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Dr Sorel Sossou à propos de « Le Diabète et Nous »: « Près de 1000 personnes dépistées et 300 agents de santé formés »

Santé
Dr Sorel Sossou, médecin endocrinologue et membre du  bureau de l’association Ablode Dr Sorel Sossou, médecin endocrinologue et membre du bureau de l’association Ablode

Le diabète est un mal silencieux dont les conséquences sont redoutables. Engagée dans la riposte contre ce mal, l’Association béninoise de lutte contre l'obésité, le diabète et les endocrinopathies (Ablode) prépare la cinquième édition de l’initiative « Le Diabète et Nous ». Dr Sorel Sossou, médecin endocrinologue et membre du bureau de l’association, donne ici les grandes lignes de l’édition 2023 de cette initiative de santé publique.

Par   Anselme Pascal AGUEHOUNDE, le 05 sept. 2023 à 07h37 Durée 4 min.
#Le Diabète et Nous
La Nation : Chaque année, depuis bientôt cinq ans, l’association Ablode organise l’initiative « Le Diabète et Nous». De quoi est-il question et quel bilan peut-on faire des précédentes éditions ?

Dr Sorel Sossou : L’initiative «Le Diabète et Nous » traite, à chaque édition, d’un thème ou d’une particularité du diabète, et est déroulée en trois activités à savoir la sensibilisation de la population à travers une communication pour un changement de comportement ; la séance de dépistage qui se déroule généralement le 14 novembre et une formation des agents de santé. Cette initiative est portée et mise en œuvre par l’Association béninoise de lutte contre l'obésité, le diabète et les endocrinopathies (Ablode) avec le concours de ses partenaires. Après quatre éditions, nous pouvons dire que grâce aux diverses collaborations avec la Croix rouge, le Lions club, Café média plus, pour ne citer que ceux-là, près de 1000 personnes ont été dépistées grâce à cette initiative. Parmi les personnes dépistées, environ 30 % avaient des hyperglycémies, environ 40 % avaient une hypertension artérielle et 30 % avaient un excès pondéral. Ce constat est le même dans les autres pays, ce qui ne fait que renforcer notre objectif qui est de lutter non seulement contre le diabète mais également ses facteurs favorisants et aggravants qui sont l’hypertension et l’obésité. S’agissant de la formation, on peut noter que plus de 300 agents de santé, principalement des médecins, ont été renforcés dans le diagnostic et la prise en charge du diabète. Cela bénéficie directement aux patients qui auront désormais accès à une meilleure qualité de soins. Quant à la sensibilisation, elle continue sous diverses formes avec des capsules diffusées en boucle à la télévision ainsi que des interventions tout au long de l’année dans différents médias de communication. Hélas, 
Cotonou, Lokossa et Abomey-Calavi sont, pour le moment, les seules villes qui ont pu bénéficier de nos actions sur le terrain. L’association s’est donné pour mission d’apporter aux habitants de toutes les communes du Bénin son accompagnement. Nous tiendrons donc compte de cela dans les prochaines éditions. 

« Le Diabète et Nous » édition 2023, comment cela va-t-il se passer ?

La cinquième édition de l’initiative « Le Diabète et Nous » a pour thème « Le pied dans tous ses états ». Car, pour bon nombre de victimes, le diabète se révèle sous forme de brûlures ressenties aux pieds, picotements, décharges électriques ou encore plaies trainantes. Ces manifestations, lorsqu’elles ne sont prises en charge assez tôt, peuvent être irréversibles, redoutables et avoir un impact socio-économique profond. En collaboration avec la société béninoise de neurologie du Centre national hospitalier universitaire Hubert Koutoukou Maga, il est prévu un dépistage de masse à Tokpa le 14 novembre 2023. Bien entendu avec la participation de médecins de plusieurs spécialités : neurologie, endocrinologie, cardiologie et nutrition. Une formation est prévue à l’endroit des médecins mais aussi à l’endroit des agents de santé des centres d’ulcère de Buruli d’Allada et de Pobè qui regorgent de patients diabétiques.

