La Nation Bénin...
La
guerre contre le terrorisme, guerre hybride par ailleurs, recèle une crise
multidimentionnelle qui se nourrit des situations politiques, militaires et
sociales régionales.
La situation sécuritaire au Nord du Bénin connaît une dégradation alarmante, marquée par une recrudescence d’attaques djihadistes d’une ampleur inédite, dont l’assaut meurtrier du 17 avril 2025 ayant coûté la vie à des dizaines de militaires béninois, près de la frontière tripartite avec le Burkina Faso, le Niger et le Nigeria. Cette zone frontalière, historiquement épargnée, est désormais la cible privilégiée de groupes armés affiliés à Al-Qaïda, notamment Jama’at Nusrat al Islam wal Muslimeen, en français Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans qui revendique ces attaques, profitant de l’absence de coopération multilatérale efficace entre le Bénin et ses voisins sahéliens. Les experts pointent unanimement un « défaut de réponse coordonnée» avec le Burkina Faso et le Niger, des pays où les dispositifs antiterroristes restent insuffisants ou désorganisés, permettant aux jihadistes de mener des incursions transfrontalières en toute impunité dont le Bénin fait les frais. Le gouvernement béninois n’a de cesse de déplorer cette lacune stratégique, soulignant que la sécurisation en solo du territoire national se heurte à l’incapacité des pays limitrophes à contenir l’expansion des groupes armés depuis leurs propres régions instables.
Aussi, l’armée béninoise, bien qu’engagée dans des opérations de ratissage et de présence accrue, subit-elle des pertes croissantes face à des attaques pernicieuses et mobiles. La région du parc national du W, écosystème stratégique à cheval sur trois pays, concentre particulièrement les enjeux, devenant un symbole des défis transnationaux liés à la porosité des frontières et à la militarisation inégale des espaces ruraux. Si le Bénin a renforcé ses effectifs et ses équipements ces dernières années, l’escalade violente depuis 2023 témoigne d’une adaptation rapide des groupes jihadistes, qui exploitent les failles d’un Sahel toujours considéré comme «l’épicentre mondial du terrorisme » avec plus de la moitié des décès liés à ce fléau en 2024, selon l’indice mondial du terrorisme. Cette crise multidimensionnelle, à la fois militaire, politique et sociale, révèle ainsi les limites des approches nationales face à un phénomène régional qui exige une réponse collective, sous peine de voir le golfe de Guinée basculer à son tour dans une spirale de violences durables.