La Nation Bénin...
Si
l’octroi de crédits progresse à un rythme soutenu, l’épargne collectée accuse
un net recul de 7 % à fin 2024 au Bénin. Un paradoxe qui met en lumière les
défis structurels que doivent relever les Systèmes financiers décentralisés du
pays.
Le
Bénin est l’un des deux pays de l’Union monétaire ouest-africaine (Umoa), avec
le Togo, à enregistrer une baisse de l’encours des dépôts collectés par les
institutions de microfinance à fin 2024. Au quatrième trimestre de l’année, les
dépôts chutent de 13,9 milliards F Cfa, soit une contraction de 7,0 % par
rapport au trimestre précédent, indique la Note sur la Situation de la
microfinance dans l'Umoa au 31 décembre 2024. Cette tendance contraste
fortement avec les hausses observées dans des pays comme la Côte d’Ivoire (+3,6
%) ou le Sénégal (+2,9 %).
Ce
recul pourrait être lié à plusieurs facteurs comme la défiance des usagers, la
concurrence accrue des établissements bancaires classiques, ou encore la
fragilité de certaines institutions. Trois systèmes financiers décentralisés
(Sfd) à savoir Femmes solidaires pour la promotion et le développement
(Fesprod), Action pour le financement, le développement, l’environnement et la
vie (Fidevie) et Solidarité et Paix/Crédit populaire du Bénin (Sp/Cpb), ont
d’ailleurs perdu leur agrément au cours du quatrième trimestre 2024, un signal
d’alerte quant à la solidité du tissu microfinancier national.
En
revanche, le Bénin se distingue positivement par la vigueur de son activité de
crédit. L’encours des prêts octroyés par les Sfd y a bondi de 18,4 milliards F
Cfa, soit une croissance de 7,7 % sur le trimestre, l’un des meilleurs taux de
l’Union, d’après les chiffres de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de
l’Ouest (Bceao). Cette performance dépasse largement la moyenne de l’Umoa (+5,0
%).
Contraste sous-régional
Le secteur de la microfinance demeure en expansion dans l’Umoa, avec 19,1 millions de clients et 4 761 points de service. Les dépôts y atteignent 2 459 milliards F Cfa, soit une hausse de 8,1 % en glissement annuel, et les crédits sont chiffrés à 2 695,2 milliards F Cfa, en hausse de 5,3 %. Les crédits accordés dans l’Union sont principalement de court terme: 51,2 %, avec une répartition relativement équilibrée entre les hommes (52,6 %), les femmes (19,2 %) et les groupements (28,2 %). Le montant moyen des crédits par client atteint 140 949 F Cfa, en hausse de 3,0 % sur le trimestre.
Toutefois,
cette croissance s’accompagne d’une fragilité persistante en matière de gestion
du risque de crédit. L’épargne mobilisée par les Sfd ne représente que 5,2 % de
celle collectée par les établissements de crédit classiques, et les crédits
octroyés par les Sfd ne pèsent que 7,3 % de l’encours global de crédit dans
l’Union, malgré leur rôle crucial dans l’inclusion financière.
Malgré
la dynamique du crédit, la qualité du portefeuille reste un point d’attention.
Le taux brut de dégradation du portefeuille de crédits des Sfd de l’Umoa est
passé de 10,5 % à 8,9 %, mais reste largement au-dessus de la norme de 3,0 %
définie par la Bceao. En glissement annuel, ce taux est même en dégradation par
rapport à décembre 2023 où il était de 6,9 %.
L’avenir du secteur passera nécessairement par une professionnalisation renforcée des Sfd, une meilleure régulation, et une adaptation plus fine aux besoins des populations.