La Nation Bénin...
Formuler des suggestions pour améliorer le processus de
décentralisation pour une bonne gouvernance à la base. Tel est l’objectif du
séminaire qui s’est tenu, vendredi 13 juin au palais de la Marina et qui a
permis au chef de l’Etat et aux maires des différentes communes du pays de
faire le point de la réforme structurelle de la décentralisation.
En planifiant et en mettant en oeuvre la réforme
structurelle de la décentralisation, le gouvernement ambitionnait de mieux
faire jouer aux collectivités territoriales leurs rôles dans le processus de
développement global du pays. Trois années après le démarrage de cette nouvelle
ère, il est question de faire un bilan et d’envisager les possibilités
d’amélioration. C’est à cet exercice que se sont adonnés Patrice Talon,
président de la République, et les maires des 77 communes du Bénin, lors d’un
séminaire, vendredi 13 juin au palais de la Marina. Une occasion pour faire un
diagnostic clair et précis de la situation et évoquer les perspectives.
Pendant toute la durée du séminaire, les participants ont
échangé autour de la thématique centrale intitulée “Gouvernance locale : une
nouvelle ère de la décentralisation”. Ce thème central sera débattu à travers
les deux sous-thèmes que sont “Rappel des fondamentaux de la réforme
structurelle de la décentralisation” et “Réforme structurelle de la
décentralisation : acquis, difficultés et perspectives”.
En ouvrant les discussions, le chef de l’Etat a situé à
nouveau le cadre de la rencontre et appelé les participants à un langage de
vérité et d’objectivité. “La gouvernance décentralisée doit être le fer de
lance de l’administration publique...”, a laissé entendre le président de la
République qui a exprimé sa désolation face aux constats faits lors de la
première phase de la décentralisation. Au cours de cette période ayant précédé
la réforme structurelle de la décentralisation, bien de maux dénoncés dans la
sphère plus haute sont relevés au niveau de la gestion des communes. C’est ce
qui a motivé les nouvelles normes imposées dont la séparation des pouvoirs
politique et administratif.
“Trois ans après la réforme, les pratiques
commencent-elles à changer dans le bon sens ?”, s’est interrogé le chef de
l’Etat. En demandant à chaque acteur de répondre à cette question, il appelle à
une critique constructive sans considération de bords politiques. Il s’agira,
selon lui, d’oeuvrer pour que “la décentralisation joue effectivement son rôle
de moteur du développement”.
Reconnaissant les faiblesses et les insuffisances antérieures, le président Patrice Talon a rappelé que la réforme vise à rompre avec les pratiques d’antan, marquées par la confusion des rôles, la mauvaise gouvernance et l’impunité. « Fallait-il continuer ainsi, ou bien prendre les décisions courageuses pour changer la donne ? Nous avons fait le choix de la réforme, et nous devons maintenant nous assurer qu’elle produise les résultats escomptés », a-t-il souligné.
Le chef de l'État a insisté sur la nécessité pour les
élus et les techniciens de mieux intégrer l’esprit de la réforme, qui repose
sur une séparation claire des fonctions : les élus tracent les grandes
orientations, les Secrétaires exécutifs mettent en œuvre et assurent la gestion
dans le respect des règles de bonne gouvernance.
Au nom des communes, Luc Atrokpo, président de
l’Association nationale des communes du Bénin (Ancb), a exprimé sa
reconnaissance à l’endroit du chef de l’État pour l’attention constante portée
aux collectivités territoriales. « Aucune commune n’est laissée pour compte.
Vos actions sont visibles du nord au sud, de l’est à l’ouest en passant par le
centre », a-t-il affirmé avec conviction, saluant également la réforme du
système partisan qui, selon lui, « stabilise les conseils communaux et facilite
la mise en œuvre des Plans de développement communaux ». Tout en saluant les
avancées déjà enregistrées, les élus ont soumis quelques préoccupations
majeures que sont la reprise de la délivrance des attestations de détention
coutumière (Adc), en attendant la généralisation du titre foncier, afin de
sécuriser les usages fonciers et soutenir les finances communales, la
clarification du statut des maires fonctionnaires de l’État, confrontés à des
situations administratives complexes et l’intégration des véhicules de fonction
au patrimoine des communes, pour permettre leur réaffectation conformément aux
textes.
