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Atteinte des Objectifs de développement durable: Progrès et voie à suivre

Economie
Antonio Pedro sonne la mobilisation pour l’atteinte des Objectifs de développement durable Antonio Pedro sonne la mobilisation pour l’atteinte des Objectifs de développement durable

Face à une jeunesse nombreuse mais sous-employée, à des économies encore trop dépendantes des matières premières et à une intégration régionale inachevée, le continent africain doit accélérer la mise en œuvre de politiques audacieuses pour mieux se porter vers les Objectifs de développement durable (Odd). 

Par   Babylas ATINKPAHOUN, le 16 avr. 2025 à 07h47 Durée 3 min.
#Objectifs de développement durable

Les chiffres sont implacables. Chaque année, entre 10 et 12 millions de jeunes Africains arrivent sur le marché du travail, tandis que seulement 3 millions d’emplois formels sont créés. Résultat : plus de 76 millions de jeunes sont privés d’opportunités professionnelles, d’éducation ou de formation. Un gouffre social qui fragilise les fondements du développement sur le continent. Au-delà de l’enjeu économique, le chômage massif des jeunes constitue une menace directe pour la stabilité des États africains. Il alimente les tensions sociales, favorise les migrations irrégulières, entretient les frustrations et compromet la légitimité des institutions. Il devient ainsi, de façon inévitable, un enjeu de gouvernance et de paix et peut hypothéquer l’atteinte des Objectifs de développement durable sur le continent. C’est le diagnostic posé lors du Forum des dirigeants africains tenu le 7 avril en Ouganda.

Il est donc urgent de passer d’une économie d’extraction à une économie de transformation, capable de créer des emplois décents, d'intégrer les jeunes et les femmes, et de tirer profit des atouts endogènes du continent.

Pour António Pedro, secrétaire exécutif chargé de l’appui aux programmes de la Commission économique pour l’Afrique (Cea), il ne suffit plus de viser une croissance du Pib en pourcentage. « L’Afrique doit construire un nouveau contrat social fondé sur l’inclusion, l’emploi et la transformation structurelle », affirme-t-il. Cela implique de mieux orienter les investissements publics et privés vers les secteurs à fort potentiel de création d’emplois tels que les énergies renouvelables, les infrastructures rurales, les industries agroalimentaires, la santé et l’économie numérique. António Pedro a appelé les gouvernements à investir dans les infrastructures de base, la connectivité, les systèmes éducatifs et de santé, tout en renforçant la gouvernance. Le secteur privé, selon lui, doit également jouer sa partition en intégrant l’emploi dans ses modèles d’affaires. « Il faut des politiques industrielles ciblées, des incitations fiscales, des financements innovants et une meilleure coopération public-privé», insiste-t-il.

Transformation structurelle

Pour répondre durablement aux défis de l’emploi, António Pedro défend une transformation structurelle des économies africaines. « L’Afrique doit sortir du piège de l’exportation des matières premières à faible valeur ajoutée», martèle-t-il. En s’inspirant de la stratégie développée entre la République démocratique du Congo et la Zambie pour la mise en place d’une zone économique spéciale dédiée à l’industrie des batteries, il montre que le continent peut créer localement des chaînes de valeur industrielles compétitives. Il évoque également la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) qui est un catalyseur essentiel pour la transformation économique du continent.

Aussi, a-t-il plaidé pour des investissements massifs dans les infrastructures logistiques, le renforcement des corridors commerciaux et la simplification des procédures douanières. L’objectif est de faire de la Zlecaf une réalité quotidienne pour les producteurs, les commerçants et les consommateurs africains.

Le diagnostic s’étend aussi à l’éducation et à la formation avec l’alerte sur l’inadéquation entre les profils formés et les besoins du marché. Plus de 80 % des jeunes Africains veulent des emplois qualifiés, mais à peine 8 % y accèdent. Il a été donc souhaité de réformer les systèmes éducatifs, en misant davantage sur les filières techniques, scientifiques et entrepreneuriales.

Le secrétaire exécutif chargé de l’appui aux programmes a mis l’accent sur l’économie des soins, un secteur à fort potentiel qui peut offrir des millions d’emplois, tout en répondant à des besoins sociaux essentiels. « L’Afrique, avec sa jeunesse, peut devenir la colonne vertébrale de l’économie mondiale des soins », a-t-il trouvé. Enfin, il appelle à une révision des normes mondiales en matière de durabilité.

Les cadres Esg (Environnement, Social, Gouvernance), tels qu’ils sont actuellement définis, freinent selon lui le développement de l’Afrique. Il propose un Esg « recalibré » et mieux aligné sur les réalités africaines. Le message des dirigeants africains en Ouganda est clair. « Nous avons les ressources, le capital humain, la vision. Ce qu’il nous faut maintenant, c’est de la volonté politique et un leadership transformateur », martèle Antonio Pédro. Il appelle les décideurs africains à placer l’emploi au cœur des stratégies de développement, à s’engager dans des réformes profondes et à accélérer la mise en œuvre des engagements pris.