La Nation Bénin...
Cotonou
abrite, depuis ce jeudi 22 mai, un atelier de haut niveau autour de
l’initiative G20 Compact with Africa (CwA). Organisé sur trois jours, cet événement
vise à renforcer la mobilisation des ressources intérieures dans les pays
africains signataires du Pacte. L’initiative, soutenue par le Centre africain
pour la transformation économique (Acet), le gouvernement béninois, la Banque
mondiale, la Banque africaine de développement (Bad) et d’autres partenaires,
constitue une plateforme d’échange d’expériences, de bonnes pratiques et de
stratégies concrètes en matière de financement du développement local.
Sept
ans après la conférence d’Accra, les pays d’Afrique subsaharienne, en
particulier ceux de l’Afrique centrale, continuent de faire face à des défis
récurrents dans la gestion des finances publiques : systèmes fiscaux inefficaces, mise en œuvre
fragmentaire des politiques, et coordination limitée entre acteurs nationaux et
internationaux. Le rendez-vous de Cotonou se veut une réponse collective et
proactive à ces enjeux structurels. Il s’agit d’évaluer les progrès réalisés
depuis les engagements pris en 2018, notamment dans la gestion des risques de
catastrophes, mais surtout d’identifier les défis actuels et les opportunités
pour améliorer la résilience économique à travers une meilleure mobilisation
des ressources intérieures. L’objectif est de réduire la dépendance des pays
africains aux financements extérieurs et renforcer leur autonomie budgétaire.
Mamadou
Tanou Balde, représentant de la Banque mondiale au Bénin, salue les réformes
entreprises par le Bénin depuis 2016. Il note qu’à travers la modernisation de
l’administration fiscale, la digitalisation et la simplification des
procédures, le pays a su inverser une tendance inquiétante. De 11,1 % du Pib en
2016, les recettes fiscales ont atteint environ 15 % en 2024, malgré une baisse
progressive de l’aide publique au développement (passée de 0,8 % à 0,4 % du
Pib). Ces résultats, à l’en croire, ont permis au Bénin de faire face aux chocs
externes majeurs comme la pandémie de Covid-19, la flambée des prix en 2022 et
les tensions sécuritaires régionales.
Par
ailleurs, le taux de croissance économique du pays reste l’un des plus élevés
de la région sur la période 2020-2024. Toutefois, le représentant de la Banque
mondiale a souligné que des efforts restent à fournir pour atteindre la moyenne
africaine (15 %) et viser à terme un taux de mobilisation de 20 % du Pib. Il a
aussi insisté sur la nécessité d’élargir la base fiscale en luttant contre
l’informalité et en mobilisant davantage l’épargne nationale.
Andreas
Beckermann, chef de la Coopération allemande au Bénin, a rappelé les fondements
du Compact with Africa, lancé en 2017 par l’Allemagne et l’Afrique du Sud. Ce
pacte repose sur deux piliers à savoir : la mobilisation des ressources
domestiques et la promotion de l’investissement privé. Il note que l’Allemagne
privilégie un soutien indirect via des partenariats avec des institutions
internationales comme la Société financière internationale (Ifc) et les banques
de développement. L’objectif est de créer un environnement de confiance,
propice aux investissements durables. « Elle intervient notamment au Bénin à
travers la Giz et le programme "Réforme", avec un accent mis sur les
priorités définies par l’administration béninoise elle-même », fait-il savoir.
Ce soutien, d’après lui, s’inscrit aussi dans une vision régionale. La coopération
inter-étatique à travers des plateformes comme l’Afritac (appuyée par le Fmi)
est encouragée afin de mutualiser les expériences et les bonnes pratiques en
matière de politique économique et fiscale.
Un appel à l’innovation
Au
nom du ministre d’État chargé de l’Économie et des Finances du Bénin, la
ministre de l’Industrie et du Commerce, Shadiya Assouman, met l’accent sur l’importance d’une mobilisation accrue des
ressources domestiques dans le contexte actuel. Pour elle, les défis auxquels
les pays africains sont confrontés, qu’ils soient économiques, sociaux ou
environnementaux, imposent des réponses coordonnées, novatrices et audacieuses.
Elle souligne que l’un des grands enjeux est de créer un système fiscal plus
équitable et plus performant. Cela passe par le renforcement des capacités
administratives, la lutte contre l’évasion fiscale, et l’implication accrue du
secteur privé. Les partenariats public-privé, l’ouverture à l’épargne nationale
et les innovations financières sont autant de pistes à explorer. La ministre a
exhorté les participants à saisir cette opportunité d’échanges pour s’inspirer
des expériences de leurs homologues et adapter des solutions concrètes à leurs
contextes nationaux. Elle a également exprimé sa gratitude envers les pays du
G20 et les partenaires techniques et financiers pour leur soutien constant.
L’atelier de Cotonou ne se limite pas à un simple partage d’expériences. Il s’inscrit dans une dynamique stratégique plus large qui est celle de construire, avec les pays africains, des économies résilientes, souveraines et capables de financer leur propre développement. La Banque mondiale, à travers son nouveau cadre de partenariat en cours de finalisation, promet un accompagnement sur dix ans, avec un accent particulier sur la mobilisation des ressources, l’implication du secteur privé, et la promotion de politiques publiques durables. Cette vision est également partagée par les autres partenaires techniques et financiers présents. Le G20 Compact with Africa est désormais bien plus qu’une initiative multilatérale. Il devient une plateforme concrète d’actions et de réformes pour un continent en quête d’autonomie économique, de stabilité budgétaire et de croissance inclusive.