels ne tiennent pas souvent compte de la compétence ni des besoins réels des mairies. Ainsi, en général, les communes ne disposent pas de cadres ayant des compétences en adéquation avec les exigences techniques des postes qu’ils occupent », relevait le gouvernement en Conseil des ministres le 2 juin 2021. Il constate également que « malgré les sessions de renforcement de capacités et les contrôles assortis de sanctions, la mauvaise gouvernance persiste et des dysfonctionnements sont notés dans le processus de passation des marchés publics locaux. Par ailleurs, les communes rencontrent des difficultés dans la mobilisation de ressources propres et connaissent, pour la plupart, des insuffisances dans la planification budgétaire ». A ces mêmes assises, les orientations essentielles de la réforme structurelle du secteur de la décentralisation ont été approuvées. Il s’agit de renforcer la séparation des fonctions politique et technique pour améliorer la reddition de comptes et lutter plus efficacement contre l’impunité, de mettre en place un dispositif opérationnel de relai des services publics entre les niveaux central, communal et infra-communal, d’améliorer les mécanismes de financement des investissements communaux puis de créer des synergies d’action entre le conseil communal, ses démembrements, les associations de développement et les Ong. L’objectif final étant d’améliorer la gouvernance communale afin de créer une dynamique de valorisation des potentialités dont recèlent les communes.

Avec méthode et un suivi régulier de la mise en œuvre, le gouvernement a adopté le 15 décembre 2021 les dispositifs institutionnels de mise en œuvre de la réforme structurelle du secteur de la décentralisation. « Ces dispositifs s’inscrivent dans le cadre de l’opérationnalisation de ladite réforme. Ils consistent en la création d’une Commission nationale de mise en œuvre, d’un Comité technique de suivi et d’un Comité stratégique de supervision, qui auront la charge de conduire la réforme conformément aux orientations du gouvernement », avait annoncé le Conseil des ministres. Une semaine plus tard, la loi 2021-14 du 20 décembre 2021 portant Code de l’administration territoriale est promulguée, donnant ainsi un socle législatif à tout le processus de réforme.

Toujours avec une lucidité constante, le gouvernement, voulant d’une réforme inclusive, a examiné et approuvé le 26 janvier 2022 le protocole d’accord de partenariat entre lui et l’Association nationale des communes du Bénin. Ce qui implique formellement la faîtière des communes dans la mise en œuvre de la réforme. Le 16 février 2024, il y a eu l’adoption de trois décrets portant attributions du préfet, organisation et fonctionnement des départements, attributions, organisation et fonctionnement de la Conférence administrative départementale puis attributions, organisation et fonctionnement du Conseil départemental de concertation et de coordination.