La Nation Bénin...
Au Bénin, le but de la fréquentation des bibliothèques
n’est plus le même depuis l’avènement du numérique. Au lieu de se consacrer aux
livres, de plus en plus d’apprenants utilisent les équipements numériques des
bibliothèques pour se divertir.
Les bibliothèques sont toujours fréquentées par les
apprenants, mais tous n’y vont pas pour la lecture ou des recherches
documentaires. Certains s'y rendent car attirés par l’accès aux équipements
numériques qui s’y trouvent.
« Moi, je fréquente la bibliothèque pour lire et utiliser
le Wi-Fi pour mes recherches et aussi me divertir », confie Coffe Amirath,
élève en classe de Troisième. Il en est de même pour Priscillia Yimeli-Tsifo,
également en classe de Troisième. Pour elle, la bibliothèque est un espace à la
fois de lecture, de socialisation et de détente numérique. « Je viens à la
bibliothèque souvent pour lire et retrouver mes amis. Quand j'apporte mon
téléphone, j'utilise le Wi-Fi pour me divertir », témoigne-t-elle.
La pratique prend de plus en plus d’ampleur et inquiète
plus d’un notamment les bibliothécaires qui sont en contact quotidien avec ces
jeunes. « Nous remarquons un changement dans l’évolution des pratiques dans les
bibliothèques, avec le numérique qui prend beaucoup de place dans tous les
domaines et la jeunesse qui était déjà accusée de manque de lecture se donne à
cœur joie à ces nouveautés au détriment de la lecture », déplore Béatrice
Atchadé, responsable de la médiathèque de l’Institut français de Parakou.
« En dehors des élèves, je dirais spécialement les candidats aux divers examens, la majorité est présente pour l’utilisation du Wi-Fi. Cela ne poserait aucun problème si l’utilisation du numérique allait dans le sens des recherches, malheureusement ce n’est pas le cas », ajoute Cadhy Hounton, stagiaire en bibliothéconomie documentation à la bibliothèque Bénin Excellence de Godomey. Jérôme Tossavi, agent bibliothécaire à l’Institut français de Cotonou, confirme la tendance : « L’incursion du numérique en bibliothéconomie a bouleversé les habitudes des jeunes. Ceux qui fréquentent la bibliothèque sont aujourd’hui plus intéressés par tout ce qui est support numérique, au détriment des livres ».
Des espaces hybrides
Pour des professionnels du domaine, l’Internet ne peut
pas se substituer aux livres. Et dans les rangs des apprenants, il en existe
quand même qui fréquentent les bibliothèques uniquement pour la lecture des
livres, d’autres pour des recherches documentaires, en se tournant vers les
manuels scolaires. Si l’accès au numérique et à la connexion Internet est
autorisé dans les bibliothèques, leur utilisation à d’autres fins pose un
véritable problème.
Les bibliothèques, autrefois perçues comme des temples du
savoir livresque, deviennent progressivement des espaces hybrides où cohabitent
livres, ordinateurs, téléphones et connexions Internet. Cette transition numérique, bien que porteuse
d’opportunités, crée aussi un déséquilibre. Elle remet en question la capacité
des bibliothèques à remplir leur mission éducative et culturelle, en
particulier auprès d’un public jeune dont les habitudes de consommation de
l’information sont de plus en plus dictées par les écrans.
Loin de rejeter totalement le numérique, les bibliothécaires appellent plutôt à un usage équilibré et éducatif de ces outils. Car, si les jeunes s’éloignent de la lecture traditionnelle, c’est aussi parce que l’environnement numérique leur propose un contenu plus rapide, plus visuel et souvent plus distrayant. Le désintérêt que les jeunes affichent pour les livres peut entraîner une perte de culture littéraire et être une grande barrière face à la mission première des bibliothèques.