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L’amazone Tata Adjatchè: Le récit d’une histoire d’amour interdite

Culture
Tata Adjatchè Tata Adjatchè

L’histoire du Danxomè se conte à la lumière de la bravoure de femmes, exceptionnelles combattantes, que la croyance populaire avait classées au rang de “demi-divinités”. Tiburce Adagbè, journaliste, communicant, écrivain passionné d’histoire, retourne sur les traces du corps d’élite des femmes guerrières à travers “Tata Adjatchè, sukpo ma xa awinyan’’, une bande dessinée qui retrace l’épopée d’une jeune amazone d’origine xoli jusqu’alors inconnue, ayant servi sous le roi Glèlè.   

Par   Lhys DEGLA, le 09 août 2024 à 09h18 Durée 3 min.
#culture #littérature

Tata Adjatchê, du nom de “Rikè” était une jeune captive de guerre Xoli, confiée aux soins du corps militaire féminin à la cour du Roi Glèlè où elle grandira, élevée comme une guerrière sans pitié. Rikè était devenue une amazone aguerrie qui avait, aux côtés de ses pairs, remporté bien de batailles.

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“Les femmes amazones n’étaient pas uniquement des “fon” comme bon nombre le croient. Ces femmes venaient de différentes ethnies (Kotokoli, watchi, popo, aïzo, etc) et prêtaient allégeance au roi jusqu’à leur mort”, explique l’auteur. La mythique “Tassi Hangbè”, sœur jumelle du roi Akaba, pionnière de l’armée des amazones, a posé les bases de l’émancipation des femmes et leur avait accordé une place de choix pendant ses trois années de règne. Malheureusement, la trace des amazones disparaîtra sous le règne d’Agadja mais refera surface avec l’accession au trône de Ghézo. Après une consultation du fà, ce dernier recevra la révélation qu’il lui faudra compter avec les femmes pour réussir son règne. En 1818, il restructure, réorganise et militarise le corps des amazones, caractérisé par une discipline à toute épreuve.

Tata Adjatchè est, selon Tiburce Adagbè, l’histoire d’une rédemption au cœur du Dahomey, l’histoire d’un amour défendu qui prédit la mort. A l’époque, le corps des amazones était considéré comme une caste mystique, qu’on ne voyait ni n’approchait n’importe comment et qui avait des règles de vie strictes notamment l’interdiction de se marier et d’avoir une vie de famille. L’histoire raconte que l'amazone était même interdite de sexualité.

Rikè qui deviendra plus tard Tata Adjatchè, était brave et tuait même à mains nues sur le champ de bataille. Le roi Glèlè était si impressionné par ses prouesses et sa témérité qu’il en tomba éperdument amoureux. Un amour interdit qui portera du fruit. Une amazone ne devrait jamais tomber enceinte. Rikè devait donc mourir, exécutée pour avoir brisé les règles préétablies. Ployant sous les coups de fouet, elle refusera de dénoncer l’auteur de l’acte et préféra mourir seule, puisque, de toutes les manières, elle avait déjà fait don de sa vie: “Servir le royaume et mourir pour le roi”.

Mais fort heureusement, l’histoire se refuse à prendre une tournure si mélodramatique. Le roi, l’amoureux inconnu, intervient et demande qu’on la libère parce qu’il était celui qui avait “ensemencé le champ de Rikè”. Le roi avait parlé. Elle fut libérée et devint épouse du roi et vécut au palais durant plusieurs décennies. L’ethnologue et historien Paul Hazoumè eut l’honneur de la rencontrer et de l’interviewer en 1920. Il fera mention d’elle dans son ouvrage “Le pacte du sang au Dahomey”. Avant l’écriture de “Tata Adjatchè”, Tiburce Adagbè a recouru à une riche documentation scientifique et historique dont l’ouvrage susmentionné. L’œuvre littéraire est donc basée sur des faits avérés quoique romancés par endroits. Un récit unique, dynamique, passionnant, accessible à tout type de lectorat. Produit du 9e art, la bande dessinée de 80 pages est illustrée par Kenneth Vihotogbé, l’une des figures prometteuses du milieu de la BD au Bénin. L’auteur, promoteur du Déchaîné Du Jeudi, Tiburce Tolidji Adagbè n’en est pas à son premier coup. Après ‘’Mémoire de chaudron’’, un best-seller à succès au Bénin et ailleurs, il récidive et force l’admiration à travers un genre littéraire plus décalé mais captivant de par l’imaginaire qu’il éveille chez le lecteur.

Tata Adjatchè est un symbole fort de l’unité nationale qui nous enseigne à nouveau, l’esprit patriotique, l’abnégation et l’amour du bien public. Un livre à lire par tous les enfants du Bénin