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Pour tentative d’assassinat et incendie volontaire :Sossou Amessinko condamné à 10 ans de travaux forcés (26e dossier)

Société
Par   Didier Pascal DOGUE, le 10 avr. 2015 à 07h33

Les débats portant sur l’examen du 26e dossier inscrit au rôle de la Cour d’assises de la Cour d’appel de Cotonou se sont déroulés, mercredi 8 avril dernier. Ils ont été conduits par Michèle Odette Carrena-Adossou, présidente et dans le rôle d’assesseurs, Georges Toumatou et Célestine Bakpé. Les jurés titulaires avaient noms, Léopold Pascal Marcellin Bada, Dotou Désiré Gbedehessi, Mariette Ahouansou, Louise Olympiade Hounmènou et Léandre Alohou. Le ministère public était représenté par Honoré Alowakinnou et la mémoire de l’audience était tenue par Edouard Zavonon.

La jalousie et la vengeance ont largement plané sur les débats du 26e dossier de la Cour d’assises, mercredi dernier. Deux amis aiment la même femme et se la disputent au point où l’un d’eux en a voulu à l’autre et a incendié nuitamment la maison qui abritait son rival et son amante. Les faits se sont déroulés en 2008 à Agoué dans la commune de Grand-Popo.

Que s'est-il passé ?

En effet, Sossou Amessinko et Boni Amèkoudji vivant tous deux dans l’arrondissement d’Agoué (commune de Grand-Popo) courtisent la même femme, la nommée Adinsi Allowanou. Cette dernière a finalement porté son choix sur Boni Amèkoudji.
Mécontent et décidé à se venger des deux amoureux, Sossou Amessinko a, dans la nuit du 30 novembre au 1er décembre 2008, mis le feu à la case dans laquelle se trouvaient les deux fiancés et ceci à l’aide d’essence et d’allumettes qu’il a pris soin d’acheter à cette fin. Boni Amèkoudji et Adinsi Allowanou n’ont eu la vie sauve que grâce au secours porté par la population alertée.
Dans la même nuit, les amoureux Boni Amèkoudji et Adinsi Allowanou qui ont trouvé refuge dans une autre case, y ont été surpris une seconde fois par un incendie. Cette fois encore, la vigilance et la promptitude de la population ont permis de les sauver. Interpellé et inculpé de tentative d’assassinat et d’incendie volontaire, Sossou Amessinko reconnaît les faits même si à l’interrogatoire au fond, il nie être l’auteur du second incendie.
Le bulletin N°1 de son casier judiciaire ne porte mention d’aucune condamnation. L’enquête de moralité lui est plus ou moins favorable.

Sossou l'amoureux

A la barre, l’accusé Sossou Amessinko a reconnu les premiers faits d’incendie qui lui sont reprochés. Mais pour les 2es, il n’en reconnaît la responsabilité. Le feu aurait pu être propagé par le vent qui a soulevé la braise du foyer d’une vendeuse de pâte fermentée (communément appelée Konhoun) et l’a envoyé par mégarde sur ce toit. Pour lui, il était en amitié avec Adinsi Allowanou depuis environ deux mois et n’a nullement digéré que son amante qu’il déclare bien entretenir, s’accoquine avec son rival. Il a confié qu’il l’aime vraiment et qu’il pourvoit à tous ses besoins.
En ce qui le concerne, Boni Amèkoudji, l’amant de la femme, il ne se constitue pas partie civile. Pour lui, il y a eu deux semaines d’amitié entre la fille et lui. Il a confié que c’est lui qui rendait plutôt visite à Sossou Amessinko et non l’inverse. L’accusé ne le fréquentait pas.
La lecture des pièces du dossier a permis à la présidente de la cour, Michèle Odette Carrena-Adossou de donner la parole au ministère public pour ses réquisitions.

