La Nation Bénin...
Face à la montée des fraudes sur le réseau électrique
national, la Société béninoise d’énergie électrique (Sbee) tire la sonnette
d’alarme. Thierry Codo, directeur Ethique et conformité, expose les multiples
formes de vol d’énergie, les dérives internes, les responsabilités des usagers
et les sanctions encourues. Une mise au point nécessaire pour sensibiliser les
citoyens et restaurer la confiance autour d’un service public essentiel.
La Société béninoise d’énergie électrique (Sbee) est en alerte face à une recrudescence des cas de fraudes et de vols d’énergie sur son réseau. Intervenant à ce sujet, Thierry Codo, directeur Ethique et Conformité de la Sbee, a livré un exposé détaillé sur les différents types de vols auxquels la société est confrontée, les dispositifs de surveillance mis en place ainsi que les sanctions prévues par la loi. Le vol d’énergie, tel que défini par Thierry Codo, consiste en la soustraction frauduleuse d’électricité appartenant à la Sbee, société en charge de la distribution d’énergie électrique au Bénin. Ce phénomène prend plusieurs formes, toutes aussi préjudiciables les unes que les autres.
Parmi les pratiques frauduleuses observées, deux grandes catégories de vols se distinguent. La première concerne les vols matériels à travers des actes de vandalisme sur les équipements de distribution, notamment les transformateurs, disjoncteurs, cellules et autres composants techniques. La seconde, plus insidieuse, est le vol de l'énergie même. Celui-ci se manifeste notamment par des piquages directs avant compteur, qui empêchent le comptage réel de la consommation, ou encore par des manipulations frauduleuses sur les compteurs, dans le but de réduire artificiellement les indices enregistrés. Selon le directeur éthique et conformité, ces pratiques sont particulièrement fréquentes dans certains milieux professionnels et résidentiels : ateliers de soudure, cybercafés, bars, restaurants et même certains ménages. Il évoque également des cas où des individus usurpent l’identité des techniciens de la Sbee, arborant de faux uniformes ou se déplaçant à bord de véhicules marqués pour tromper la vigilance des citoyens. Il invite donc la population à rester vigilante et à noter les immatriculations de ces véhicules suspects pour aider à identifier les fraudeurs.
Energie pour tous
Depuis que le gouvernement a lancé l’initiative « Énergie pour tous » avec à la clé une baisse substantielle du coût des compteurs monophasés de 5 à 10 ampères, passant d’une centaine de mille francs Cfa à seulement 20 000 F Cfa, la demande a explosé. Pour répondre à cette demande, la Sbee a dû faire appel à des prestataires recrutés par des entreprises partenaires. Malheureusement, ce système a favorisé des pratiques de « rançonnement », autrement dit la corruption ou le versement de pots-de-vin à certaines étapes du processus de raccordement ou de dépannage. Ainsi, certains agents ou intermédiaires exigeraient des sommes allant jusqu’à 100 000 F Cfa aux clients, alors que le tarif officiel est beaucoup plus bas. Cette forme de fraude a gangrené les procédures, depuis la demande de devis jusqu’à la pose effective du compteur. Pourtant, comme le rappelle Thierry Codo, la demande de devis pour les compteurs de 5 à 10 ampères est entièrement gratuite, et les pièces à fournir se limitent à une pièce d’identité valide et une copie de l’Ifu.
Une autre préoccupation fréquemment soulevée par les
clients concerne les charges fixes, parfois perçues comme injustifiées. Le
directeur tient à clarifier que ces frais couvrent l’entretien des
installations: remplacement de compteurs défectueux, disjoncteurs, câbles de
raccordement, coffrets ou panneaux. Ces remplacements, en cas de panne, sont
effectués sans frais supplémentaires pour le client. Il s’agit donc de garantir
la continuité et la sécurité du service.
Comment reconnaître un vol d’énergie ?
Détecter un vol d’énergie n’est pas toujours simple pour un citoyen lambda. Toutefois, certains indices de consommation anormalement faibles peuvent alerter. Par exemple, un ménage équipé de climatiseurs et d’électroménagers lourds qui ne recharge son compteur que de 1000 à 2000 F Cfa par mois est suspect, surtout si l’on sait que les seules charges fixes sur un compteur de 10 ampères représentent environ 1180 F Cfa. Thierry Codo invite donc les colocataires ou voisins à observer et signaler ce genre d’anomalies. Lorsqu’une fraude est détectée, la Sbee engage un processus rigoureux. Une équipe composée d’agents de la direction éthique et conformité, d’un officier de justice et d’un représentant de l’Agence nationale de métrologie est déployée pour effectuer un constat officiel. Sur la base des documents établis (procès-verbal, fiche de constat), l’historique de consommation est analysé pour établir une facture de redressement, qui correspond à l’énergie volée. Ces factures sont ensuite émises par les directions régionales, chargées du recouvrement.
Sanctions
Le vol d’énergie est sévèrement puni par la loi béninoise. En vertu de l’article 47 du Code de l’électricité, toute personne reconnue coupable de vol d’énergie risque une peine d’emprisonnement de 3 à 24 mois et une amende allant de 1 à 5 millions de francs Cfa. La loi s’applique aussi bien aux usagers qu’aux agents de la Sbee impliqués dans des cas de fraude. Ces derniers sont d’ailleurs passibles de sanctions disciplinaires, allant jusqu’à la radiation. Face à l’ampleur de la fraude, la Sbee encourage la dénonciation anonyme. Les citoyens peuvent envoyer des messages écrits ou audios aux numéros dédiés (01 98 89 90 12), pour signaler les cas de vol ou de corruption. Thierry Codo rassure sur la confidentialité des dénonciations. L’identité des dénonciateurs est strictement protégée. Mieux encore, une prime de 10 % du montant de la facture de redressement est attribuée à toute personne ayant permis de démasquer une fraude à condition que la facture soit effectivement encaissée. Par cette intervention, Thierry Codo réaffirme l’engagement de la Sbee à lutter contre les actes de fraude et à instaurer un système plus juste, transparent et performant. Il appelle les citoyens à faire preuve de vigilance, de responsabilité et de collaboration active, pour une consommation d’énergie respectueuse des lois et équitable pour tous.