Dans un esprit d’écoute et d’ouverture, le président de
la République a exhorté les participants à parler « sans langue de bois »,
affirmant que « le gouvernement est disposé à analyser toutes les propositions
issues de ce séminaire ». Il a également insisté sur la nécessité de dépasser
les clivages politiques : « Le Bénin nous appartient à tous. Nous avons l’obligation
de le construire ensemble, pour les générations futures ».
Ce séminaire, riche en échanges, marque une étape
importante dans le dialogue entre l’État central et les collectivités locales,
avec une volonté partagée : faire de la décentralisation un moteur réel du
développement à la base.
Historique
La réforme de la décentralisation, même si elle n’est pas
parfaite puisque étant une œuvre humaine, a le mérite d’être bien coordonnée
avec des objections et actions précises. Au début, c’est un diagnostic presque
complet des 20 ans environ de gouvernance locale qui a été fait. Les principaux
maux qui minent les communes ont ainsi été identifiés. « Les
contre-performances relevées sont dues à plusieurs facteurs structurels dont la
forte politisation des nominations aux fonctions techniques et administratives
des mairies. Ce qui entrave la promotion d’une culture administrative moderne
et professionnelle. De même, les recrutements de personnels ne tiennent pas
souvent compte de la compétence ni des besoins réels des mairies. Ainsi, en
général, les communes ne disposent pas de cadres ayant des compétences en
adéquation avec les exigences techniques des postes qu’ils occupent », relevait
le gouvernement en Conseil des ministres le 2 juin 2021. Il constate également
que « malgré les sessions de renforcement de capacités et les contrôles
assortis de sanctions, la mauvaise gouvernance persiste et des
dysfonctionnements sont notés dans le processus de passation des marchés
publics locaux. Par ailleurs, les communes rencontrent des difficultés dans la
mobilisation de ressources propres et connaissent, pour la plupart, des
insuffisances dans la planification budgétaire ». A ces mêmes assises, les
orientations essentielles de la réforme structurelle du secteur de la
décentralisation ont été approuvées. Il s’agit de renforcer la séparation des
fonctions politique et technique pour améliorer la reddition de comptes et
lutter plus efficacement contre l’impunité, de mettre en place un dispositif
opérationnel de relai des services publics entre les niveaux central, communal
et infra-communal, d’améliorer les mécanismes de financement des
investissements communaux puis de créer des synergies d’action entre le conseil
communal, ses démembrements, les associations de développement et les Ong.
L’objectif final étant d’améliorer la gouvernance communale afin de créer une
dynamique de valorisation des potentialités dont recèlent les communes.
Avec méthode et un suivi régulier de la mise en œuvre, le
gouvernement a adopté le 15 décembre 2021 les dispositifs institutionnels de
mise en œuvre de la réforme structurelle du secteur de la décentralisation. «
Ces dispositifs s’inscrivent dans le cadre de l’opérationnalisation de ladite
réforme. Ils consistent en la création d’une Commission nationale de mise en
œuvre, d’un Comité technique de suivi et d’un Comité stratégique de
supervision, qui auront la charge de conduire la réforme conformément aux
orientations du gouvernement », avait annoncé le Conseil des ministres. Une
semaine plus tard, la loi 2021-14 du 20 décembre 2021 portant Code de
l’administration territoriale est promulguée, donnant ainsi un socle législatif
à tout le processus de réforme.
Toujours avec une lucidité constante, le gouvernement, voulant d’une réforme inclusive, a examiné et approuvé le 26 janvier 2022 le protocole d’accord de partenariat entre lui et l’Association nationale des communes du Bénin. Ce qui implique formellement la faîtière des communes dans la mise en œuvre de la réforme. Le 16 février 2024, il y a eu l’adoption de trois décrets portant attributions du préfet, organisation et fonctionnement des départements, attributions, organisation et fonctionnement de la Conférence administrative départementale puis attributions, organisation et fonctionnement du Conseil départemental de concertation et de coordination.