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Economie numérique et employabilité: Entre besoins croissants et offre en pleine mutation

Numérique

Face à l'essor du numérique, le marché de l'emploi au Bénin connaît une transformation profonde. De nombreuses entreprises recherchent des talents qualifiés dans des domaines tels que la cybersécurité, le développement web, l'intelligence artificielle et le marketing numérique, mais peinent à en trouver, malgré les efforts du gouvernement pour mettre des produits finis de qualité sur le marché.

Par   Isidore GOZO, le 11 févr. 2025 à 09h18 Durée 3 min.
#cybersécurité #entrepreneuriat numérique

Le numérique apparaît aujourd'hui comme le moteur de l'économie béninoise. Avec la digitalisation accélérée des entreprises, l'essor du e-commerce et la modernisation des services publics, les compétences numériques sont devenues incontournables. Selon une étude de la Banque mondiale, 85 % des emplois d'ici 2030 nécessiteront des compétences numériques, qu'elles soient de base ou avancées. Les entreprises béninoises, qu'il s'agisse de start-up, de Pme ou de grandes sociétés, sont à la recherche de profils qualifiés dans plusieurs domaines clés, dont le développement web et mobile. La demande en développeurs maîtrisant des langages comme JavaScript, Python ou Php ne cesse de croître. En cybersécurité, avec l'augmentation des cyberattaques, la sécurisation des systèmes informatiques devient une priorité. Dans le domaine de l'analyse de données et de l'intelligence artificielle, de plus en plus d'entreprises souhaitent exploiter leurs données pour optimiser leurs stratégies. L'autre secteur clé est le marketing digital et la gestion des réseaux sociaux. La communication numérique est un enjeu majeur pour les marques cherchant à capter une audience toujours plus connectée.

Cependant, malgré ces opportunités, les entreprises rencontrent des difficultés à recruter des talents opérationnels. « Le manque de formation adaptée, l'insuffisance d'expérience pratique et l'écart entre les compétences enseignées et les besoins réels freinent l'insertion des jeunes diplômés », révèle Athanase Gbogbé, spécialiste en ressources humaines et développement social. Face à ces besoins croissants, le gouvernement du président Patrice Talon a rapidement pris le taureau par les cornes. Plusieurs initiatives ont vu le jour, notamment l'assainissement du secteur des universités privées et la promotion de filières adaptées aux réalités actuelles. « Des universités et grandes écoles proposent désormais des formations en informatique, en gestion de projets numériques ou en marketing numérique, avec la suppression des filières bureaucratiques, voire inutiles,», explique le spécialiste. Le gouvernement a également pris l'initiative de créer plusieurs lycées à travers tout le Bénin pour former les jeunes aux métiers d'avenir. Des centres de formation spécialisés ont également vu le jour. Des structures comme Sèmè City ou l'École 42 Bénin proposent des cursus de renforcement de capacités plus techniques, axés sur le développement de logiciels, la cybersécurité et l'entrepreneuriat numérique. Les bootcamps et formations en ligne se sont fortement développés. Avec l'essor de plateformes comme OpenClassrooms, Coursera ou Udemy, de nombreux jeunes se forment de manière autonome, mais ces formations manquent souvent d'encadrement et de certification reconnue.

Compétences certifiées

Les défis restent encore nombreux pour assurer une formation plus efficace avec des produits finis certifiés. « Le Bénin s'efforce progressivement d'adapter la formation aux exigences du marché. Il reste essentiel de mettre l'accent sur la formation pratique et l'expérience », confie Athanase Gbogbé, qui estime que les jeunes diplômés manquent souvent d'expérience terrain. Il est donc crucial d'introduire davantage de projets concrets, de hackathons et de stages en entreprise pour renforcer leurs compétences. « Un problème se pose souvent lors des recrutements : des recruteurs exigent un certain nombre d'années d'expérience pour les postes. Il est donc important pour le jeune diplômé de consacrer encore un à deux ans à la formation sur le terrain et aux stages », conseille-t-il.

Il insiste également sur la modernisation des infrastructures de formation. Selon lui, les universités et centres de formation doivent être mieux équipés en laboratoires informatiques, en serveurs et en outils numériques performants afin de permettre aux étudiants de pratiquer sur du matériel de pointe. Athanase Gbogbé propose également le renforcement des partenariats avec les entreprises. « Les acteurs du privé doivent être impliqués dans la définition des programmes de formation. L'alternance et l'apprentissage en entreprise doivent être encouragés pour permettre une immersion directe dans le monde du travail », ajoute-t-il.

La formation en ligne et les certifications reconnues doivent aussi être promues. Les plateformes d'apprentissage en ligne offrent une opportunité d'acquérir rapidement des compétences. Cependant, il est essentiel que ces formations soient encadrées et reconnues par l'État et les entreprises. Au-delà de la formation, le spécialiste en ressources humaines et développement social souligne l'importance d'accompagner les jeunes dans la création de start-up et l'innovation technologique. « Des incubateurs comme Sèmè City jouent un rôle clé dans cet écosystème », reconnaît-il. Avec une jeunesse dynamique et une forte volonté de modernisation, le Bénin possède tous les atouts pour devenir un acteur majeur du numérique en Afrique. Cependant, la formation aux métiers du numérique doit s'adapter rapidement aux mutations du secteur pour répondre aux attentes des entreprises et favoriser l'emploi.