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Services publics en Afrique: Le degré des défis à relever

Economie
L’indice de fourniture des services publics 2024 L’indice de fourniture des services publics 2024

Avec un score moyen continental de 45,39/100, la qualité des services essentiels dans les pays africains reste largement en deçà des attentes. Ce diagnostic, basé sur 100 indicateurs et une enquête de perception, met en lumière les forces, faiblesses et perspectives d’amélioration pour les États africains.

Par   Babylas ATINKPAHOUN, le 10 juin 2025 à 08h04 Durée 3 min.
#Services publics en Afrique #Afrique

La Banque africaine de développement (Bad) vient de publier le rapport 2024 sur l’Indice de fourniture des services publics en Afrique (Psdi), un outil de diagnostic qui mesure la performance des pays en matière de services dans cinq secteurs clés, notamment l’énergie, la souveraineté alimentaire, l’inclusion socioéconomique, l’intégration régionale et l’industrialisation. Le constat est qu’avec une moyenne de 45,39/100, les services publics en Afrique demeurent peu performants, malgré quelques progrès isolés. L’écart de performance de plus de 54 points sur 100 montre l’ampleur du chemin à parcourir. Trois secteurs tirent les résultats vers le bas. Il s’agit de l’industrialisation (40,19), la souveraineté alimentaire (44,05) et l’intégration régionale (44,65). L’énergie (52,99) et l’inclusion socioéconomique (48,61) s’en sortent légèrement mieux, mais restent insuffisantes pour garantir une amélioration significative de la qualité de vie des citoyens. Le rapport intègre également des scores de perception, recueillis auprès des ménages, qui confirment une insatisfaction modérée à forte vis-à-vis des services reçus dans la majorité des pays. L’analyse par pays révèle de fortes disparités. En tête du classement, on retrouve Maurice, l’Égypte, l’Afrique du Sud, le Sénégal, le Ghana et le Maroc. Ces économies présentent toutefois des résultats hétérogènes selon les secteurs. Maurice par exemple, premier au classement général, chute au 20ᵉ rang pour l’énergie et au 13ᵉ pour l’alimentation. L’Égypte, 2ᵉ, excelle dans l’énergie mais reste en retrait sur l’inclusion et la souveraineté alimentaire. Les Seychelles brillent dans les services sociaux, mais peinent sur la sécurité alimentaire. À l’inverse, les pays les moins bien classés, pour la plupart situés en Afrique centrale et orientale enregistrent des scores faibles dans presque tous les domaines.

Zoom sur les secteurs 

Dans le secteur de l’énergie et électricité, l’Égypte domine grâce à une forte production d’électricité renouvelable. Toutefois, de nombreux pays comme le Kenya ou la Zambie peinent à transformer cette production en accès effectif pour les populations, à cause d’un manque de connectivité. Le cadre réglementaire reste également un défi, avec peu de régulateurs indépendants. Concernant la souveraineté alimentaire, les performances sont quelque peu décevantes. Le sous-secteur du développement de la chaîne de valeur agricole obtient un score médian inférieur à 40. La sécurité alimentaire demeure un enjeu crucial, encore aggravé par les effets du changement climatique et les conflits. Malgré quelques avancées en matière d’emploi des jeunes et de formation concernant l’inclusion socioéconomique, les scores dans les sous-secteurs relatifs à la pauvreté, l’égalité des genres, la santé ou l’eau potable restent faibles. Ce qui compromet les efforts d’autonomisation et de résilience des populations. Dans le secteur de l’intégration régionale, l’Afrique du Sud tire son épingle du jeu, mais la liberté de circulation reste très limitée. Seuls quatre pays ont ratifié le protocole de libre circulation des personnes. Les Seychelles, Maurice et le Cap-Vert se distinguent toutefois par leur bonne connectivité. Et enfin, le secteur de l’industrialisation qui est le talon d’Achille du continent. Le sous-secteur des infrastructures industrielles affiche un score médian de 25,01, le plus bas de tout l’indice. Le rapport révèle que seuls quelques pays comme Maurice, l’Égypte et l’Afrique du Sud ont investi dans des zones industrielles performantes.

Au-delà du classement, le Psdi se veut un outil de pilotage. Il permet à chaque pays d’identifier ses points faibles et de s’inspirer des meilleures pratiques de ses pairs. L’objectif n’est pas de créer une compétition, mais d’inciter à l’amélioration continue. Le rapport met également en lumière les marges de progression les plus importantes que sont l’amélioration des infrastructures industrielles (écart de 71 points), la chaîne de valeur agricole (69), la liberté de circulation (62) ou l’éradication de la pauvreté (60). L’Afrique dispose d’un fort potentiel pour améliorer la qualité de ses services publics, mais la mise en œuvre reste lente et inégale. Le Psdi 2024 souligne l’urgence d’accélérer les réformes structurelles et les investissements ciblés, dans une logique de transparence, de redevabilité et d’équité. La voix des citoyens, exprimée dans les scores de perception, ne doit pas être ignorée. Elle rappelle que les services publics ne se mesurent pas seulement en chiffres, mais dans la réalité quotidienne de millions d’Africains.