Impacts du Covid-19: Des risques de décrochage scolaire ?
Société
Par
Maryse ASSOGBADJO, le 11 mai 2020
à
09h33
L’école béninoise, temporairement fermée depuis le 30 mars en raison de la crise sanitaire mondiale rouvre ses portes ce lundi 11 mai. Le séjour forcé à la maison des apprenants est-il de nature à favoriser un taux de décrochage important à la réouverture des classes prévue pour ce lundi 11 mai au Bénin pour certains élèves ?
En dehors des apprenants de la maternelle et du CI au Cm1 maintenus à la maison, l’école béninoise accueillera-t-elle tous ses apprenants du Cm2 et du secondaire à la réouverture des classes prévue pour ce 11 mai ? Des spécialistes en Sciences de l’éducation craignent que certains apprenants ne reprennent les classes en raison de la pandémie actuelle qui secoue le monde.
Fifamè G., âgée de 15 ans, a pris goût au commerce de masques. A l’en croire, elle ne perd rien cette année si elle ne retourne pas à l’école.
«Pour certains enfants, les congés prolongés marquent l’arrêt ou la restriction des activités pédagogiques », souligne Bidossèssi Auguste Land Gnahoui, psychologue et spécialiste des Sciences de l’éducation.
Faisant part de ses observations de terrain, le psychopédagogue renchérit : « Nombreux sont ces apprenants qui sont déjà au village et qui s’adonnent au défrichage pour les prochaines semences ».
Ce phénomène pourrait créer des disparités selon les régions. « Dans l’Alibori, le décrochage scolaire est très important parce que pendant les situations de crise, les enfants s’adonnent à des activités champêtres dans cette localité et cela leur procure de petits sous. Idem pour d’autres départements agricoles tels que le Plateau et le Couffo. Beaucoup pourraient ne plus retourner à l’école à la reprise des classes parce qu’ils pensent que les petites sommes d’argent qu’ils réunissent leur suffisent déjà ».
C’est une illusion, analyse Thierry Dovonou, secrétaire général du Syndicat national des professeurs permanents et contractuels du Bénin :
« Comme ils font de petits bénéfices, ils pensent être déjà riches et ne songent plus aux études ».
Amorcer une sensibilisation
Les idées que les enfants se font de la suspension des activités pédagogiques due au Covid-19 peuvent être à la base du décrochage scolaire et développer en eux, « un état de stress, d’anxiété et d’angoisse, de découragement et de perte d’intérêt pour l’école. A cela s’ajoute le poids psychologique qu’a causé la pandémie au niveau des apprenants »,
analyse Bidossèssi Auguste Land Gnahoui.
Mieux, le décrochage scolaire peut être également le fait des parents. « Nous pourrions observer une résistance des parents qui ne sont pas sûrs des dispositions prises par des écoles en ce qui concerne les mesures barrières », appréhende-t-il.
Selon lui, l’Etat et les parents ont la responsabilité d’assurer une continuité éducative.
« Il va falloir que l’Etat prenne les dispositions pour amorcer une sensibilisation avec le concours des médias et des crieurs publics », ajoute le psychologue qui insiste également sur la synergie d’actions des collectivités locales et des éducateurs en vue d’informer et de sensibiliser les populations pour une reprise effective des classes de tous les apprenants.
Pour motiver les parents, il pense que l’Exécutif doit prendre des décisions fortes et convaincantes en ce qui concerne le respect des mesures barrières à l’école et la formation des enseignants durant cette période sensible.
C’est aussi la position de Thierry Dovonou qui préconise l’implication des élus locaux à travers des sensibilisations au profit des populations afin de réduire le taux de décrochage scolaire à la reprise des cours.