La Nation Bénin...
Bruits de botte, bourdonnement dans les casernes, radiodiffusion et télévision nationales «réquisitionnées», remue-ménage au palais présidentiel, président déposé, ‘’comité militaire de salut’’, et que sait-on encore des modes opératoires des auteurs de cette gangrène appelée putsch ? Il fut un temps béni où ces items avaient droit au chapitre. L’Afrique connut beaucoup de ces scénarios depuis les soleils des indépendances. Et certains pays comme le Bénin en furent de grands malades. Et puis, ce fut la démocratie, par la force des choses, peu ou prou assimilée. Depuis, les putschistes ont changé de fusil d’épaule.
En vérité, mal assimilée sous nos cieux, la démocratie qualifiée de ‘’ventilateur’’ ou de ‘’nescafé’’, s’est tropicalisée, soumise aux réalités positives et négatives endogènes de conception du pouvoir d’Etat en Afrique confronté à la pluralité, l’alternance. En bien et en mal, la domestication de la démocratie s’est opérée. En bien, tout panafricaniste ne peut que se réjouir de ce que ce système de gouvernement, importé des côtes occidentales européennes, ait pris des couleurs africaines dans sa pratique sur le continent. Cela étant, on a vite fait de déchanter de cette africanité, de la touche africaine, au regard des pratiques mauvaises, des avatars que cela recèle.
De la pratique démocratique en Afrique, en effet, on note peu de vertus à implémenter. Il en est ainsi de l’approche que les citoyens, lambda ou avisés, ont de la démocratie. Oscillant entre excès et mauvaise assimilation, telle une malbouffe restée sur le ventre, ce phénomène, véritable avatar démocratique, les Béninois l’expérimentent sous différentes coutures depuis 28 ans de renouveau démocratique. Dans l’entendement populaire, démocratie suppose qu’on a tous les droits y compris celui des dérives verbales et d’offense aux personnalités de premier plan. Certains politiciens l’apprennent d’ailleurs à leurs dépens, tel celui-là qui depuis peu a maille à partir avec la justice pour avoir tenu des propos désobligeants à l’endroit de l’homme d’affaires et président de parti, Sébastien Ajavon.
La nouvelle trouvaille, mise en chantier depuis bientôt trois ans avec plus de nocivité ? Toute aussi pernicieuse, elle est dévolue à la contestation tout-va des choix gouvernementaux auxquels on substitue volontiers, en guise de programme, ses états d’âme, les résolutions issues des brèves de comptoir, c’est-à-dire des discussions et élucubrations développées dans les gargotes et bars. La chose n’aurait aucun intérêt si des politiciens, en désaccord avec le pouvoir, ne se prêtaient pas au jeu par leur vision étriquée de l’opposition politique axée sur l’option de flinguer toute initiative gouvernementale, rien venant de celui-ci ne trouvant grâce à leurs yeux, comme si le gouvernement ne doit pas être dissocié des intérêts du pays. Ce sont les putschistes de l’ère démocratique, qui n’entendent pas patienter de confectionner leur projet de société et le soumettre au suffrage universel comme disait un certain Boni Yayi. Leur arme favorite ? Au programme d’action du gouvernement, ils préfèrent leurs propres réflexions et agenda ! A quoi bon attendre que le président élu tienne les échéances pour lesquelles il s’est engagé !
Evidemment, on objectera que cela relève de la veille citoyenne. Le genre de biscuit qu’affectionnent certaines ONG qui valident ainsi leurs crédits auprès des organismes qui les banquent. Seulement, les états d’âme personnels ne doivent pas être confondus à de l’opinion, et cette forme bizarroïde de redevabilité n’est pas comme du cochon qui, dit-on, est bon à manger de la peau des oreilles aux viscères. Il s’agit donc d’une fausse posture, en raison de ce que, sous des dehors de veille citoyenne et de reddition de comptes, s’anime à bien des égards une opposition sourde, assez pernicieuse car elle se fait de façon masquée. Le pot-aux-roses est vite découvert, lorsque certaines de ces ONG font chorus avec l’opposition pour faire des réclamations assez renversantes. La plus illustre de ces réclamations récemment au Bénin étant l’idée d’assises nationales pour définir un cap pour la gouvernance du pays. Mesure radicale qui n’a lieu d’être que si le pays est fondamentalement en crise, ce qui est loin d’être le cas actuellement. Il s’agit donc d’une feinte, d’une tentative restée lettre morte de coup d’Etat que leurs auteurs ont en vain réitérée. Allez imaginer qu’un président élu, et donc détenteur d’un mandat qui le légitime à agir, prête flanc à une telle réclamation qui lui lierait les mains ? Il serait, à tout le moins un bleu, un benêt, ou alors il ferait ainsi aveu de son incapacité à conduire les affaires publiques?