Des conseils aux concitoyens ?

Le diabète est malheureusement une maladie chronique qui ne se guérit pas. Très souvent elle ne présente aucun signe et peut donc passer inaperçue. Négligée, méconnue, cette maladie est pourvoyeuse de nombreuses complications irréversibles dont la prise en charge est très souvent difficile. La bonne nouvelle, c’est qu’on peut l’éviter en adoptant d’abord très tôt une bonne hygiène de vie, c’est-à-dire une alimentation saine ; ensuite la pratique d’une activité physique régulière et enfin un contrôle régulier de la glycémie. Si vous êtes déjà diabétique, sachez qu’on peut vivre longtemps avec cette maladie. Il suffira de bien la connaitre, d’avoir de bonnes glycémies et d’être suivi par un médecin qui aidera à reconnaitre les signes précurseurs des complications et au mieux, à les éviter. Mais dans la lutte contre ce mal, les gouvernants peuvent jouer un rôle déterminant. 

Un appel à lancer aux décideurs ?

Le nombre de Béninois atteints de diabète augmente à un rythme effarant. Ceci étant favorisé par le surpoids, l’inactivité physique, une mauvaise alimentation etc. De plus, selon de récentes données, au Bénin, il y aurait jusqu’à 70 % des personnes actuellement atteintes dont la condition n’aurait toujours pas été diagnostiquée. Ce dernier point indique clairement un manque de dépistage précoce du diabète. Cela implique que, plus les personnes vivent longtemps avec le diabète, plus il y a un risque de développer à long terme, des complications débilitantes comme l’insuffisance rénale terminale, la cécité ou l’amputation d’un membre. Le maintien d’un poids santé et la pratique de l’activité physique sont des interventions fondamentales, à la fois pour prévenir le diabète, et pour le gérer efficacement. Ces interventions doivent souvent se faire au niveau individuel certes, mais aussi à l’échelle nationale. Car nos habitudes de vie sont influencées directement par les facteurs socio-économiques. Par exemple, la mise sur le marché de boissons et aliments qui ne sont pas sains et un aménagement urbain ne favorisant pas la marche, peuvent jouer un rôle déterminant dans les habitudes de la population. Nous invitons nos autorités politiques, qui peuvent tout aussi être victimes du mal, à développer et appliquer des politiques publiques visant la promotion d’une alimentation saine et des aménagements propices à la circulation à pied et à l’activité physique.

L’association Ablode semble avoir pris sa part de responsabilité dans la lutte contre le diabète.  Qu’est-ce-qui justifie une telle implication ?

Créée en décembre 2018 par des médecins, l’Association béninoise de lutte contre l'obésité, le diabète et les endocrinopathies (Ablode) vise, en effet, à informer la population béninoise sur les maladies métaboliques et les endocrinopathies ; et soutenir les agents de santé dans le diagnostic et la prise en charge de ces pathologies. Notre combat au quotidien contre le diabète est donc la raison d’être de notre association. Reconnue par les autorités publiques, les actions de l’association se focalisent sur la prévention des maladies métaboliques et des endocrinopathies, la formation des acteurs du système sanitaire, l’accompagnement des patients porteurs d’endocrinopathies et de maladies métaboliques et la promotion d’un bon mode de vie. Consciente de l’importance de l’accès à l’information sur les maladies comme étant la première étape à franchir pour une meilleure prévention, Ablode a fait le choix de s’engager auprès des populations afin de les informer sur les maladies métaboliques et les endocrinopathies et répondre à leurs besoins par un accompagnement et un soutien qui sont adaptés à leurs besoins. Et pour toutes les bonnes volontés qui souhaitent participer d’une façon ou d’une autre à la réalisation des objectifs de ce noble projet, Ablode est ouverte à tout soutien.