La Nation Bénin...
La
loi 2024-30 du 23 juillet 2024, portant cadre juridique du Partenariat
public-privé (Ppp), marque un tournant dans la stratégie de développement des
infrastructures au Bénin. Avec des innovations majeures comme la création de la
société de projets, cette réforme ambitionne de rendre les Ppp plus efficaces
et attractifs.
La
nouvelle loi sur le partenariat public-privé révolutionne le modèle économique
du Bénin en établissant un cadre inédit pour une coopération efficace entre
l'État et le secteur privé. En ouvrant la voie à des projets d'envergure et à
une gestion plus performante des infrastructures, elle inscrit le pays dans une
dynamique de transformation accélérée et durable. Adoptée en juillet dernier
par l’Assemblée nationale et promulguée deux mois après par le chef de l’État,
la loi établit un cadre juridique renouvelé pour les Partenariats public-privé
(Ppp) au Bénin. Une réforme saluée par Ludovic Guèdjè, secrétaire permanent de
l'Autorité de régulation des marchés publics (Armp), qui en souligne les
objectifs. En effet, la loi vise à pallier les insuffisances budgétaires de
l'État en attirant des investissements privés dans des projets d'envergure et
répondre aux défis liés à la complexité technique de certaines infrastructures.
En 2017, le Bénin s'était déjà engagé dans cette réforme, intégrant les
Délégations de service public (Dsp) au dispositif existant. Cependant, le bilan
s'est avéré en deçà des attentes. « Les résultats obtenus ne correspondaient
pas aux objectifs fixés. Le gouvernement a donc entrepris une refonte complète
pour offrir un cadre plus clair et adapté aux besoins actuels», confie Ludovic
Guèdjè. L'une des critiques majeures contre l'ancien dispositif portait sur
l'imprécision du champ d'application et la faiblesse des procédures. La
nouvelle loi y répond par une meilleure définition des concepts, comme les
concessions d'aménagement ou les études d'impact environnemental, et par des
processus renforcés pour garantir la transparence et l'efficacité. « La loi
apporte des réformes significatives sur plusieurs aspects. Elle se distingue
particulièrement par l'introduction de la société de projets comme innovation
majeure », informe le secrétaire permanent de l’Armp. Au cœur donc de cette
réforme, la création de la société de projets qui constitue une avancée
notable. Désormais, chaque contrat Ppp devra être porté par une entité
spécifique. « Cette société permettra à l'État de participer directement aux
bénéfices générés, tout en rassurant les investisseurs sur la gestion et la
gouvernance des projets », explique Ludovic Guèdjè. Cette structure assure
également une meilleure répartition des risques entre les parties, renforçant ainsi
la viabilité des projets sur le long
terme.
Simplification des procédures
La
loi a mis un accent particulier sur les études préalables pour évaluer les
coûts et la viabilité des projets, tout en respectant les réglementations
fiscales, sociales et environnementales. « Les études d'impact environnemental
et social seront désormais obligatoires pour chaque projet », précise le
secrétaire permanent de l'Armp. La préférence communautaire et la
responsabilité sociétale des entreprises (Rse) sont renforcées pour garantir un
développement inclusif et durable. Les règles de passation des Ppp suivent un
processus rigoureux, incluant l'identification et la priorisation des projets.
Un catalogue national des projets Ppp, validé par l'Assemblée nationale, sert
de référence pour garantir une sélection transparente et cohérente.
«
Ce catalogue assure que les projets ne sont pas choisis de manière arbitraire
», explique Ludovic Guèdjè. La passation des Ppp peut se faire selon trois
catégories : les procédures de droit commun (appels d'offres ouverts), les
procédures dérogatoires et les procédures simplifiées. La simplification
concerne surtout les Ppp de moindre valeur, offrant une exécution plus souple
et adaptée. « L'innovation majeure est qu'il n'est plus nécessaire de respecter
la complexité initiale prévue pour tous les types de Ppp », ajoute-t-il. Ainsi,
pour stimuler les investissements, la loi simplifie les procédures pour les
projets de moindre envergure ou d'urgence et autorise les offres spontanées, permettant
aux opérateurs privés de proposer des solutions innovantes. Elle définit avec
précision ces catégories de Ppp, comme ceux relatifs à la défense ou aux
intérêts essentiels de l'État mis sous une procédure spécifique.
La
nouvelle loi introduit des changements majeurs dans le cadre institutionnel des
partenariats public-privé (Ppp). Désormais, l'ordonnateur du budget de
l'autorité contractante est l'unique signataire des contrats Ppp, levant toute
ambiguïté sur ce rôle. Les missions des principales instances, telles que la
Direction nationale de contrôle des marchés publics (Dncmp) et l'Armp, sont
élargies. Rebaptisée Autorité de régulation de la commande publique (Arcop),
l'Armp aura des responsabilités élargies au-delà des marchés publics. La Cellule
d'appui au partenariat public-privé soutient les autorités contractantes dans
la préparation et l'exécution des projets, en conformité avec la loi.
Innovation majeure
La nouvelle loi porte également une innovation majeure en matière de bouclage financier, assurant une rigueur accrue dans la mobilisation des ressources nécessaires à la réalisation des projets. « Avec la nouvelle loi, le bouclage financier est une innovation, car il est réalisé selon les modalités prévues dans les documents de la consultation », clarifie le secrétaire permanent. En clair, dès l'étape de consultation, les partenaires privés doivent préciser les modalités de financement, garantissant ainsi la faisabilité et la viabilité financière des projets. L'autorité contractante joue un rôle central en exigeant des engagements fermes de la part de l'attributaire provisoire. Cette exigence vise à éviter des projets dits “éléphants blancs”. Avant de débuter un projet, tous les aspects financiers dont les moyens disponibles, les montants nécessaires, la durée de financement et les résultats attendus doivent être clarifiés. La loi renforce également le contrôle sur les changements au sein des partenaires des projets. « Ce n'est pas possible de se lever pour dire que j'étais l'associé majoritaire hier, maintenant je veux transférer les actions pour que tel devienne propriétaire de la société », révèle Ludovic Guèdjè. Tout changement de contrôle ou substitution de partenaire doit être validé par l'autorité contractante. Ce mécanisme garantit que les projets restent conformes aux engagements initiaux et préservent les intérêts de l'État. Cette rigueur s'applique également aux éventuels transferts d'actions ou substitutions des titulaires de contrat. Ces opérations sont soumises à des conditions strictes, nécessitant l'accord préalable de l'autorité contractante, afin d'assurer la transparence et la continuité des projets. En définissant des mécanismes de contrôle rigoureux et des exigences financières claires, cette réforme marque un tournant dans la gestion des Ppp au Bénin. Elle vise à instaurer un partenariat gagnant-gagnant entre l'État et les investisseurs privés, tout en renforçant la transparence et en minimisant les risques financiers. Pour Ludovic Guèdjè, ces dispositions sont une réponse directe aux défis rencontrés dans les projets précédents, offrant ainsi un cadre juridique qui inspire confiance et efficacité.