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Partenariat public-privé: Instrument mieux encadré pour éviter les dérives

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La loi 2024-30 du 23 juillet 2024, portant cadre juridique du Partenariat public-privé (Ppp), marque un tournant dans la stratégie de développement des infrastructures au Bénin. Avec des innovations majeures comme la création de la société de projets, cette réforme ambitionne de rendre les Ppp plus efficaces et attractifs. 

Par   Babylas ATINKPAHOUN, le 03 janv. 2025 à 06h32 Durée 3 min.
#Partenariat public-privé

La nouvelle loi sur le partenariat public-privé révolutionne le modèle économique du Bénin en établissant un cadre inédit pour une coopération efficace entre l'État et le secteur privé. En ouvrant la voie à des projets d'envergure et à une gestion plus performante des infrastructures, elle inscrit le pays dans une dynamique de transformation accélérée et durable. Adoptée en juillet dernier par l’Assemblée nationale et promulguée deux mois après par le chef de l’État, la loi établit un cadre juridique renouvelé pour les Partenariats public-privé (Ppp) au Bénin. Une réforme saluée par Ludovic Guèdjè, secrétaire permanent de l'Autorité de régulation des marchés publics (Armp), qui en souligne les objectifs. En effet, la loi vise à pallier les insuffisances budgétaires de l'État en attirant des investissements privés dans des projets d'envergure et répondre aux défis liés à la complexité technique de certaines infrastructures. En 2017, le Bénin s'était déjà engagé dans cette réforme, intégrant les Délégations de service public (Dsp) au dispositif existant. Cependant, le bilan s'est avéré en deçà des attentes. « Les résultats obtenus ne correspondaient pas aux objectifs fixés. Le gouvernement a donc entrepris une refonte complète pour offrir un cadre plus clair et adapté aux besoins actuels», confie Ludovic Guèdjè. L'une des critiques majeures contre l'ancien dispositif portait sur l'imprécision du champ d'application et la faiblesse des procédures. La nouvelle loi y répond par une meilleure définition des concepts, comme les concessions d'aménagement ou les études d'impact environnemental, et par des processus renforcés pour garantir la transparence et l'efficacité. « La loi apporte des réformes significatives sur plusieurs aspects. Elle se distingue particulièrement par l'introduction de la société de projets comme innovation majeure », informe le secrétaire permanent de l’Armp. Au cœur donc de cette réforme, la création de la société de projets qui constitue une avancée notable. Désormais, chaque contrat Ppp devra être porté par une entité spécifique. « Cette société permettra à l'État de participer directement aux bénéfices générés, tout en rassurant les investisseurs sur la gestion et la gouvernance des projets », explique Ludovic Guèdjè. Cette structure assure également une meilleure répartition des risques entre les parties, renforçant ainsi la viabilité des projets sur le long

terme. 

Simplification des procédures

La loi a mis un accent particulier sur les études préalables pour évaluer les coûts et la viabilité des projets, tout en respectant les réglementations fiscales, sociales et environnementales. « Les études d'impact environnemental et social seront désormais obligatoires pour chaque projet », précise le secrétaire permanent de l'Armp. La préférence communautaire et la responsabilité sociétale des entreprises (Rse) sont renforcées pour garantir un développement inclusif et durable. Les règles de passation des Ppp suivent un processus rigoureux, incluant l'identification et la priorisation des projets. Un catalogue national des projets Ppp, validé par l'Assemblée nationale, sert de référence pour garantir une sélection transparente et cohérente.

« Ce catalogue assure que les projets ne sont pas choisis de manière arbitraire », explique Ludovic Guèdjè. La passation des Ppp peut se faire selon trois catégories : les procédures de droit commun (appels d'offres ouverts), les procédures dérogatoires et les procédures simplifiées. La simplification concerne surtout les Ppp de moindre valeur, offrant une exécution plus souple et adaptée. « L'innovation majeure est qu'il n'est plus nécessaire de respecter la complexité initiale prévue pour tous les types de Ppp », ajoute-t-il. Ainsi, pour stimuler les investissements, la loi simplifie les procédures pour les projets de moindre envergure ou d'urgence et autorise les offres spontanées, permettant aux opérateurs privés de proposer des solutions innovantes. Elle définit avec précision ces catégories de Ppp, comme ceux relatifs à la défense ou aux intérêts essentiels de l'État mis sous une procédure spécifique.

La nouvelle loi introduit des changements majeurs dans le cadre institutionnel des partenariats public-privé (Ppp). Désormais, l'ordonnateur du budget de l'autorité contractante est l'unique signataire des contrats Ppp, levant toute ambiguïté sur ce rôle. Les missions des principales instances, telles que la Direction nationale de contrôle des marchés publics (Dncmp) et l'Armp, sont élargies. Rebaptisée Autorité de régulation de la commande publique (Arcop), l'Armp aura des responsabilités élargies au-delà des marchés publics. La Cellule d'appui au partenariat public-privé soutient les autorités contractantes dans la préparation et l'exécution des projets, en conformité avec la loi. 

Innovation majeure

La nouvelle loi porte également une innovation majeure en matière de bouclage financier, assurant une rigueur accrue dans la mobilisation des ressources nécessaires à la réalisation des projets. « Avec la nouvelle loi, le bouclage financier est une innovation, car il est réalisé selon les modalités prévues dans les documents de la consultation », clarifie le secrétaire permanent. En clair, dès l'étape de consultation, les partenaires privés doivent préciser les modalités de financement, garantissant ainsi la faisabilité et la viabilité financière des projets. L'autorité contractante joue un rôle central en exigeant des engagements fermes de la part de l'attributaire provisoire. Cette exigence vise à éviter des projets dits “éléphants blancs”. Avant de débuter un projet, tous les aspects financiers dont les moyens disponibles, les montants nécessaires, la durée de financement et les résultats attendus doivent être clarifiés. La loi renforce également le contrôle sur les changements au sein des partenaires des projets. « Ce n'est pas possible de se lever pour dire que j'étais l'associé majoritaire hier, maintenant je veux transférer les actions pour que tel devienne propriétaire de la société », révèle Ludovic Guèdjè. Tout changement de contrôle ou substitution de partenaire doit être validé par l'autorité contractante. Ce mécanisme garantit que les projets restent conformes aux engagements initiaux et préservent les intérêts de l'État. Cette rigueur s'applique également aux éventuels transferts d'actions ou substitutions des titulaires de contrat. Ces opérations sont soumises à des conditions strictes, nécessitant l'accord préalable de l'autorité contractante, afin d'assurer la transparence et la continuité des projets. En définissant des mécanismes de contrôle rigoureux et des exigences financières claires, cette réforme marque un tournant dans la gestion des Ppp au Bénin. Elle vise à instaurer un partenariat gagnant-gagnant entre l'État et les investisseurs privés, tout en renforçant la transparence et en minimisant les risques financiers. Pour Ludovic Guèdjè, ces dispositions sont une réponse directe aux défis rencontrés dans les projets précédents, offrant ainsi un cadre juridique qui inspire confiance et efficacité.