La Nation Bénin...
Dans
plusieurs localités du Bénin, le Certificat du numéro personnel
d’identification (Cnpi/Fid) est perçu par les acteurs du système éducatif comme
une bouée de sauvetage pour des candidats aux examens de fin d’année. A défaut
d’autres pièces pour justifier leur identité, la carte communément appelée
« C’est moi » est un précieux palliatif.
En
ce début de mois de mai, des équipes conjointes du Projet d’identification
unique pour l’intégration et l’inclusion en Afrique de l’Ouest (Wuri) et de
l’Agence nationale d’identification des personnes (Anip) ont enrôlé dans le
registre national des personnes physiques au Bénin, près de 3000 enfants des
écoles primaires des villages de Perma (540 km au Nord de Cotonou). Chacun de
ces écoliers recevra bientôt son certificat du numéro personnel
d’identification encore appelé carte « C’est moi ». De par son
caractère gratuit (obtenue sans frais), sa validité illimitée et sa facilité à
être obtenue, cette carte est en passe de sortir de l’exclusion scolaire des
dizaines de milliers d’écoliers, d’élèves et d’étudiants parmi les plus démunis
du Bénin. Le certificat du numéro personnel d’identification tend à devenir une
carte scolaire et même une carte d’accès aux centres d’évaluation des activités
scolaires et académiques. Ce dont se réjouissent autorités locales et scolaires
de la localité de Perma.
Mais
au Bénin, les écoliers de Perma ne seront pas les premiers à bénéficier des
avantages de cette carte au plan scolaire. Le Certificat du numéro personnel
d’identification (Cnpi/Fid) a permis à bon nombre d’apprenants, notamment des
candidats aux examens, d’accomplir leurs formalités sans disposer d’aucune
autre pièce d’identité. Essenam Arsène Martin en a fait l’expérience. Candidat
à la session unique du Baccalauréat en 2023, il s’est enregistré dans la base
de données d’inscription à l’examen avec le Cnpi/Fid, selon ses confidences.
« Je n’avais encore établi aucune des nouvelles pièces d’identité, faute
de moyens. Mais il me fallait mon numéro personnel d’identification. J’ai donc
recouru au Cnpi dont la délivrance est gratuite », témoigne le jeune
candidat à qui l’examen n’a malheureusement pas souri. Dans de nombreux
établissements scolaires, recours a été fait à la même pièce par des candidats
pour la validation de leurs dossiers de candidature. Au collège Notre Dame des
Apôtres de Cotonou, l’établissement reconnaît avoir recommandé cette pièce qui
comportait le Npi indispensable pour l’inscription de ses candidats au Bac.
« Nous avons encouragé nos candidats à se faire délivrer le Cnpi/Fid dont
l’attribution était gratuite », explique le censeur, la sœur Pierrette Abe.
Cette option, poursuit-elle, a aidé de nombreux parents et candidats qui
avaient des difficultés diverses à se faire délivrer d’autres pièces
d’identité. « Cela a beaucoup facilité les choses », admet le
censeur. La ruée sur cette pièce s’explique selon elle par la facilité de sa
délivrance et sa gratuité. « Même en remplissant les formalités sur un
téléphone, il était possible de l’avoir », admet-elle.
Le
décret N° 2020 - 099 du 26 février 2020 stipule que « le Numéro personnel
d’identification est attribué à toute personne inscrite sur le registre
communal ou sur le registre national des personnes physiques ». Il permet
entre autres d’individualiser toute personne inscrite sur un registre communal
ou national des personnes physiques, de servir de point d'entrée unique pour
fusionner les éléments d'identification relatifs au citoyen… L’article 5 du
même texte reconnait que ce numéro est obligatoire pour accéder à tous les
services publics non seulement dans le but d'identifier les administrés, mais
aussi pour échanger les données entre services publics et parapublics. Il est
appelé à ce titre à figurer sur tous les actes officiels qui requièrent une
identification de la personne. Il s’agit notamment, poursuit le texte,
« des actes, documents et fichiers établis par les services de l'Etat, les
administrations, les communes… des actes, documents et fichiers établis par les
établissements hospitaliers, scolaires, universitaires… ».