La vengeance, jalousie meurtrière

Pour Honoré Alowakinnou, citant André Malraux, «La vengeance est douce à tous les cœurs transis, il leur en faut une...». Sossou Amessinko, rappelle-t-il, a voulu se venger. Le voilà, a-t-il confié, devant votre cour. Tout est parti, selon lui, d’une aventure amoureuse qui a suscité une jalousie meurtrière. Pour lui, les deux rivaux vivaient à Ayiguinnou, arrondissement d'Agoué, commune de Grand-Popo. Le cœur d’Adinsi Allowanou battait beaucoup plus pour Boni Amèkoudji. Armé d’un bidon contenant de l’essence et d’une boîte d'allumettes, poursuit-il, il a mis le feu à leur demeure. Il reconnait vouloir leur faire du mal ; il dit vouloir leur occasionner des blessures. Lors de l’interrogatoire au fond, il a confirmé ses propos, rappelle le ministère public.
Pour le deuxième incendie, il déclare que le feu serait venu du foyer de la vendeuse de pâte fermentée (konhoun). L’accusé, selon Honoré Alowakinnou, a soigneusement préparé son crime. Il a choisi d’attenter à la vie de son ami et de celle de leur amante commune. Il y a eu des actes préparatoires, relève le ministère public. Il n’en veut pour preuve que l’essence et l’allumette soigneusement apprêtées, a souligné le ministère public. Il ne s’est pas arrêté là, reconnaît-il encore, car il est passé à l’acte en mettant le feu. Il savait que son rival était couché avec Adinsi Allowanou. Partant donc de ces éléments constants du dossier, Honoré Alowakinnou a déduit que le crime d’incendie est constitué. Et pour lui, l’accusé Sossou Amessinko savait que des gens étaient couchés et a décidé de commettre un homicide volontaire sur eux. Il y a donc tentative d’assassinat et l’infraction d’incendie est établie en tous ses éléments constitutifs.
Parce que le casier judiciaire de Sossou Amessinko est vierge et qu’il n’est pas en état de démence au moment des faits, le ministère public a retenu qu’il est bien accessible à la sanction pénale et a requis de le condamner à 15 ans de travaux forcés et aux dépens, et ce serait justice, a-t-il retenu.
Prenant le contre-pied des réquisitions, Me Magloire Yansunnou l’avocat de la défense a expliqué que son client est un homme ordinaire alors qu’on le décrit comme un monstre. Les hommes sont généralement très jaloux. Ainsi, tous les hommes nourrissent ce sentiment et il trouve que c’est normal. « Tous les hommes nourrissent cette haine ; les femmes ne savent pas », explique-t-il.
Comme tout homme normal qui aime, il ne supporte pas de voir son rival et celle qu'il aime, se coucher ensemble. Il a donc entrepris de faire ce qu’il a fait, justifie-t-il. A suivre Me Magloire Yansunnou, le feu se propage souvent vite dans ces milieux; c’est un endroit que je connais bien ; l’on ne peut pas partir du feu de la 2e case pour dire qu’il veut assassiner ; quand la case du voisin est en feu, vous avez intérêt à l’éteindre, rappelle-t-il. «On l’a battu, il a subi des sévices de sorte que lorsqu’il était libre, il a dit la vérité. Il n’y avait pas de préméditation ; il aurait pu empoisonner puisque celui-là était son ami ; il n’y a aucune préméditation», observe la défense pour qui le ministère public ne l’a pas démontré.
Par contre, il y a eu, selon lui, incendie volontaire, il y a eu passion; obnubilé et subjugué par la passion, il n’a pu se retenir. Il faut diminuer sa peine, suggère la défense. «C’est un homme ordinaire », relève Me Magloire Yansunnou. «Vous n’avez aucun intérêt à le maintenir en détention», fait-il observer avant d’ajouter qu’il a déjà fait 4 ans. «Un an en plus et ce serait bien pour la répression ; c’est un enfant unique, essayez de ne pas l’éloigner afin qu’il s’occupe de sa mère et ce serait justice», conseille l’avocat.
Après délibérations, la cour l’a reconnu coupable des infractions mises à sa charge et l’a condamné à 10 ans de travaux forcés. Il retourne donc en prison pour environ un peu plus de 4 ans.