La Nation Bénin...
Nouvelle
approche en matière de santé communautaire, la politique ‘’One Health’’
convainc par ses résultats sur le terrain. Elle offre une réponse
multidimensionnelle aux problèmes de santé dans les communautés. Dr Mouhamed Orou Yari, médecin coordonnateur
de la zone sanitaire de Banikoara, évoque sa pertinence pour sa commune et le
niveau de satisfaction depuis la mise en œuvre.
La Nation : Depuis quelques années, le gouvernement prône l’approche ‘’One Health’’, une politique de santé qui met l’accent sur la santé humaine, animale, environnementale et sociale. Comment évolue cette politique de santé sur le terrain ?
Dr
Mouhamed Orou Yari : Il est capital
d’informer nos compatriotes sur la politique de santé communautaire. Depuis
juin 2023, la zone sanitaire de Banikoara a été enrôlée parmi les communes
pilotes pour la nouvelle politique nationale de santé communautaire. Le
gouvernement a pris l’engagement de faire participer les communautés aux
questions de santé. Nous avons fait des grappes de 150 à 200 ménages qui sont
accompagnés à chaque fois par un relais communautaire. Le but, c’est de pouvoir
offrir des paquets de soins en lien avec la promotion de la santé, la
prévention des maladies et pour soigner certaines maladies les plus fréquentes
à travers des agents de santé qualifiés qui sont les superviseurs des relais
communautaires. Six communes avaient été sélectionnées dans le cadre de cette
politique afin d’apprécier l’approche avant de passer à l’échelle. Nous sommes en train de boucler environ 19
mois de mise en œuvre. C’est tout naturellement que les questions de santé
s’améliorent au fil des années. Cette politique de santé a grandement contribué
à l’atteinte des résultats.
Les
premiers résultats ont permis de noter la diminution du nombre de cas de
paludisme à Banikoara de près de vingt-et-un mille après six mois de mise en
œuvre du programme. Le nombre d’enfants transfusés au niveau du service
pédiatrique avait diminué de presque la moitié sur la même période et le nombre
d’enfants complètement vaccinés avait augmenté de près de 600, la consultation prénatale
a augmenté de près de cinq mille.
En
2024, nous avons fait des progrès inédits. Sur les six premiers mois de 2024,
le paludisme a été déclassé. Je m’explique : par le passé, le paludisme était
la première raison de consultation dans notre structure sanitaire et les
consultations pour le paludisme sont venues en troisième position. Des
évaluations périodiques se font avec l’appui (ndlr : du ministère de la Santé)
et des partenaires. Elles vont nous permettre de mieux apprécier les impacts en
lien avec la politique de santé communautaire.
Nous attendons un changement de comportement au sein des communautés.
Quel est le degré d’implication des communautés dans la mise en œuvre de ce projet ?
Depuis
1987, après l’Initiative de Bamako qui a fait suite à la Conférence de Alma-Ata
en 1978, les gouvernants du domaine de la santé dans le monde entier ont
compris qu’on ne peut résoudre les problèmes de santé sans l’implication des
communautés. Ce dispositif a été bâti avec les élus locaux. Chaque grappe de
150 à 200 ménages sous le lead des élus locaux concourt à identifier les relais
communautaires au cours d’une assemblée générale villageoise. Les chefs
d’arrondissements sont responsables de la plateforme One Health au niveau des
arrondissements avec l’agent de santé communautaire qualifié. Le chef de
village est responsable de la composante locale du dispositif au niveau du
village. Cette composante définit les priorités sur lesquelles les relais
communautaires doivent travailler au cours de leurs visites à domicile.
Les élus locaux nous aident énormément à résoudre les difficultés auxquelles nous sommes confrontés dans la mise en œuvre de cette politique. J’apprécie beaucoup la manière dont ce programme est conçu.
Quels critères président au choix des relais communautaires ?
Le critère le plus important est le bénévolat, l’engagement volontaire. Le relais communautaire doit provenir de la grappe qu’il est chargé de superviser. Il doit être de bonne moralité et avoir des habilités pour les nouvelles technologies.
Quels sont les défis en termes de coordination des acteurs de la plateforme One Healh ?
L’une des innovations, avec les anciennes politiques de santé communautaire que nous avons connues au Bénin, c’est le focus qui a été mis sur le One Health (une seule santé). Nous nous sommes rendu compte que les différentes approches de cette politique sont liées. La santé humaine, animale et environnementale sont mises ensemble pour définir la politique One health. Chaque ministère concerné par cette politique a des démembrements jusqu’au niveau local afin de garantir une meilleure santé à nos populations.
Comment les populations bénéficiaires perçoivent-elles les efforts faits dans ce cadre ?
Les stratégies qu’adoptent nos différents ministères sont généralement prouvées. Les relais communautaires savent qu’ils doivent travailler pour créer un cadre propice à ces stratégies. Ils font un travail remarquable à travers les séances de sensibilisation et les démonstrations qu’ils organisent au niveau des communautés afin de leur permettre d’avoir un niveau de compréhension plus élevé par rapport au lien entre notre façon de vivre la survenue des maladies, ce qui facilite l’implémentation des stratégies de santé. Le niveau de connaissance des populations sur les thématiques de santé avait été évalué au début du processus One Healh. Il sera réévalué sur les mêmes thématiques au bout d’un temps. On met tout en œuvre pour accélérer le rythme de travail. La quasi-totalité des indicateurs de santé continuent de s’améliorer dans la zone sanitaire de Banikoara que je coordonne.
Quels sont vos partenaires dans la mise en œuvre de cette politique ?
Tout le monde s’accorde qu’on ne peut pas résoudre les problèmes de santé sans impliquer les communautés. La santé communautaire nécessite beaucoup d’investissements et de ressources. Nous mobilisons 405 relais communautaires pour la zone sanitaire de Banikoara, qui travaillent de façon continue. L’Unicef soutient le paiement de leurs émoluments. Le gouvernement, à travers le Fonds Fadec, assure le paiement de leurs salaires. Le partenaire LLF vient également en appui dans la zone sanitaire de Banikoara.