Artemisia: Une alternative possible pour le traitement de certains cancers

Quelles sont les différentes espèces du genre Artemisia?

Le Genre Artemisia de la famille des Astéracées contient plusieurs espèces, mais les deux espèces sur lesquelles nous travaillons sont: l’Artemisia annua et Artemisia afra. L’Artemisia annua est une plante utilisée depuis des millénaires dans la pharmacopée chinoise pour soigner plusieurs maladies dont le paludisme. Son intérêt pour le monde de la médecine a été révélé grâce aux travaux de la célèbre chercheuse chinoise Dr Tu Youyou qui a isolé de l’Artemisia annua, l’Artemisinine, qui est la principale molécule utilisée pour soigner le paludisme aujourd’hui. C’est à base de cette molécule que toutes les CTA  (Combinaisons thérapeutiques à base d’Artemisinine sont fabriquées). Plusieurs chercheurs ont par la suite montré que la plante contient plus de 200 molécules actives qui offrent une polythérapie contre plusieurs maladies. L’Artemisia afra est une espèce africaine, originaire de l’Afrique de l’Est, utilisée également depuis des millénaires pour soigner.

Les plantes Artemisia annua et Artemisia afra peuvent être cultivées dans tous les jardins du monde. C’est une plante One Health, efficace en santé humaine, en santé animale et en santé environnementale.

Quels sont les types de pathologies qui peuvent être traitées grâce à l’Artemisia ?

L’Artemisia annua et l’Artemisia afra sont des plantes reconnues pour leurs puissantes propriétés antiparasitaires, notamment dans le traitement efficace du paludisme diagnostiqué et de la bilharziose. Elles possèdent également des vertus antivirales, antibactériennes et anti-inflammatoires.

Quelles sont les différentes formes sous lesquelles l’Artemisia peut être utilisée?

L’Artemisia peut être utilisée sous différentes formes: en tisane, en poudre, en gélules, en extrait liquide ou encore en pommade selon les usages et les pathologies ciblées. Toutefois, la forme que nous privilégions est la tisane, obtenue par infusion des feuilles séchées. Elle peut être utilisée en prévention comme en traitement curatif. Cette solution est simple, locale, peu coûteuse et donc accessible à tous. En plus de son efficacité reconnue lorsqu’elle est bien dosée et bien préparée, elle s’inscrit dans une logique d’autonomie sanitaire pour les communautés.

Par exemple, dans notre école, nous avons mis en place un protocole de consommation préventive de la tisane d’Artemisia pour les élèves, notamment pendant les périodes les plus à risque. Les résultats sont très encourageants: nous avons observé une nette diminution des cas de paludisme au sein de l’établissement, avec moins d’absentéisme et une amélioration du bien-être général des enfants.

Y a-t-il des études cliniques et des évaluations scientifiques qui ont été faites sur cette plante?

L’Artemisia suscite un intérêt scientifique croissant à l’échelle mondiale. Des centaines d’études ont été menées sur tous les continents, explorant ses applications dans les domaines de la santé humaine, de la santé animale et de la protection de l’environnement. Ces recherches sont portées par de nombreuses universités de renom.

La dynamique scientifique reste très active: les publications se multiplient, confirmant et approfondissant les propriétés thérapeutiques de cette plante. Tout récemment, une étude parue le 26 mars 2025 dans la prestigieuse revue scientifique JAMA (Journal of the American Medical Association) a apporté un éclairage majeur : elle suggère que l’Artemisia annua, utilisée sous forme de plante entière, pourrait constituer une réponse efficace et durable face à la résistance croissante aux médicaments antipaludiques.

L’Artemisia est-elle reconnue comme un médicament officiel de traitement des différentes pathologies citées?

Au Bénin, nous avons obtenu de la part du ministère de la Santé une Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) pour la tisane d’Artemisia annua et d’Artemisia afra, reconnue désormais comme médicament à base de plante. Cette autorisation permet sa commercialisation dans les officines pharmaceutiques du pays, marquant une avancée importante dans l’intégration de l’Artemisia dans les systèmes de santé formels. Au regard de de cette expérience, nous travaillons actuellement à l’obtention de la même reconnaissance réglementaire dans plusieurs autres pays, en partenariat avec les autorités sanitaires locales et des chercheurs engagés. L’objectif est de garantir la qualité, la traçabilité et l’accessibilité de ces produits à base d’Artemisia, tout en respectant les cadres légaux de chaque pays.

Comment les populations locales sont-elles sensibilisées à l’usage de l’Artemisia?

Nous déployons deux approches complémentaires pour promouvoir l’usage de cette plante: la sensibilisation et la formation. Les activités de sensibilisation sont menées lors d’événements publics, de foires, de campagnes communautaires ou dans des établissements scolaires. Elles visent à faire connaître l’Artemisia, ses bienfaits, ainsi que les bonnes pratiques de préparation et d’utilisation. Mais c’est surtout à travers la formation que nous transmettons de manière approfondie le savoir et les compétences nécessaires pour cultiver, transformer et utiliser l’Artemisia en toute sécurité. Pour nous, la formation est un levier fondamental pour rendre cette solution accessible aux populations, en particulier les plus vulnérables, qui sont au cœur de notre engagement. Ces formations s’adressent aux agriculteurs et groupements de femmes, aux agents de santé communautaires et soignants traditionnels, aux Ong et associations locales et plus largement, toute personne désireuse d’apprendre à utiliser l’Artemisia de manière responsable et autonome.

Des études seraient en cours sur l’Artemisia dans le but de traiter entre autres des cancers. Dites-nous-en un peu plus?

Concernant les études sur les cancers, plusieurs publications existent déjà, notamment des travaux explorant les effets de l’artémisinine et de ses dérivés sur certaines lignées de cellules tumorales (maladies cancéreuses et non "cellules cancérigènes", comme il est parfois improprement formulé). À ce stade, nous attendons la publication officielle des résultats issus de ces recherches avant de communiquer davantage sur ces usages. Nous ne diffusons et ne vulgarisons que les données validées scientifiquement. Ce positionnement garantit la rigueur, la crédibilité et la responsabilité de notre démarche vis-à-vis des populations et des partenaires de santé.