La Nation Bénin...
De
plus en plus sollicitée, la dette intérieure pèse lourdement sur les finances
publiques dans l’Uemoa sans produire de retombées économiques significatives,
selon une étude récente. Contrairement aux idées reçues, elle se révèle plus
nocive que la dette extérieure, appelant à une gestion rigoureuse et à un
meilleur ciblage des investissements.
La
dette publique ne favorise pas les soldes primaires dans les pays de l’Union
économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa), selon une étude publiée dans
la Revue d’analyse des politiques économiques et financières (Rapef, volume 7,
numéro 1, juin 2024). L’analyse conduite par Fabrice Y. Oyo Badolo (Université
Norbert Zongo, Burkina Faso), Marc Raffinot (Université Paris Dauphine) et
Fangassé Mahamadou Diarra (Université Norbert Zongo), s’appuie sur des données
couvrant la période 2006-2020. Elle montre que l’accumulation de dette publique
détériore significativement le solde primaire des pays de l’Union, c’est-à-dire
le solde budgétaire avant paiement des intérêts de la dette.
Plus inquiétant, les chercheurs révèlent que la dette intérieure dégrade davantage ce solde que la dette extérieure. Les résultats indiquent que l’effet négatif de la dette intérieure sur le solde primaire est supérieur à celui de la dette extérieure, et que ni l’une ni l’autre n’a d’effet significatif et robuste sur le solde global. Concrètement, une hausse d’un point de produit intérieur brut (Pib) de la dette intérieure entraîne une dégradation de 0,05 point du solde primaire, contre 0,016 point pour la dette extérieure. Par ailleurs, les intérêts sur la dette extérieure affectent négativement le solde primaire, tandis que ceux de la dette intérieure pèsent davantage sur le solde global.
Effets pervers
Si
l’impact global de la dette publique sur le solde budgétaire (incluant dons et
intérêts) n’est pas significatif, la ventilation selon l’origine de la dette
révèle des dynamiques préoccupantes. Les chercheurs expliquent cela par les
externalités positives associées à la dette extérieure. En tant que source de
devises, elle facilite l’importation de biens d’équipement et stimule les
investissements productifs. En revanche, la dette intérieure génère moins de
recettes fiscales et d’effets d’entraînement bénéfiques.
Au
vu des résultats, les politiques économiques les plus pertinentes passent par
un encadrement rigoureux de l’endettement public, notamment la dette
intérieure, et par l’orientation des emprunts vers des secteurs porteurs
susceptibles de générer des recettes. L’intervention sur le marché régional de
la dette intérieure doit donc se faire avec prudence, préviennent les auteurs.
Ils invitent les Etats de l’Union à privilégier le financement extérieur, à
condition de maîtriser l’endettement global. Ils recommandent aussi une
meilleure gestion budgétaire, via des règles fiscales strictes (plafonds de
dépenses, cibles de déficit) et un renforcement de la mobilisation des
recettes.
L’étude insiste enfin sur la nécessité d’investir la dette dans des projets productifs, seuls capables de générer des ressources budgétaires futures. La croissance du Pib améliore le solde budgétaire, mais la qualité actuelle de la gestion budgétaire n’a pas d’effet significatif, soulignent les chercheurs, pointant une faiblesse structurelle dans la gouvernance financière.