Une porte de sortie
Antonia Dossou-Yovo n’avait jamais entendu parler de la carte « C’est moi ». Ni elle ni son unique garçon n’en disposaient. « Je courais pour les moyens en vue de lui faire établir les nouvelles pièces d’identité après l’obtention de son acte de naissance sécurisé quand j’ai entendu parler d’une carte à délivrance gratuite », conte, non sans émotion, la mère de famille. « Le délai jouait en défaveur de mon garçon pour ses dossiers. Le collège mettait la pression. C’est un voisin qui m’a informé que la carte s’obtenait en ligne, séance tenante. Nous l’avons essayé avec son ordinateur et c’était effectif aussi bien pour mon fils que pour moi-même », laisse-t-elle entendre. Conséquence, Gauthier, son fils, a fait valider sa candidature et a réussi à son baccalauréat, se réjouit sa génitrice qui caricature le Cnpi/Fid comme une « porte de sortie à l’heure des difficultés ». D’autres candidats encore plus chanceux se sont présentés à leur centre de composition sans aucune autre pièce d’identité si ce n’est leur carte Cnpi/Fid. « Il nous était possible en tant que superviseur de trancher suplace en tenant compte de certains éléments pour les admettre dans les salles de composition. Personnellement, lorsque je me suis assuré que les candidats étaient inscrits, j’ai procédé à la vérification de leur identité via le QR Code puis je les ai admis à composer au même titre que leurs camarades qui avaient présenté le Certificat d’identification personnel et la carte nationale d’identité », confesse sous anonymat un responsable d’un centre de composition du Bac lors de la dernière session unique.
A
la direction générale de l’Office du Baccalauréat, de tels cas ne sont pas
inconnus. Taïrou Mor Kora, directeur de l'Organisation technique de l'examen
(Dote) n’en est pas étonné. Mais reconnait-il, cela est du ressort des
superviseurs qui décident en fonction des éléments en leur possession. De ses
explications, il ressort que le Cnpi/Fid a l’avantage de comporter le numéro
personnel d’identification. Numéro indispensable pour valider l’inscription des
candidats suivant les nouvelles règles édictées par la direction de l’Office.
Il a également demandé aux chefs d’établissements « d’accompagner leurs
apprenants et candidats pour la délivrance du Cnpi/Fid » en vue de
disposer plus facilement et sans dépenser de ce numéro pour valider leurs dossiers.
Plaidoyer
Déjà présent dans le processus de départ pour les candidats, ce certificat peut être utilisé pour accepter les candidats dans tous les centres de composition, estime Is-Deen Amoussa, revendeur de pièces dont le fils aîné passe le baccalauréat à la prochaine session prévue au mois de juin. « Le Cnpi/Fid constitue de mon point de vue une étape avancée de la délivrance des autres pièces d’identité. J’ai compris en suivant des explications sur cette pièce à la radio qu’on ne peut la falsifier et qu’elle comporte un numéro unique qui ne peut plus être attribué à une autre personne », argumente-t-il. « Nous souhaitons que le Cnpi/Fid fasse partie des pièces officielles pour composer », espère-t-il. Marysette Kouthon, membre de l’Association des parents d’élèves d’un grand collège de Cotonou, plaide la même cause, mais tient un autre argumentaire. « Nous avons déjà vu des candidats aux examens en difficulté pour avoir perdu leurs cartes d’identité peu avant les examens. Avec l’autorisation du Cnpi/Fid pour la composition, il suffit même sur place dans le centre d’examen, de se connecter sur un téléphone pour lui en délivrer un autre et tout le monde est sorti du stress », conseille la mère de famille.