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Stabilité financière: Sous la menace des risques géopolitiques

Economie
Réaction moyenne à des évènements survenant chez un grand partenaire commercial, en point de pourcentage chaque mois. Réaction moyenne à des évènements survenant chez un grand partenaire commercial, en point de pourcentage chaque mois.

L’édition d’avril 2025 du rapport sur la stabilité financière mondiale alerte sur les perturbations causées par les tensions géopolitiques, en particulier dans les économies fragiles. Le Bénin, malgré un niveau de risque sous contrôle, peut aussi ressentir les effets.

Par   Babylas ATINKPAHOUN, le 18 avr. 2025 à 07h05 Durée 3 min.
#risques géopolitiques

L’instabilité géopolitique mondiale, entre conflits armés, tensions diplomatiques et menaces terroristes, ne cesse de peser sur les marchés financiers. C’est ce que révèle l’édition d’avril 2025 du rapport sur la stabilité financière dans le monde du Fonds monétaire international (Fmi), publiée sous le titre : « Les risques géopolitiques: conséquences sur les prix des actifs et la stabilité financière». Le document met en lumière l’impact de ces tensions sur les économies nationales, avec un accent particulier sur les pays à économies fragiles comme le Liban, le Venezuela, le Pakistan, le Ghana, l’Éthiopie ou encore le Soudan, où la moindre secousse géopolitique peut entraîner des turbulences financières majeures. Dans ces pays, le tissu économique est souvent déjà affaibli par des problèmes structurels tels que l’endettement élevé, l’inflation galopante, la faible diversification économique ou l’instabilité des institutions. Lorsqu’un choc géopolitique survient, il accentue la défiance des investisseurs, fait grimper les primes de risque souverain, déprécie la monnaie nationale et provoque une fuite des capitaux. Les marchés boursiers déjà étroits et volatils s’effondrent plus rapidement, aggravant les tensions sociales et la précarité économique. Le rapport note que les conflits militaires internationaux sont les plus dévastateurs. Dans les pays émergents en situation fragile, ils entraînent en moyenne une baisse mensuelle de 5 % du rendement des actions, contre une moyenne de 1 % dans le reste du monde. Au-delà des pays émergents, certains États à économies déjà très fragiles subissent de plein fouet les chocs géopolitiques, avec des conséquences bien plus graves et durables. L’exemple du Soudan est éloquent. Le conflit armé qui secoue le pays depuis 2023 a fait plonger la monnaie locale, réduit les capacités de collecte fiscale et détruit la confiance des marchés. De même, le Liban, en proie à une instabilité politique chronique voit sa dette publique augmenter à mesure que les investisseurs exigent des taux d’intérêt plus élevés pour compenser le risque géopolitique. Les primes de risque souverain augmentent souvent de 45 points de base dans les pays émergents à la suite d’un choc géopolitique, contre 30 points dans les pays avancés, selon le rapport.

Sous pression

Des pays comme le Bénin, la Côte d’Ivoire, le Sénégal ou encore la Jordanie, considérés comme à risque modéré, ne sont pas directement touchés par les conflits, mais subissent les effets indirects par le biais de leurs principaux partenaires commerciaux. Ainsi, une guerre affectant un pays voisin ou un marché stratégique pour leurs exportations peut entraîner une baisse de leurs recettes d’exportation, une raréfaction des financements extérieurs, voire des tensions sur leur monnaie. Le Bénin, par exemple, bien qu’en paix, est exposé aux conséquences de l’instabilité régionale dans le Sahel. Les liens commerciaux avec des pays comme le Niger ou le Burkina Faso étant perturbés, cela affecte les échanges transfrontaliers, la sécurité des corridors logistiques, et donc la performance économique du pays. À cela s’ajoute une hausse du coût des emprunts sur les marchés internationaux, les investisseurs devenant plus frileux vis-à-vis des pays de la sous-région.

Le rapport identifie aussi des pays à haut risque comme l’Ukraine, la Syrie, l’Afghanistan, la Birmanie ou encore le Haïti, où les crises géopolitiques ne sont pas seulement un facteur de perturbation financière, mais un élément structurant de l’effondrement économique. Dans ces contextes, les marchés financiers sont quasi inexistants, la monnaie est hyperdévaluée et les institutions financières sont soit fermées, soit paralysées. Les institutions financières dans ces pays perdent leur rôle de soutien à l’économie réelle et les banques, lorsqu’elles fonctionnent encore, limitent drastiquement les crédits. Les fonds d’investissement internationaux s’en retirent, laissant place à une dollarisation ou à un recours accru à des devises étrangères, ce qui accentue la dépendance extérieure.

Pour contenir les effets de l’instabilité géopolitique sur les économies, le rapport recommande de renforcer les outils de surveillance et de gestion des risques, notamment en réalisant des tests de résistance réguliers afin d’évaluer l’impact potentiel de différents scénarios de crise. Il préconise également l’augmentation des réserves de change et la constitution d’un espace budgétaire suffisant, permettant aux États d’amortir plus efficacement les chocs extérieurs. Enfin, il insiste sur la nécessité de développer davantage les marchés financiers locaux, en particulier dans les pays à risque modéré comme le Bénin, afin de mieux répartir les risques, d’élargir les sources de financement et d’attirer des capitaux à long terme. L’appel est lancé pour que la gouvernance économique soit pensée en intégrant la dimension géopolitique, de plus en plus déterminante dans l’évolution des marchés. Car dans un monde instable, anticiper les risques n’est plus un luxe, mais une nécessité stratégique.