La Nation Bénin...
L’édition
d’avril 2025 du rapport sur la stabilité financière mondiale alerte sur les
perturbations causées par les tensions géopolitiques, en particulier dans les
économies fragiles. Le Bénin, malgré un niveau de risque sous contrôle, peut
aussi ressentir les effets.
L’instabilité
géopolitique mondiale, entre conflits armés, tensions diplomatiques et menaces
terroristes, ne cesse de peser sur les marchés financiers. C’est ce que révèle
l’édition d’avril 2025 du rapport sur la stabilité financière dans le monde du
Fonds monétaire international (Fmi), publiée sous le titre : « Les risques
géopolitiques: conséquences sur les prix des actifs et la stabilité financière».
Le document met en lumière l’impact de ces tensions sur les économies
nationales, avec un accent particulier sur les pays à économies fragiles comme
le Liban, le Venezuela, le Pakistan, le Ghana, l’Éthiopie ou encore le Soudan,
où la moindre secousse géopolitique peut entraîner des turbulences financières
majeures. Dans ces pays, le tissu économique est souvent déjà affaibli par des
problèmes structurels tels que l’endettement élevé, l’inflation galopante, la
faible diversification économique ou l’instabilité des institutions. Lorsqu’un
choc géopolitique survient, il accentue la défiance des investisseurs, fait
grimper les primes de risque souverain, déprécie la monnaie nationale et
provoque une fuite des capitaux. Les marchés boursiers déjà étroits et volatils
s’effondrent plus rapidement, aggravant les tensions sociales et la précarité
économique. Le rapport note que les conflits militaires internationaux sont les
plus dévastateurs. Dans les pays émergents en situation fragile, ils entraînent
en moyenne une baisse mensuelle de 5 % du rendement des actions, contre une
moyenne de 1 % dans le reste du monde. Au-delà des pays émergents, certains
États à économies déjà très fragiles subissent de plein fouet les chocs
géopolitiques, avec des conséquences bien plus graves et durables. L’exemple du
Soudan est éloquent. Le conflit armé qui secoue le pays depuis 2023 a fait
plonger la monnaie locale, réduit les capacités de collecte fiscale et détruit
la confiance des marchés. De même, le Liban, en proie à une instabilité
politique chronique voit sa dette publique augmenter à mesure que les
investisseurs exigent des taux d’intérêt plus élevés pour compenser le risque
géopolitique. Les primes de risque souverain augmentent souvent de 45 points de
base dans les pays émergents à la suite d’un choc géopolitique, contre 30
points dans les pays avancés, selon le rapport.
Sous pression
Des
pays comme le Bénin, la Côte d’Ivoire, le Sénégal ou encore la Jordanie,
considérés comme à risque modéré, ne sont pas directement touchés par les
conflits, mais subissent les effets indirects par le biais de leurs principaux
partenaires commerciaux. Ainsi, une guerre affectant un pays voisin ou un
marché stratégique pour leurs exportations peut entraîner une baisse de leurs
recettes d’exportation, une raréfaction des financements extérieurs, voire des
tensions sur leur monnaie. Le Bénin, par exemple, bien qu’en paix, est exposé
aux conséquences de l’instabilité régionale dans le Sahel. Les liens
commerciaux avec des pays comme le Niger ou le Burkina Faso étant perturbés,
cela affecte les échanges transfrontaliers, la sécurité des corridors
logistiques, et donc la performance économique du pays. À cela s’ajoute une
hausse du coût des emprunts sur les marchés internationaux, les investisseurs
devenant plus frileux vis-à-vis des pays de la sous-région.
Le
rapport identifie aussi des pays à haut risque comme l’Ukraine, la Syrie,
l’Afghanistan, la Birmanie ou encore le Haïti, où les crises géopolitiques ne
sont pas seulement un facteur de perturbation financière, mais un élément
structurant de l’effondrement économique. Dans ces contextes, les marchés
financiers sont quasi inexistants, la monnaie est hyperdévaluée et les
institutions financières sont soit fermées, soit paralysées. Les institutions
financières dans ces pays perdent leur rôle de soutien à l’économie réelle et
les banques, lorsqu’elles fonctionnent encore, limitent drastiquement les
crédits. Les fonds d’investissement internationaux s’en retirent, laissant
place à une dollarisation ou à un recours accru à des devises étrangères, ce
qui accentue la dépendance extérieure.
Pour contenir les effets de l’instabilité géopolitique sur les économies, le rapport recommande de renforcer les outils de surveillance et de gestion des risques, notamment en réalisant des tests de résistance réguliers afin d’évaluer l’impact potentiel de différents scénarios de crise. Il préconise également l’augmentation des réserves de change et la constitution d’un espace budgétaire suffisant, permettant aux États d’amortir plus efficacement les chocs extérieurs. Enfin, il insiste sur la nécessité de développer davantage les marchés financiers locaux, en particulier dans les pays à risque modéré comme le Bénin, afin de mieux répartir les risques, d’élargir les sources de financement et d’attirer des capitaux à long terme. L’appel est lancé pour que la gouvernance économique soit pensée en intégrant la dimension géopolitique, de plus en plus déterminante dans l’évolution des marchés. Car dans un monde instable, anticiper les risques n’est plus un luxe, mais une nécessité stratégique.